Octobre 2002 - n°71
Comment améliorer le traitement de l’air intérieur ?
Des alternatives à la filtration : ozonisation, irradiation UV et technique
plasma Partie I/II
Hélène CLAUDE(1,2) , Pr Jean-Louis BRISSET(1) , M. STÖRK(2)
(1) LEICA / Université de Rouen – Mont Saint Aignan :
(2) Société AIRMES Génie Climatique
Le traitement de l’air à l’heure actuelle est essentiellement
réalisé par filtration ; une filtration qui s’avère
être un moyen efficace d’épuration des micro-organismes
de l’air, mais qui rencontre cependant certaines contraintes telles
que le colmatage des filtres ; d’où une perte d’efficacité…
Ainsi, au-delà des recherches conduites pour optimiser ces procédés
de filtration, des solutions alternatives ou complémentaires sont étudiées
pour garantir un traitement de l’air intérieur plus efficace
et plus sûr.
Le point est fait sur trois d’entre elles : l’ozonisation
et l’irradiation UV, décrites et comparées aujourd’hui
dans la première partie de notre article (I/II) ; puis, la
technique plasma, qui fera l’objet d’une présentation
à part entière (partie II/II).
L’Ozonisation
La molécule d’ozone possède un potentiel d’oxydation
très élevé 2.07V [5 fois plus oxydant que l’oxygène
(0.40 V) et deux fois plus que le chlore (1.36 V)] ; un potentiel qui génère
une réactivité importante avec d’autres éléments
et composés. Le mécanisme d’action de l’ozone repose
sur le principe de l’oxydation catalytique qui détruit brutalement
la structure des substances organiques. Ainsi, l’utilisation de l’ozone
offre un haut pouvoir neutralisant des bactéries, virus, moisissures,
spores…
LA PRODUCTION
Deux modes de production de l’ozone sont généralement
rencontrés à partir d’oxygène, d’air ou d’un
mélange des deux, selon la réaction suivante : O2
+ O?? = O3
- le premier est l’irradiation UV ; l’ozone est
généré par le passage de l’air sous un rayonnement
UV entre 100 et 200 nm émis par une lampe UV.
- la seconde méthode est la décharge couronne.
Son principe repose sur l’utilisation de deux électrodes soumises
à une différence de potentiel ; la circulation d’air entre
ces électrodes permet la production d’ozone…
LES CAPACITES DE L’OZONISATION
L’ozonisation de l’air fournit les mêmes résultats
que dans l’eau. Avec cette technique, il est donc possible d’épurer
l’air des bactéries, virus, champignons tels que : Eschérichia
coli, Staphylococcus aureus, Legionella pneumophilia, Aspergillus, Rotavirus…
Cette liste est non exhaustive ; les tests réalisés sur les
éléments pathogènes les plus couramment rencontrés
prouvent l’efficacité de l’ozone.
D’autre part, une autre étude réalisée à
l’Université de Pennsylvanie montre qu’une exposition de
10 à 480 secondes à l’ozone en concentration de 300 à
1500 ppm permet d’obtenir une décontamination de 99,99 %.
Notons toutefois que l’ozone reste un gaz agressif, capable de pénétrer
dans la région respiratoire la plus profonde. Il peut causer des irritations
oculaires, de la toux, et une altération pulmonaire particulièrement
chez les enfants et les asthmatiques.
L’ozone étant classé parmi les gaz dangereux, il est nécessaire
de prendre certaines précautions :
- normes de sécurité (concentration maximale, exposition, recyclage…)
- traiter l’air avec suffisamment d’ozone actif sans dépasser
les valeurs limites dans les locaux en présence humaine
- considérer la filtration comme une étape complémentaire
- installer obligatoirement un organe de sécurité.
L’ordonnance sur l’interdiction des substances toxiques du 23
décembre 1971 (article 12) fait d’ailleurs état de l’exigence
suivante : " l’emploi d’ozone pour l’ozonisation des
locaux de séjour et d’habitation est interdit si la concentration
dans l’air dépasse 0.1 ppm ". Il est donc nécessaire
de prévoir dans les installations de production d’ozone le recyclage
de ce dernier.
Deux solutions sont envisageables : absorption de l’ozone
sur charbon activé ou sur de l’alumine ; destruction thermique
ou par UV…
L’irradiation UV
La radiation UV fait partie du spectre d’onde électromagnétique.
Elle se situe entre les rayons X et le violet du spectre visible, dans la
gamme des longueurs d’ondes comprises entre 100 et 400 nm.
