Mars 2007 - n°119
Dissolution sous pression ou dissolution sous pression
par micro-ondes pour la pré-paration d’échantillons ?
Par Dr. Dieter Gutwerk, Manager Laboratory Technology, BERGHOF Products
+ Instruments GmbH
Pour déterminer les éléments présents dans des
corps solides, on recourt en général, après le prélèvement
et la préparation mécanique d’échantillons, à
des méthodes chimiques de dissolution par lessivage pour transformer
complètement le produit à analyser en solution et le soumettre
sous forme liquide aux séquences nécessaires à sa définition
analytique (par ex. ICP-AES, ICP-MS, AAS ou polarographie). Le but de toutes
les méthodes de dissolution consiste par conséquent à
dissoudre intégralement le produit à analyser et à décomposer
complètement le corps solide (matrice), tout en évitant des
pertes ou des contaminations. Pour le praticien, il s’avère en
outre important d’effectuer la dissolution de manière fiable,
reproductible et simple, autrement dit sans grand déploiement de forces
manuelles.
Les lessivages chimiques, utilisant différents acides minéraux
(tels que HCl, HNO3, HF, H2SO4 etc.), le peroxyde d’hydrogène
et les autres liquides réactifs se font pour cela soit dans un système
ouvert – c’est-à-dire sous pression normale -, soit dans
des récipients fermés. Ils peuvent être en outre chauffés
par convection ou dans des fours à micro-ondes.
Les températures de travail beaucoup plus élevées obtenues
constituent l’avantage de la procédure en milieu fermé
par rapport à la dissolution en milieu ouvert par recyclage ou bien
avec la «hot plate» classique. Alors que les températures
en milieu ouvert sont limitées par les points d’ébullition
des solutions d’acides, elles peuvent atteindre entre 200 et 260°
dans les récipients de dissolution fermés. Ceci accélère
la cinétique de réaction à tel point que les dissolutions
peuvent se faire en l’espace de quelques heures seulement (dissolution
sous pression à l’aide de bombes Tölg). Ceci démontre
également clairement que la température constitue le paramètre
de réaction le plus significatif, qui détermine en fin de compte
la qualité de la dissolution mais provoque simultanément dans
le récipient une poussée de pression susceptible de constituer
un risque potentiel pour la sécurité. C’est la raison
pour laquelle il faut également toujours surveiller la pression.
Au cours des dernières années, le chauffage par micro-ondes
de solutions s’est de plus en plus imposé. Les dissolutions se
font alors dans des récipients fermés, à l’aide
de matériaux inertes du point de vue chimique et transparents pour
le rayonnement par micro-ondes. Outre l’accélération de
la cinétique réactive, le chauffage direct des échantillons
prélevés entraîne une réduction supplémentaire
de la durée de dissolution dans le cas de l’utilisation d’un
système fermé. D’autre part, les caractéristiques
physico-chimiques du chauffage par micro-ondes sont à l’origine
de certains problèmes qu’il convient de prendre spécialement
en ligne de compte lors de la construction ou du choix d’un tel système
de dissolution.
- Le réchauffement en milieu micro-ondes dépend du type, de
la quantité d’échantillons, etc. Il n’arrive qu’en
cas d’exception que deux échantillons aient le même comportement.
C’est la raison pour laquelle, il convient de tenir systémati-quement
compte du réchauffement inégal des échantillons en milieu
micro-ondes pour des raisons de sécurité et de garantie d’une
reproduction optimale.
- Le réchauffement rapide des prélèvements solubles pouvant
être à l’origine de réactions exothermiques pendant
la dissolution, il s’est avéré indispensable de développer
divers systèmes de détecteurs pour surveiller les paramètres
réactifs que sont la pression et la température, et la commande
ainsi possible de la puissance des micro-ondes.
- Pour la construction des récipients de pression, il ne faut se servir
que de matériaux n’ayant absolument aucune réaction chimique
avec les acides minéraux ainsi que les agents réactifs utilisés.
Certaines matières synthétiques solides (telles que PEEK) n’ayant
qu’une transparence médiocre aux micro-ondes et résistant
mal aux acides, n’entrent pas en ligne de compte.
Dissolution sous pression en «bombes Tölg»
[1] :
Il y a plus de 30 ans déjà que la société BERGHOF
a mis au point un produit de série sur la base de la méthode
de dissolution sous pression conçue par le Prof. Tölg [1] et qu’elle
commercialise depuis, sous la marque digestec, ces récipients en acier
inoxydable pour dissolution sous pression avec liner TFMTM-PTFE. Les récipients
sont fournis avec des volumes différents de 25 à 250 ml, une
température de travail maxi de 260 °C pour une pression de travail
maxi de 200 bars. La sécurité est assurée par un système
de sécurité contre la surpression largement dimensionné.
