Mars 1996 - n°6
La brasserie du site de La Valentine existe depuis 1886 et s'appelait à l'origine Brasserie du Phénix. Encore aujourd'hui, ce fabuleux oiseau de la mythologie égyptienne est présent à l'entrée du bâtiment administratif et de la salle de brassage.
C'est sur le site de La Valentine que Panach' (premier panaché en bouteille) voit le jour en1979 puis Monaco de Panach' (premier monaco en bouteille) en1995.
LE GROUPE INTERNATIONAL HEINEKEN
En 1864, G.A. Heineken rachète une petite brasserie à Amsterdam avec l'ambition de brasser une bière de qualité constante, cette exigence nécessitait une meilleure maîtrise de la fermentation car, si la première bière a été brassée en Mésopotamie 6000ans avantJ.C., la stabilité et la qualité de cette boisson fermentée restaient très incertaines.
L'époque pastorienne apporte alors de nombreuses connaissances qui révolutionnent le monde de la brasserie. Tout d'abord, Pasteur prouve que la fermentation n'est pas un phénomène de "génération spontanée" mais un processus de vie, lequel résulte de la prolifération de micro-organismes: les levures. Plus tard, le danois Emile Hansen démontre que les levures issues de l'air ne conviennent pas pour obtenir une qualité constante de la bière. Les levures doivent provenir d'une culture pure, c'est-à-dire réalisée à partir d'une cellule unique.
G.A. Heineken commande des recherches à un docteur français, élève de Pasteur, H. Elion. En 1886, ce dernier met au point l'une des premières cultures de levure pure dite "levure Heineken A". Trois ans plus tard, la marque Heineken remporte le Grand Prix de Paris pour la qualité de sa bière à l'exposition universelle. Une souche de levure pure est inimitable et éternelle, la levure "Heineken A" est toujours utilisée. Cultivée à Amsterdam, elle est expédiée par avions, sous forme de pains de 10kilos, aux brasseries du groupe Heineken dans le monde entier. Car Heineken est maintenant un groupe international. Premier brasseur européen et deuxième mondial, il distribue ses marques dans plus de 170pays.
Brasseries Heineken, la filiale française du groupe, comprend trois sites de production: Mons-en Baroeul dans le Nord, Schiltigheim en Alsace et Marseille. Les marques fabriquées sont Heineken, "33" Export, Amstel, Buckler, Panach', Pelforth, George Killian's pour ne citer que les plus réputées. Brasseries Heineken occupe la deuxième place du marché français et poursuit son développement avec dernièrement l'acquisition des brasseries "Fischer" et "Caves de Saint-Arnould".
HEINEKEN LA VALENTINE : "une production 9002".
La qualité fait partie de la culture de l'entreprise. La brasserie de La Valentine a été certifiée ISO 9002 en 1993 (Le site de Schiltigheim l'a été en 1992 et celui de Mons-en Baroeul en1994. Brasseries Heineken a été le premier brasseur français 100%certifié).
Quinze personnes travaillent à l'Assurance de la Qualité mais le point fort de la brasserie est l'implication du personnel dans cet objectif de qualité.
Ainsi, un projet est en cours : celui de donner au personnel de fabrication et de conditionnement une partie des contrôles actuellement réalisés au laboratoire. Ces contrôles, effectués directement sur le lieu de production, permettront d'agir plus rapidement en cas de variation de qualité. Le laboratoire s'est déjà occupé de la formation du personnel. Le projet est au stade de la validation, les analyses sont effectuées en parallèle par l'opérateur et le laboratoire. Une fois validés, les contrôles reviendront entièrement à l'opérateur, le laboratoire réalisera alors des audits à intervalles réguliers. La mission du laboratoire s'oriente donc de plus en plus vers la formation et l'assistance techniques et scientifiques du personnel de l'usine, tandis que les opérateurs s'investissent davantage dans l'Assurance de la qualité.
LES CONTROLES
Il existe deux activités distinctes dans le laboratoire de contrôle :
- le suivi de la fabrication : de l'arrivée des matières premières au produit filtré
- le suivi du conditionnement : embouteillage, étiquetage, mise en pack.
LES MATIERES PREMIERES (malt et houblon) ne sont pas contrôlées à La Valentine mais dans des laboratoires extérieurs afin d'obtenir des certificats parallèles à ceux des fournisseurs. Les critères intéressant le brasseur sont par exemple le taux de protéines du malt (à l'origine de la formation de la mousse), son pouvoir de saccharification (obtention d'un jus fermentescible) et son potentiel d'extrait (le rendement du grain). Le taux d'humidité, la friabilité du grain, l'aspect de la mouture sont aussi contrôlés.
TOUT AU LONG DU PROCESS, des contrôles sont réalisés par le laboratoire et certains paramètres sont analysés en ligne : température, densité, taux de CO2 et O2.
L'oxygène, indispensable au bon développement de la levure, est dans la suite du process la "bête noire" du brasseur. Le taux d'oxygène est contrôlé tout au long du process après la fermentation pour en garantir un niveau minimum.
