Juin 2005 - n°100

Vaccins : un secteur où l’innovation s’accélère

Le 17 février dernier, à Paris, le Comité Vaccins des Entreprises du Médicament (LEEM) a présenté les résultats d’une enquête européenne conduite en 2004 sur la perception de la vaccination auprès du grand public européen et des professionnels de santé.

Dans tous les pays où l’étude du LEEM a été menée (c’est-à-dire en France, Allemagne, Espagne, Italie et Grande-Bretagne), la vaccination bénéficie d’une forte adhésion aussi bien chez le grand public que chez les professionnels. Partout, la vaccination est reconnue comme un acte important par une large majorité du public.
L’occasion pour nous de faire le point sur l’Industrie du vaccin en Europe et préciser les innovations promises à plus ou moins long terme par une R&D des plus actives…

Une innovation qui s’accélère et se diversifie

Au cours du XXème siècle et encore aujourd’hui, les techniques d'immunisation connaissent des progrès considérables. Plus de 22 nouveaux vaccins ont ainsi été introduits depuis la fin de la deuxième guerre mondiale. La vaccination est désormais capable de prévenir 26 maladies infectieuses.
Les programmes de vaccination ont profondément transformé le visage de la médecine préventive dans le monde entier avec des résultats notables, sur des pathologies telles que la variole, la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite. De nombreux vaccins, spécifiquement conçus pour les besoins des pays en voie de développement (PED), ont d’ailleursété développés : vaccins pédiatriques combinés contre la diphtérie, le tétanos, la coqueluche, l’hépatite B et l’infection invasive à Hib… Au-delà, plusieurs centaines de projets de recherche sur des nouveaux vaccins sont en cours dans le monde.
Au cours des 20 dernières années, la vaccinologie est devenue une discipline de haute technologie qui intègre les avancées les plus récentes de la recherche fondamentale (technologies basées sur l’ADN recombinant et les hybridomes…) et associe de multiples compétences. Les vaccins se conçoivent et se produisent en effet à partir des technologies les plus innovantes en immunologie, biochimie, biologie moléculaire et microbiologie. Les biotechnologies sont de plus en plus souvent mises en œuvre, tant pour la découverte de nouvelles cibles à atteindre sur les microorganismes infectieux, que pour les méthodes de production.
Citons pour exemples les méthodes de production biotechnologiques de combinaisons vaccinales telles que le vaccin Rougeole-Oreillons-Rubéole (ROR) et les polysaccharides bactériens à protéine conjuguée contre Haemophilus influenzae de type b (Hib), les infections à méningocoque ou à pneumocoque.
Le génie génétique, quant à lui, a contribué au développement des levures recombinantes pour la production du vaccin à antigènes de surface contre l’hépatite B, ainsi que des antigènes bactériens pour les vaccins anticoquelucheux. En isolant le gène codant pour un antigène protéique protecteur, le gène inséré dans des cellules d’origine bactérienne, animale ou de levures peut en effet fabriquer la en grande quantité.
Au cours des années 80, les travaux préliminaires étudiant les vecteurs atténués ont suggéré que certains organismes naturellement ou artificiellement atténués puissent transporter l’information génétique des agents pathogènes, et, au cours de la réplication chez l’animal, transcrire, traduire et présenter cette information au système immunitaire de l’hôte. Les chercheurs ont montré que de nombreux micro-organismes (bactéries, virus ou parasites) peuvent être utilisés comme vecteurs. Le Bacille de Calmette-Guérin (BCG) contre la tuberculose, et la salmonelle atténuée sont deux des bactéries les plus fréquemment utilisées. Parmi les virus, les poxvirus, les adénovirus, les alphavirus et d’autres agents ont égalementété étudiés. C’est ainsi que depuis 1980, plus de 20 nouveaux vaccins sont venus compléter l’arsenal disponible et que les procédés mis au point garantissent toujours mieux la qualité et la sécurité des vaccins.

L’industrie du vaccin en Europe

L’Europe joue un rôle essentiel dans la recherche et le développement de vaccins ainsi que dans leur fabrication. Deux tiers des 18 200 personnes, qui travaillent pour l’Industrie du vaccin dans le monde, sont d’ailleurs domiciliés en Europe. En 2002, 2,8 milliards de doses (72,6 % de la production mondiale) ont été vendues à partir de l’Europe.
Neuf grandes entreprises fournissent presque tous les vaccins utilisés en Europe et la grande majorité de ceux utilisés dans le reste du monde : Sanofi Pasteur MSD, Sanofi-Pasteur, Baxter, Berna Biotech, Chiron Vaccines, GlaxoSmithkline Biologicals, Merck & Co, Solvay Pharmaceuticals, Wyeth Vaccines.