Pour des raisons de sécurité, le chauffage s’effectue
dans des blocs thermiques spéciaux et non dans une étuve. La
dissolution est ainsi guidée de façon générale
par une température extérieure définie qui, alliée
à l’effet isolant du liner TFMTM-PTFE, permet de chauffer lentement,
avec ménagement et fiablement les prélèvements. Les températures
finales typiques sont obtenues au bout de 45 à 60 min.
En raison de la pression de travail maxi élevée de 200 bars
et de la température de travail maxi de 260 °C, ces systèmes
permettent de désagréger intégralement la quasi-totalité
des échantillons et de les dissoudre. Le fait de pouvoir prolonger
la durée de la dissolution de façon quasiment illimitée
constitue un avantage décisif de cette méthode. Il s’avère
de ce fait possible de dissoudre complètement même les prélèvements
les plus durs (tels que SiC, alpha-Al2O3).
Le système de dissolution digestec offre par conséquent une
flexibilité optimale et constitue une alternative peu onéreuse
aux dissolutions par micro-ondes surtout pour les laboratoires n’ayant
que peu d’échantillons à traiter.
Dissolution sous pression avec chauffage à
micro-ondes
À l’encontre des systèmes de dissolution sous pression
précités, les appareils de dissolution chauffés par micro-ondes
permettent de chauffer directement plusieurs prélèvements par
absorption du rayonnement micro-ondes. Ceci assure le chauffage simultané
extrêmement rapide de 8 à 12 prélèvements solubles
environ et constitue «l’effet micro-ondes» proprement dit
ou l’avantage du chauffage par micro-ondes. Une fois la température
de consigne atteinte, les réactions de désagrégation
s’effectuent aussi rapidement que dans les récipients de dissolution
sous pression en acier inoxydable chauffés de façon conventionnelle.
C’est la raison pour laquelle les dissolutions typiques par micro-ondes
ne nécessitent que 20 à 40 min. L’avantage de la dissolution
par micro-ondes est le nombre beaucoup plus élevé de prélèvements
traités grâce à la réduction de la durée
de dissolution.
Vu, cependant, que le réchauffement rapide est accompagné d’une
brusque augmentation de la pression et, le cas échéant, de réactions
exothermiques spontanées, il convient de relever en continu la courbe
de température de tous les prélèvements et de régler
en conséquence la puissance des micro-ondes. Pour des raisons de sécurité,
il s’avère avantageux de noter la courbe de pression, parallèlement
à la température, et de l’intégrer à la
commande de puissance, ceci afin de garantir la sécurité optimale
du processus.
C’est sur la base de ce principe que BERGHOF a conçu son système
de dissolution par micro-ondes speedwave MWS-3+. Des technologies brevetées
et spécialement développées pour cette application y
sont implémentées pour la mesure de la température et
de la pression. Les températures de tous les échantillons sont
mesurées directement – c’est-à-dire sans perte de
temps – et sans contact à l’aide d’un thermomètre
mid-IR, par le chauffage de la paroi du récipient. L’avantage
décisif de ce détecteur est que le rayonnement thermique de
l’échantillon est mesuré comme à travers une vitre
dans le récipient, alors que les transmetteurs à infrarouges
conventionnel ne détectent que le rayonnement thermique du récipient.
Le contrôle optique optionnel de la pression permet également
la saisie sans contact de toutes les pressions intérieures du récipient.
Une mesure dans un récipient référentielle ne s’avère
nécessaire pour aucune des deux technologies. Le contrôle combiné
de la température et de la pression assure la sécurité
optimale du processus.
Grâce au système de chargement par le haut également unique
en son genre et aux récipients ne comprenant que peu de pièces,
la manipulation est extrêmement simple. Les récipients de dissolution
se distinguent en outre par leur grande longévité.
Facit :
En résumé, on peut conclure qu’à l’heure
actuelle il est possible de dissoudre pratiquement tous les prélèvements
de matériaux avec un système de dissolution sous pression approprié,
bien que les systèmes chauffés par micro-ondes constituent la
solution la plus rentable à cause de la quantité plus élevée
d’échantillons qu’ils permettent de traiter dans le temps.
Si l’on a à faire à des prélèvements difficilement
solubles ou si la quantité d’échantillons à analyser
n’est pas importante et qu’une flexibilité optimale s’avère
nécessaire, les «vieux» récipients de dissolution
sous pression en acier inoxydable constituent toujours les solutions alternatives.
Littérature :
[1] L. Kotz, G. Kaiser, P. Tschöpel et G. Tölg Z. Anal.
Chem. 260, 207-209 (1972).