Février 2005 - n°96
Amélioration des séparations HPLC par la mise en œuvre d'une phase phényle
par Jeff Layne et Michael McGinley de Phenomenex Inc., USA
Introduction
Même si les colonnes alkyle (C18 et C8) le plus souvent utilisées
sont celles de phase inverse, il existe de nombreux cas où la mise
en œuvre d'une phase phényle pourra améliorer la sélectivité
ce qui permettra une meilleure séparation des composés d'intérêt.
Cette sélectivité unique offerte par la phase phényle
provient des interactions entre lesélectrons orbitaux π de la
phase greffée et les groupes aromatiques du composé ainsi que
des interactions stériques et des interactions de surface. Pour des
composés aromatiques, ces interactions pourront permettre une rétention
supplémentaire et une sélectivité alternative par rapport
à ce qui s'observe dans le cas d'une phase greffée alkyle (C18
ou C8). Ce type de sélectivité permettra souvent de séparer
des composés co-éluant de phase greffée alkyle.
Lors du développement de méthodes faisant appel à une
phase phényle, il faudra tenir compte de plusieurs paramètres
additionnels afin d'optimaliser une séparation et de profiter des avantages
offerts par la sélectivité supplémentaire d'une phase
phényle. Afin d'obtenir une séparation optimale, il faudra tenir
compte de la structure chimique des composés devant être analysés
ainsi que la phase organique mobile mise en œuvre (acétonitrile
ou méthanol). Il faudra finalement tenir compte du type de phase phényle
mise en œuvre pour une séparation : S'agit-il d'une phase phényle
à liaison propyle (Prodigy™ Phenyl-3), d'une phase phényle
polaire, à liaison éther (Synergi™ Polar-RP®) ou d'une
phase phényle non polaire, à liaison hexyle (Luna® Phenyl
Hexyl).
Discussion
L'illustration 1 montre un exemple excellent de la sélectivité
variable offerte par une phase phényle. En comparant les composés
aromatiques acides (AINS) de phase C18 (Synergi Hydro-RP de Phenomenex, USA)
par rapport à une phase phényle (Synergi Polar-RP de Phenomenex),
il est facile de constater les différences. Dans des conditions isocratiques,
le basculement de la phase non polaire Synergi Hydro-RP vers la phase plus
polaire Synergi Polar-RP entraîne une diminution générale
de rétention pour l'ensemble des composés. En phase greffée,
certains composés montreront cependant des changements se signalant
par une rétention réduite, changements tenant aux interactions
avec l'anneau de phényle.
Une telle interaction pourra permettre une séparation des composés
présentant une hydrophobicité similaire, ce que montrent les
pics 1 et 2 de l'illustration 1 (Indoprofène et hydroxybenzoate d'éthyle)
ainsi que des inversions dans l'ordre de rétention ce qu'illustrent
les pics 5 et 6 (Indométhacine et ibuprofène).
Pour les mélanges de composés polaires et non polaires, une
colonne phényle pourra séparer les composés n'ayant pas
été décomposés dans une colonne C18 ce qui contribuera
donc en général à réduire les temps d'analyse.
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L'illustration 2 montre bien l'utilité d'une phase phényle ; dans cet exemple, une phase C18 (Luna C18(2) de Phenomenex) aété comparée à une phase phényle, à liaison propyle (Prodigy Phenyl-3 de Phenomenex). Les chromatogrammes 2a et 2b indiquent tous les deux une rétention réduite des composés hydrophobes et une sélectivité améliorée des composés polaires à élution précoce.
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Dans cet exemple, une phase phényle est à même de fournir
une meilleure séparation des composés polaires tels que la pseudoéphédrine
et l'acétaminophène tout en démontrant la rétention
réduite d'un hydrophobe composé (parahydroxybenzoate de propyle).
Cette hydrophobicité réduite de la phase phényle permet
de réduire la phase organique mobile, les résultats en sont
une séparation améliorée des composés polaires
tout en fournissant des temps raisonnables de rétention des composés
hydrophobes comme l'indique le chromatogramme 2c.
Les illustrations 1 et 2 démontrent bien l'utilité d'une phase
phényle se basant sur la séparation du composé, mais
d'autres facteurs tels que la phase mobile peuvent également jouer
un rôle significatif lors de séparations.
La phase organique mobile mise en œuvre dans une méthode (acétonitrile
ou méthanol) peut s'avérer d'une grande importance s'il est
fait appel à une phase phényle. Ce qu'indique la rétention
d'hydrastine et de berbérine, deux composants aromatiques de base extraits
de l'hydraste du Canada.
L'illustration 3 montre comment ces deux composants seront
séparés en utilisant une phase C18 (Luna C18(2)) et une phase
phényle (Luna Phenyl-Hexyl), l'acétonitrile étant mis
en œuvre en tant que phase organique mobile. Une rétention similaire
s'observe entre les deux colonnes ce qui tient en partie à l'amélioration
de la sélectivité polaire aromatique de la phase phényle.
Cette sélectivité est de plus améliorée si la
même comparaison se fait en utilisant les mêmes colonnes, à
l'exception de la phase organique mobile modifiée d'acétonitrile
en méthanol.
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L'illustration 4 montre que l'utilisation du méthanol
en tant que phase organique mobile augmente sensiblement la rétention
des composés de phase phényle par rapportà ce qui s'observe
pour la phase alkyle C18.
L'hypothèse a été émise que l'acétonitrile
supprime les interactions π- π entre les et la phase phényle.
Cette suppression est facilitée par les électrons π de
la liaison CN de l'acétonitrile, rivalisant pour s'accrocher à
des " accepteurs " de la phase phényle et réduisant
ainsi les interactions π- π entre la phase stationnaire et les composés
aromatiques. Cette suppression est absente si le méthanol est mis en
œuvre en tant que phase organique mobile, et la rétention polaire
aromatique observée augmentera donc si le méthanol est mis en
œuvre pour effectuer de telles séparations.
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Résumé
Les données venant d'être présentées montrent nettement
l'utilité de la mise en œuvre d'une phase phényle dans
le cas de séparations où les phases alkyle (C18) ne permettent
pas de séparer de manière optimale les composés d'intérêt.
Cette sélectivité s'avère particulièrement utile
lors de la séparation polaire des composés aromatiques en permettant
une plus grande flexibilité de méthode lors de la mise en œuvre
d'une phase phényle par rapport à une traditionnelle phase alkyle
C18. L'usage variable de l'acétonitrile ou du méthanol en tant
que phase organique mobile permet le développement d'une méthode
permettant de" parfaire la mise au point " des interactions aromatiques
de manière à ce que la rétention des composés
aromatiques puisse être sélectivement modifiée afin d'obtenir
une séparation maximale par l'application d'une seule méthode.