Janvier 1997 - n°14

L'impact des contaminants sur les productions industrielles

Du fait de l'évolution des techno logies et d'un besoin accru de protection des produits, la mise en œuvre des environnements à contamination maî^trisée s'est, ces dernières années , de plus en plus imposée dans les diverses activités du monde industriel. Cette maîtrise de la contamination concerne aussi bien les particules inertes que les microorganismes ou les particules biologiques.

La contamination en milieux industriels
Qu'elle soit particulaire, chimique ou microbiologique, la contamination pouvant impacter une fabrication ou une activité se situe toujours à des niveaux quantitatifs difficilement mesurables ou détectables. L'observation des secteurs d'activité qui y sont sensibles montre que, la plupart du temps, la détection d'une contamination résulte de l'apparition d'un défaut affectant le produit fabriqué (ou le malade dans le cas de la contamination hospitalière). Comme ce défaut ne peut être repéré qu'avec un certain déca lage au cours du cycle de fabri cation, les enquêtes et actions correctives coûtent toujours trop chères et leurs résultats sont souvent aléatoires.
On comprend donc qu'une bonne maîtrise des problèmes de contamination doit limiter l'impact des contaminants potentiels, mais également permettre de prendre le plus rapidement possible les actions correctives nécessaires. Cette maî'trise suppose connaissance et compréhension des phéno mènes, mais aussi le choix dans l'organisation et le management de l'entreprise.

Impact des contaminants et production
Suivant le secteur d'activité, les contaminants indésirables peuvent étre très divers en nature et en quantité:
- suivant le type d'intervention chirurgicale, le malade sera plus ou moins sensible à des micro-organismes de l'environ nement,
- les contaminants particulaires de petite taille affecteront la fabrication microélectronique alors qu'ils ne créeront que des défauts de grains visibles en peinture automobile,
- les solutés pharmaceutiques injectables ont des spécifica tions microbiologiques beau coup plus sévères que celles des solutés buvables,
- les gaz ultra-purs de l'électro nique ont des concentrations d'impuretés chimiques extrê mement faibles par rapport aux mêmes gaz utilisés dans d'autres applications.

Les salles blanches actuelles couvrent un très large spectre de concentrations en contaminants particulaires: de 40 à 4 000 000 de particules de diamètre supérieur à 0,5 micro mètres par mètres cube d'air.

Mais malgré cette très grande variabilité, tous les secteurs sensibles aux contaminants révèlent de nombreux traits communs:

1/ dans 1'utilisation de nouvelles technologies, soit généralisées dans le secteur d'activité (élec tronique, spatial, supports de données, biotechnologie...), soit ponctuellement introduites dans une branche d'activité (industrie agro-alimentaire, peinture automobile, chimie fine, micromécanique, médecine/chi rurgie, industrie pharmaceutique et cosmétique...),
2/ par la notion de complexité qui les caractérise:

- au niveau des procédés tech nologiques pointus, à spécifica tions étroites,
- au niveau du nombre d'étapes de fabrication souvent très élevé,
- au niveau des organisations impliquées ou au niveau de la logistique.

Cette tendance technologique ne peut que s'amplifier dans les années à venir; les activités à forte valeur ajoutée s'imposant comme le futur de l'industrie européenne. Les fabrications et activi tés seront de plus en plus multiorganisations et multi-paramètres.
La compétitivité, c'est-à-dire la meilleure optimisation des instal lations et les meilleurs rendements, sera obtenue en réunissant la qualité "du premier coup" donc pour les productions sen sibles aux contaminations, en gérant le processus d'altération dans toutes ses composantes, aussi complexes et interactives soient-elles.

La maîtrise de la contamination chez quelques exemples industriels

\ Dans l'industrie pharmaceu tique, cosmétique et en particulier dans la fabrication de produits stériles, la maî'trise de la contamination est fondamentale. L'administration d'un médica ment, qui est classiquement un mélange de divers composants chimiques et organiques, suppose de fabriquer un produit respectant en tout point le dossier d'A.M.M., c'est-à-dire exempt de particules qui n'y seraient pas énoncées. Il en est de même pour les produits appliqués sur tout ou partie du corps humain. De ce fait, I'industrie cosmétique adopte, elle-aussi, ces Bonnes Pratiques de Fabrication (BPF).
La conception et le fonctionnement de la fabrication pharmaceutique constituent une part essentielle des Bonnes Pratiques de Fabrication. L'exigence d'un produit conforme requiert le respect de l'intégrité des molécules composant le médicament et induit la fabrication et le conditionnement dans des conditions soit aseptiques, soit en environnement maitrisé. Ces deux conditions nécessitent une maîtrise parfaite de la contamination des locaux et des machines, en fonction des phases de production.

\ La biotechnologie est une industrie en croissance rapide résultant directement des progrès accomplis dans les domaines du génie génétique et de la biologie cellulaire. La fabrication d'un grand nombre de produits nouveaux, grâce à l'utilisation d'agents biologiques génétiquement modifiés, exige des installations très spécialisées, à la fois pour protéger le produit et le personnel et pour éviter la libération possible dans l'environnement des organismes modifiés.
La sécurité maximale ne peut être obtenue que par des technologies éprouvées dérivant de l'industrie de la fermentation et de la conception des salles propres. La perception par le grand public des risques liés aux biotechnologies a incité un grand nombre d'autorités de tutelle à émettre des directives visant à réglementer ces nouvelles technologies.
Ces directives sont constamment révisées au fur et à mesure que s'élargit l'expérience des manipulations génétiques et que s'approfondit notre compréhension des risques qu'elles impliquent.

\ Domaine hospitalier:
Certains types d'intervention chirurgicales notamment celles touchant des organes se défendant mal contre l'infection et celles utilisant des prothèses, justifient des environnements particulièrement protégés. Il en est ainsi par exemple de la chirurgie cardio-vasculaire, de la neuro-chirurgie, de l'orthopédie ou de la chirurgie de l'œil.
Les patients présentant des facteurs de risque infectieux (âge, brûlures étendues, polytraumatismes) sont extrêmement sensibles à la contamination de l'environnement. L'utilisation d'environnements protégés dans des services hospitaliers est particulièrement favorable à la réduction des risques de contamination microbienne.
\ Les industriels de l'agro-ali mentaire sont confrontés de plus en plus aux problèmes de sécurité alimentaire. Ils doivent fabriquer des denrées dont la durée de conservation est relativement longue et dont l'innocuité doit être garantie d'une manière absolue. Ces qualités ne peuvent être assurées que grâce à une maîtrise rigoureuse de la contamination et de la multiplication microbienne.
Le système HACCP (Hazard Analysis Critical Control Point) a été mis en place dans les industries agro-alimentaires dans le but d'assurer la qualité des aliments, tout au long de la chaî ne alimentaire, de la production au consommateur final. Il s'agit d'un système qui permet d'identifier les dangers spécifiques, de les évaluer et d'établir les mesures préventives pour les maîtriser. Il permet également une surveillance de points critiques avec des actions correctives appropriées si nécessaire et une vérification de l'efficience du système...
Ces exemples industriels ne sont qu'un bref aperçu de l'importance de la maî'trise de la contamination et de l'étendue des domaines concernés.
Pluridisciplinaire, elle couvre un champ d'applications extrêmement vaste et représente aujourd'hui un véritable enjeu économique pour un grand nombre d'activités industrielles et de laboratoires.

S.DENIS

Retour aux archives de la gazette du LABORATOIRE