Mai 2003 - n°78

Le Médicament : Un secteur créateur d'emplois, qui veut continuer à l'être !

par le LEEM, les Entreprises du Médicament.
Emmanuelle GARASSINO
, Responsable de l'Observatoire des métiers, de l'emploi et de la formation au LEEM

Pour la première fois, le LEEM - qui réunit 99% des Entreprises du Médicament implantées en France - rend publique l'analyse de la situation de l'emploi et des métiers dans son secteur. Une synthèse réalisée à partir des données de son "Observatoire des métiers, de l'emploi et de la formation" et de deux enquêtes menées en février et mars 2003 auprès des dirigeants des industries du médicament.
Premier exportateur de médicaments vers l'Europe, premier producteur européen et 3ème exportateur mondial, le secteur du Médicament en France est un des secteurs dont l'effectif progresse le plus, tous secteurs industriels confondus (source Unedic).
Perçues comme attirantes (73% des français conseilleraient à leurs enfants d'y travailler) en raison de leur performance technologique, leur mission de santé et la qualification de leurs métiers, les Entreprises du Médicament emploient près de 100 000 salariés, contre 80 000 en 1990, soit une progression de près de 20%. Malgré un mouvement constant de concentration des entreprises, l’industrie pharmaceutique est un des secteurs industriels en France où les effectifs ont continué à augmenter depuis plus de dix ans, de 2% en moyenne, et ce quelle que soit la taille des entreprises. Un progression qui correspond à une création nette de plus de 2000 emplois par an.

Les dirigeants confirment la tendance favorable de l’emploi…

Les deux enquêtes, réalisées auprès des Présidents et DRH des 12 premières entreprises du médicament en France, confirment les prévisions d'évolution favorable du niveau de recrutement, dans la lignée du niveau de recrutement de l'année 2002 (65% des entreprises déclarent avoir recruté davantage en 2002 qu'en 2001).
Les Entreprises du Médicament sont assurément créatrices d'emplois dans toutes les familles professionnelles (recherche et développement, production, commercialisation, fonctions transverses). En 2001, plus de 14% de leurs salariés occupent un emploi de Recherche et Développement, près de 37 % un emploi de Production, 32% de Commercialisation (marketing/promotion/ventes) et 17% un emploi administratif ou transverse (finances, RH, informatique…).
L'accent est mis sur les jeunes : en 2002, l'âge moyen est de 39 ans et +40% des salariés ont moins de 35 ans. Plus d’un tiers des recrutements concernent des jeunes diplômés, et les possibilités d’évolution sont multiples.
Notons que le secteur est, en outre, concentré sur 7 grands bassins d'emploi qui représentent près de 80% des effectifs, tous en progression: Ile de France, Rhône Alpes, Centre, Normandie, Sud-Ouest, PACA, Alsace.
En toute logique, ces besoins en recrutement ne devraient pas cesser. Les progrès scientifiques, comme par exemple l’arrivée des biotechnologies, et les évolutions économiques et réglementaires de notre secteur, demandent en effet de plus en plus de compétences spécifiques et contribuent à la création de nouveaux métiers. Parmi ceux-ci, notamment :

- des métiers nouveaux : chargés d’affaires réglementaires internationales, pharmaco-économistes, bio-informaticiens, data-managers, supply chain managers, spécialistes internet santé, attachés médico-pharmaceutique, informateurs thérapeutiques spécialisés, community relations managers…

- des métiers traditionnels requalifiés : chercheurs, attachés de recherche clinique, responsables d’études cliniques, chargés des affaires réglementaires, techniciens de production, responsables qualité, bio-statisticiens, visiteurs médicaux, logisticiens, responsables sécurité, responsables maintenance, chargés de pharmacovigilance.

- des compétences internationales et transverses : réseaux, gestion de projets, anticipation, autonomie, flexibilité…

… mais alertent sur l'inadaptation du marché du travail aux besoins de recrutement

Secteur high tech, le niveau de recrutement des entreprises du médicament est élevé. La complexité croissante des disciplines scientifiques, le développement de nouveaux champs de recherche et de développement (génie génétique, biotechnologies, biologie moléculaire), les évolutions technologiques, l’informatisation accrue des bases de données, le renforcement des exigences de qualité et de la réglementation, la mondialisation des marchés et l’intensification de la concurrence, sont autant d’évolutions qui conduisent à l’augmentation globale du niveau de qualification et à l’apparition de nouveaux besoins en compétences, très pointues et très spécifiques (thérapie génique, biopuces, nanotechnologies, supply chain, technologies de l’information et de la communication…).
Les entreprises trouvent sur le marché du travail des qualifications et des candidatures qui répondent globalement à leurs besoins, mais elles commencent à connaître des difficultés de recrutement. Selon l'enquête précitée, le marché du travail ne répond pas à près de 20% de ses besoins de recrutement.