Recherche & Développement :
A elles seules, ces neuf entreprises disposent de 18 sites de production et de 11 centres de R&D dédiés aux vaccins (Allemagne, Autriche, Belgique, Espagne, France, Hongrie, Italie, Pays-Bas, République Tchèque, Royaume-Uni et Suisse).
En 2002, ces entreprises ont dépensé 1,5 milliards d’euros en R&D. Ce qui représente près de 24 % des ventes, contre 19,4 % en moyenne dans l’industrie pharmaceutique. Environ 97 % des investissements de R&D ont été financés par des fonds privés (laboratoires + partenariats privés). Seulement 2,6 % du budget provenaient de fonds publics externes, principalement des agences gouvernementales des Etats membres de l’Union Européenne qui ont participé à hauteur de 1,7 MEuros.
2/3 des projets R&D sont situés en Europe (Europe : 89 projets, Amérique du Nord : 47, autres pays : 3). Environ la moitié des projets de R&D concernent des antigènes qui n’ont jamais été commercialisés ni enregistrés.
Accélérer la Recherche et le
Développement de nouveaux vaccins est l’une des principales préoccupations des entreprises du médicament. Plusieurs objectifs sont visés :
- développer des adjuvants vaccinaux (substances utilisées dans la composition des vaccins pour augmenter, prolonger ou accélérer la réponse immunitaire aux antigènes des vaccins) : Outre les adjuvants sous forme de gel, généralement préparés à partir de sels d’aluminium, de nouveaux types d’adjuvants sont en cours d’évaluation, dont des adjuvants microbiens (tels que l’ADN bactérien), particulaires (utilisant, par exemple, la technologie des virosomes), à base d’émulsion huileuse et de surfactant, synthétiques, composés de cytokines ou génétiques ;
- garantir la conformité avec les exigences réglementaires et de sécurité croissantes qui s’appliquent à la fabrication des vaccins ;
- développer des combinaisons vaccinales pour réduire le nombre total d’injections.
Ceci aura également pour conséquence de limiter l’exposition aux douleurs potentielles dues à l’injection, de diminuer le temps passé en consultations médicales, réduire les déchets et augmenter la sécurité d’injection en utilisant moins de seringues, mais aussi d’accroître la couverture vaccinale et la tolérance, réduire les coûts des programmes vaccinaux, introduire plus facilement de nouveaux antigènes dans les programmes vaccinaux existants.
- créer de nouveaux modes d’administration des vaccins pour réduire la gêne liée à l’injection (par exemple, grâce à des vaccins muqueux, topiques ou consommables)

Vaccins : des innovations d’hier à celles de demain

Aujourd’hui, la recherche s’accélère et les projets en développement laissent entrevoir,à moyen et long terme, des découvertes importantes.

De nombreux vaccins prophylactiques actuellement en cours de développement seront mis à la disposition des praticiens et des patients, en France, dans les prochaines années.
Deux vaccins, en particulier, seront bientôt à la disposition du public :
- le vaccin contre le rotavirus, à l’origine des diarrhées aiguës du nourrisson, qui permettra de diminuer les cas graves conduisant à l’hospitalisation ;
- le vaccin contre le papillomavirus humain (HPV Human Papillomavirus), impliqué dans le développement des cancers du col de l’utérus. Ce vaccin sera donc un vaccin préventif d’un cancer, assurant une protection efficace sur 70 % des cancers du col de l’utérus, pour une maladie dont la prévalence est massive (2ème cancer de la femme dans le monde).
Autres prévisions à court terme : des combinaisons Rougeole-Rubéole-Oreillons-Varicelle ; des vaccins conjugués contre les méningites A, C Y et W 135 ; un vaccin contre le Zona…
A moyen terme (entre 3 et 10 ans), devraient être mis au point des vaccins contre les hépatites C et E ; contre le Virus Epstein Barr, responsable de la mononucléose ; le cytomegalovirus ; l’herpès ; la méningite à meningocoque B ; de nouveaux vaccins contre la tuberculose, contre la grippe, Helicobacter pylori, staphylocoque, mais aussi des vaccins contre des maladies majeures du Tiers Monde : malaria, fièvre Dengue…

La recherche vaccinale s’oriente
également à plus long terme vers la mise au point de vaccins thérapeutiques dans des pathologies infectieuses comme le sida, mais aussi non infectieuses comme le cancer, la maladie d’Alzheimer et les pathologies rhumatismales…

A suivre…

SD

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