Le spectre UV se divise en 4 bandes :
- UV A 400 à 315 nm : pigmentation de la peau
- UV B 315 à 280 nm : production de vitamine D antirachitique
- UV C 280 à 200 nm : cette région du spectre est utilisée
pour son pouvoir microbiocide, avec une action germicide maximale à
253.7 nm
- UV < 200 nm : les rayonnements de cette partie du spectre UV induisent
la production d’ozone à partir d’oxygène et sont
absorbés par la plupart des substances y compris l’air.
TRAITEMENT DE L’AIR
- Mode d’action
Les micro-organismes sont vulnérables à l’irradiation
à 253.7 nm à cause de la résonance entre cette longueur
d’onde et leurs structures moléculaires.
Concrètement, l’absorption de l’énergie des radiations
UV (ondes courtes) modifie certains groupes de molécules d’acide
nucléique et perturbe ainsi l’information et la réplication
de l’ADN du micro-organisme. La reproduction de ses cellules ou leur
division rendues impossibles, la mort du micro-organisme est inévitable.
- Mise en œuvre
Les rayons UVc sont produits par des lampes à vapeur de mercure.
Ce sont généralement des lampes basse pression, produisant un
rayonnement quasi-monochromatique à une longueur d’onde de 254
nm. La lumière émise est donc située dans la bande optimale
de l’effet germicide. Le rendement germicide de ces lampes est de 30
à 35 %.
L’efficacité du rayonnement dépend de différents
facteurs tels que le type de micro-organismes, l’intensité du
rayonnement UV, la longueur d’onde du rayonnement émis, la température
ou encore la proximité de la lampe. Une étude prouve qu’une
exposition courte de forte intensité et une exposition longue de faible
intensité ont le même impact sur les éléments pathogènes.
Entre quelques secondes et quelques minutes d’exposition, 90 à
99 % des virus ou des bactéries sont éliminés.
Les lampes UV ont d’ores et déjà été utilisées
avec succès pour réduire la transmission des infections nosocomiales
dans certains environnements à hauts risques au Canada. Lorsqu’elles
sont bien installées, elles révèlent une efficacité
germicide équivalente à 20 renouvellements d’air par heure.
- Effet germicide
L’effet germicide de l’irradiation UV étant étudié
depuis 1930, il est aujourd’hui incontestable que de nombreux éléments
pathogènes peuvent être éliminés par cette technique
: Escherichia coli, Pseudomanas aeruginosa, Staphylococcus aureus, Streptocoques,
Virus…
Même si d’autres études menées en parallèle
ont démontré que la photoréactivation des germes (forme
de résistance au UV) était possible, l’augmentation de
la dose d’UV et la maîtrise des autres paramètres influençant
cette photoréactivation permettent assurément une bonne décontamination
par UV.
AVANTAGES…
Par rapport aux procédés chimiques de désinfection,
la technique utilisant le rayonnement ultraviolet présente l’avantage
de ne pas induire de toxicité et de ne pas générer de
sous-produits.
Elle ne possède pas d’action rémanente et s’avère
par ailleurs peu coûteuse.
… ET LIMITES DE L’UVC
Malgré le très bon rendement d’épuration
de cette technique, il reste à noter que les UV ont une certaine influence
sur l’homme : risque pour la peau et les yeux.
Il existe des valeurs limites d’exposition pour les zones " occupées
" :
- maximum 0.1 _W.cm-2 pour des radiations constantes ;
- maximum 0.5 _W.cm-2 pour une exposition quotidienne de 7 heures.
D’autres solutions sont envisageables pour minimiser l’exposition
telles que la position des lampes dans les canalisations d’air ou encore
l’utilisation de déflecteurs.
Ajoutons qu’une surveillance et un entretien régulier demeurent
indispensables, de même qu’il est recommandé par le CDC
(Center Disease Control) d’utiliser la technique de l’UVGI en
complément de la filtration par filtre absolu HEPA, avec une vitesse
élevée de renouvellement d’air.
POUR CONCLURE :
La technique de l’irradiation UV est étudiée depuis
de nombreuses années déjà. Que ce soit pour le traitement
de l’eau ou de l’air, cette technique a largement prouvé
son pouvoir germicide. Cependant, il n’existe pas de recommandations
définies et l’utilisation pour le traitement de l’air est
loin d’être généralisée. Il reste encore
des paramètres à définir pour une maîtrise totale
de la technique.
Comparaison UV / Ozone
Les techniques de désinfection par irradiation UV et par l’ozone
ayant été étudiées, il est possible d’établir
des comparaisons mettant en avant les spécificités de chacune,
les avantages et les inconvénients.
UV Ozone