Prenons pour exemple les métiers de la Recherche & Développement.
Les effectifs de R&D ont fortement augmenté ces 15 dernières années, et la proportion de personnes exerçant à ces fonctions est particulièrement élevée dans les entreprises du médicament. La R&D représente, en effet, 14% des effectifs en 2001, soit environ 14 000 personnes, contre 9% en 1985 (plus de 6 000 personnes).
Toutefois, longtemps considérée comme le 2ème découvreur de médicaments, la France n’occupe plus le même rang actuellement. La croissance des effectifs de R&D, bien que toujours réelle, est aujourd’hui moins forte.
De leur côté, le domaine de la pharmacovigilance et du data-management continuent à offrir de nombreux débouchés, au même titre que les affaires réglementaires, du fait notamment des changements et du renforcement des réglementations sur les médicaments, les fusions et de l’internationalisation des dépôts d’AMM.
La R&D des entreprises du médicament se réalisent par ailleurs de plus en plus en collaboration avec des partenaires extérieurs : start-up de biotechnologies, CRO, laboratoires universitaires, fournisseurs en développement galénique…
Entre autres métiers nouveaux ou en développement : bioinformaticien, spécialiste nanotechnologies, spécialiste brevets, gestionnaire de sous-traitance, chargé de l’information scientifique et médicale, responsable de la veille scientifique et technologique, responsable des technologies…

Dans le domaine des métiers transverses, par ailleurs, la qualité prend une place croissante.
Au niveau de la production, une augmentation des postes en contrôle qualité est observée. Les métiers de l’assurance qualité connaissent un développement important, en particulier dans les secteurs où elle était encore assez peu développée comme dans le marketing, les affaires réglementaires, la logistique et la distribution.

Enfin, tous les métiers liés à la communication par Internet se multiplient. Les laboratoires sont de plus en plus nombreux à créer des sites institutionnels grand public, comprenant des parties uniquement accessibles aux médecins…

Les profils de formation recherchés et les compétences qui font la différence entre candidats

Du fait de leur spécialité, les entreprises du médicament emploient un nombre important de pharmaciens, de médecins, de scientifiques de formations supérieures ou égales à Bac +4 (maîtrises de sciences de la vie, doctorants de spécialité…), des profils Bac +4 en gestion/marketing et de plus en plus d’ingénieurs.

- Les pharmaciens et les médecins y exercent des métiers très divers, comme attaché de recherche clinique, chargé de pharmacovigilance, responsable de l’assurance qualité, mais aussi chef de produit ou chef de gamme. Les pharmaciens sont également très présents en production, et occupent une place prépondérante en affaires réglementaires/enregistrements.

- Les universitaires scientifiques se retrouvent majoritairement en recherche et développement, mais sont aussi présents en commercialisation et diffusion, ainsi qu’en " contrôle qualité " en production. Les diplômés non scientifiques travaillent principalement en commercialisation et diffusion.

- Les ingénieurs se placent de plus en plus sur des métiers de recherche et de production, en tant que chefs de production, responsables de maintenance industrielle, responsables méthodes ou environnement/sécurité…

- Les jeunes de formation Bac +2 (BTS ou DUT de biochimie, biologie, sciences de la vie, biotechnologies, titre de technicien en pharmacie industrielle, DU/DEUST ou diplôme national de visite médicale…) ont accès à différents métiers du secteur : technicien de laboratoire de recherche ou de contrôle, techniciens de fabrication, acheteur, visiteur médical, délégué pharmaceutique…

- Enfin, quelques métiers de l’industrie pharmaceutique sont ouverts à des jeunes de niveau Bac (scientifiques, technologiques ou professionnels, notamment bio-industries de transformation), voire BEP-CAP, comme " conducteur de ligne de conditionnement ", " agent de planning "… De façon plus marginale, des emplois d’agent de laboratoire de contrôle, agent de fabrication, opérateur de conditionnement…

Précisons par ailleurs que si les compétences techniques et scientifiques restent indispensables pour les postulants, les entreprises du médicament recherchent de plus en plus des compétences transversales : gestion de projet, aptitude à travailler en équipes multiculturelles et multinationales, maîtrise de l’anglais, management, informatique… Dans un contexte toujours plus concurrentiel et contraignant, où la qualité des produits et des thérapeutiques prédominent, les enjeux prioritaires sont d’innover, d’optimiser les coûts, de réduire les délais et ainsi, de passer d’une culture " technique " à une culture managériale.

Des propositions pour stimuler les filières ad hoc et favoriser la recherche et le progrès thérapeutique

Les Entreprises du Médicament se sont considérablement mobilisées à l'interne depuis plus d'une décennie. Grâce à un des deux observatoires nationaux des métiers, des études ont nourri une démarche très volontariste de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences ( GPEC). Elles consacrent par ailleurs 25% de plus que la moyenne nationale au budget formation, en production notamment ( CQP). Mais l'effort interne ne peut suffire face aux besoins nouveaux.

Les pouvoirs publics ont donc un rôle essentiel à jouer pour :
- revaloriser et promouvoir les filières scientifiques et techniques : médecine, pharmacie, Bac+2 à 4 en sciences de la vie,
- mettre en œuvre la réforme des études de santé (1er cycle de formation santé/sciences de la vie : vers un DEUG santé),
- faciliter l’orientation des étudiants vers la pharmacie en général et la filière industrie en particulier,
- professionnaliser les enseignements pour préparer les jeunes au monde de l’entreprise : développer la formation en alternance pour les bac+4 et +, créer un diplôme d’ingénieur en santé,
- monter des formations courtes et opérationnelles complémentaires à un bac professionnel ou technologique pour le secteur production pharmaceutique,
- offrir la possibilité de stages dans l’industrie dans le cursus de médecine.

La France doit mettre en place une véritable politique pour créer les conditions favorables au développement des expertises et de l’environnement dont les entreprises ont besoin pour continuer à favoriser l’emploi.

Pour en savoir plus, sachez que sont disponibles auprès du LEEM :

- le 1er répertoire des métiers d'un secteur industrielsur CD Rom (1995, mise à jour mars 2002 : 103 métiers décrits)
- les brochures sur les métiers et formations
- la bourses interactive de l’emploi

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