La densité du moût baisse au fur et à mesure de la fermentation puisque les sucres sont transformés en alcool et gaz carbonique, elle permet donc de suivre son bon déroulement.
Au laboratoire, un appareil spécifique au contrôle de la bière permet la mesure automatique de la densité et de la quantité d'alcool, un calculateur reconstitue (à partir de ces deux valeurs) la quantité de sucres initiale en g/100 g. Par comparaison avec le taux de sucre du moût primitif, cette quantité de sucres calculée tout au long du process permet de voir les pertes, d'établir les rendements et de calculer les bilans financiers.
A chaque étape de la fabrication, des analyses bactériologiques sont aussi réalisées au laboratoire pour vérifier l'absence de contaminants. Le brasseur ne craint pas les germes pathogènes, la bière est un milieu non propice à leur survie (alcool et pH acide) mais les bactéries lactiques et les levures sauvages peuvent facilement s'y développer et l'altérer.
SUR LE PRODUIT FINI, le laboratoire analyse, entre autre, la couleur, la turbidité, l'amertume, la mousse et la quantité des sucres résiduels, caractéristiques qui reflètent la "personnalité" de chaque bière. Le taux d'alcool est bien sûr mesuré et doit figurer sur l'étiquette. Un jury d'analyses sensorielles se réunit deux fois par semaine pour goûter les produits, ce sont des personnes de l'usine spécialement formées à détecter des faux goûts. Et depuis peu, pour compléter l'avis de ses spécialistes, la brasserie a demandé à une société de monter des dégustations le samedi matin dans l'enceinte de l'usine. Les personnes de passage (avec le centre commercial tout proche) sont appelées à goûter -en aveugle- les produits et à donner leur avis. Ce second panel de "non initiés" est très important pour Heineken puisqu'il reflète l'avis des consommateurs.
Pour gérer la qualité, la brasserie a mis au point il y a une dizaine d'année deux logiciels. Qualass (Qualité Assurance) est une base de données alimentée par les résultats des contrôles analytiques. En cas de variation par rapport aux paramètres fixés, Qualass prévient par édition de télex hors objectif les services productions en vue de la mise en place immédiate d'actions correctives. Quant à Qualat (Qualité Atelier), il gère les modes opératoires de production (fabrication, conditionnement, nettoyage, stérilisation, etc...). Créés sous DOS, ces logiciels sont en cours de modification et vont être basculés sous WINDOWS pour une meilleure convivialité.
INNOVATIONS
Brasseries Heineken contribue traditionnellement à l'évolution du marché par ses innovations. La capsule qui se dévisse est pour la première fois rencontrée sur la "33" export en1972. Le premier panaché en bouteille Panach' est mis au point en1979. En1995, c'est l'apparition de Monaco de Panach'. Cette année, création de nouveaux bouchons facilement débouchables (collerette plastique) sur les bouteilles d'un litre. Ces trois dernières années, Brasseries Heineken a aussi lancé deux nouvelles bières blondes et une bière au malt à whisky.
VERS UNE DIVERSIFICATION DE LA PRODUCTION
Jusqu'à présent, les trois sites de Brasseries Heineken avaient des productions complémentaires: ainsi la bière Heineken était brassée en Alsace, la "33" export à La Valentine.
Aujourd'hui, la volonté est de diversifier la production, la brasserie de La Valentine profite de la période creuse hivernale pour repenser les lignes de fabrication afin de brasser et conditionner un maximum de produits différents.
Cette polyvalence nécessite une grande souplesse au niveau de l'organisation et des installations.
La brasserie Heineken de La Valentine investit dans la production et la qualité mais aussi dans la protection de l'environnement, une station d'épuration est en cours de réalisation et sera opérationnelle fin1997.
LA BIERE
1 litre de bière contient en moyenne, 1 litre d'eau, 200 grammes d'orge, 2 grammes de houblon et de la levure.
L'orge ne peut s'utiliser telle quelle car l'amidon des grains n'est pas soluble dans l'eau. On la transforme donc en malt (orge germée artificiellement). Durant le maltage l'amidon se scinde en sucres fermentescibles. Les grains de malt sont ensuite concassés en farine, celle-ci est mélangée à l'eau et brassée dans de grandes chaudières en cuivre, c'est le brassage . Le jus sucré fermentescible obtenu (le moût) est filtré, additionné de houblon puis refroidi. Vient l'étape délicate de la fermentation : fermentation principale (avec les levures) puis fermentation secondaire (ou garde) où la jeune bière, débarrassée de la plupart des levures mûrit. Après filtration, la bière est conditionnée. L'opération la plus complexe du conditionnement est le remplissage ou soutirage. Après avoir chassé l'air de la bouteille, on y insuffle du gaz carbonique pour éviter que la bière ne mousse en y tombant. La projection d'un mince filet d'eau suffit ensuite à faire monter un col de mousse dans le goulot pour chasser l'oxygène. La bouteille est immédiatement capsulée.
Enfin, elle est pasteurisée
(15 à 20 mn à 60°C).
V.CROCHET