Mai 2004 - n°88

BIORET se lance dans les solutions portables de terrain !

Faire des analyses en direct sur le terrain grâce à un laboratoire portable ! Voilà le pari de cette jeune société qui " surfe " sur la nouvelle vague de la miniaturisation pour créer une alternative pratique aux matériels encombrants de laboratoires…

Le fondateur de BioRet, Jean Pollard, a plus de 30 ans d’expérience dans les technologies de l’information (microélectronique, Télécoms…) avec une composante miniaturisation. Jean Pollard se rend vite compte de l’intérêt de croiser une nouvelle science, la post-génomique, avec la microélectronique. Cette réflexion part du besoin des utilisateurs qui veulent des outils qui permettent d'effectuer des tests sur le terrain en temps réel. Aujourd'hui, mêmes les grands laboratoires et les centres de recherche, équipés de façon très coûteuse avec des solutions très performantes, recherchent des solutions adaptées au terrain. " La tendance est au changement ! Les chercheurs veulent passer des outils de recherches actuels à des outils de terrains portables, facilement utilisables dans toutes les conditions ", explique Jean Pollard." Il y a un grand besoin de miniaturisation pour des solutions de terrain adaptées aux biotechs par exemple".

Un bon départ

Partant de ce constat, l’idée commence à germer dès 2001. Jean Pollard imagine de remplacer les grands scanners assez encombrants par des solutions portables de terrain, ce qui amènerait un gain de place et de temps considérables. Fort de ces idées et du soutien de scientifiques du CNRS - François Képès, Spencer Brown, Eric Belhaire, - Jean Pollard crée la société" BioRet " en mars 2002. Incubée par la Génopole d’Evry et financée par plusieurs acteurs tels le Fond G1J (fond privé de Genopole), IDFI, l’ANVAR, le BioCritt, l’entreprise démarre pour 2 ans avec environ 250 000 Euro . Ce financement comprend le soutien de 2 Business Angels : IXCORE issue de la société française " Photonetics " (composants optiques), et un investisseur privé japonais ( lié à Nikon). BioRet bénéficie de deux bourses d’Allocation de Recherches financées par Genopole dont une est déjà utilisée.

Jean Pollard s’est aussi entouré de 2 personnes au sein de BioRet. Il s’agit d’une part de Bruno Rébillé, chargé du Business Développement et du Marketing. Diplômé du Groupe HEC. Banquier d'origine, son expérience l’amène actuellement à veiller à la stratégie de la société et à se consacrer à la recherche des capitaux nécessaires au développement. D’autre part, un biologiste Post Doctorant (Christoph Kluge), financé par une bourse Génopole et basé dans les locaux de l’ISV qui travaille sur les nouveaux formats de biopuces (BioMatrix)

BioRet a des locaux de 200 m2 avec une partie laboratoire pourvue d’appareils d’électronique, de métrologie et d’optique. Cependant, la majorité des expérimentations est effectuée dans deux laboratoires CNRS, dotés d’un matériel performant et très coûteux. Il s’agit de :

- l’ISV (Institut des Sciences du Végétal – CNRS de Gif sur Yvette) qui travaille sur le nouveau format de biopuces (BioMatrix),
- l’IEF (Institut Electronique Fondamental - CNRS Electronique d’Orsay) qui traite du développement des composants électroniques innovants de l’appareil miniaturisé.

Par ailleurs, un comité scientifique suit de près l’évolution des travaux de recherches.
Il se compose de 3 personnalités :

- Spencer Brown, un agronome Australien proche du terrain et Directeur de Recherche au CNRS de Gif sur Yvette. Il travaille dans le domaine de la génomique des végétaux et de l’imagerie cellulaire et biologique.
- François Képès, Directeur de Recherche spécialisé dans la génomique du complexe (en relation avec l’IHES) qui assure la cohérence théorique des travaux
- Eric Belhaire de l’Institut d'Electronique Fondamentale qui effectue des recherches sur les Rétines Intelligentes qui sont des processeurs optiques miniaturisés très puissants.

L’expérience du fondateur de BioRet permet d’assurer la coordination entre les électroniciens et les biologistes scientifiques, travaillant dans des laboratoires situés dans des lieux différents.
Le grand atout de BioRet est d’avoir pu fédérer ces équipes, pourtant très occupées sur d’autres activités, autour d’un projet prometteur.

Une solution intermédiaire

Actuellement, pour résumer il existe sur le marché 2 sortes de tests : le test simple sur bandelettes de diagnostics (monotest) auquel le public peut avoir accès, et des tests beaucoup plus sophistiqués utilisés dans les hôpitaux, qui sont des puits avec des grilles contenant des milliers de substances à analyser par des machines volumineuses et coûteuses.
L’équipe de BioRet a constaté et validé à la suite d'une étude de marché confiée à ALCIMED (société de conseil et d’aide à la décision appliquée aux sciences de la vie et à la chimie) qu'il existe une demande plus ciblée sur des solutions pouvant analyser des substances en moins grande quantité : 15 à 20 analyses en parallèle par exemple. BioRet développe donc une solution intermédiaireà très fort marché potentiel.

Pour répondre à ces besoins identifiés, la société souhaite développer différentes familles d’applications :
les " BioMatrix " sont des petits supports sur lesquels on peut fixer des anticorps qui vont au contact de substancesà analyser réagir bio chimiquement et produire des signaux lumineux (de chimiluminescence).

Ces signaux lumineux sont captés et traités in situ par une Rétine Intelligente , qui via son logiciel interprète les résultats des analyses ainsi effectuées.
Par exemple: les BioMatrix peuvent détecter de manière flagrante les drogues. Ainsi, une analyse avec une goutte de sérum peut révéler la présence ou non présence d’une à plusieurs drogues en parallèle. Un tel résultat permettra en faisant un test sur le terrain de réduire les coûts pour la Police et la Gendarmerie. Avec cet appareil miniaturisé, le policier pourra faire ses analyses sur le lieu d’effraction, ce qui sera évidemment un gain de temps et d’argent pour les enquêtes.

Avec le concours d’ALCIMED, l’entreprise BioRet a donc entrepris de définir en termes marketing et commerciaux les atouts technologiques et la valeur ajoutée de ce futur lecteur miniaturisé portable de faible coût et utilisable sur le terrain. Conçu par BioRet, il pourra lire et interpréter un type simplifié de biopuces à protéines, appelées BioMatrix, destinées à toutes les applications du diagnostic : agroalimentaire, environnement, santé, sécurité.

L’objectif prioritaire de BioRet est de développer avec des financements d’ici 18 à 24 mois un prototype opérationnel et validé de ce lecteur miniature révolutionnaire. Puis, de l'industrialiser en utilisant des partenaires sur la partie électronique et sur la partie fabrication de biopuces à protéines. La commercialisation des produits sera ensuite assurée par des distributeurs spécialisés.

L’entreprise recherche 4 millions d’Euros pour développer le " Personal Bio Assistant " qui aura le format d'un PALM avec des cartouches associées pour chaque application. L'utilisateur mettra la substance à analyser sur la cartouche (BioMatrix). Une réaction par chimi luminescence permettra au lecteur d’analyser les substances. La solution de BioRet permettra d'analyser en parallèle plusieurs substances différentes. Les utilisateurs n'auront pas à s'équiper de gros analyseurs très coûteux puisque le lecteur miniature ne devrait coûter que quelques milliers d’Euros, contre plusieurs dizaines de milliers d’Euros pour les grands appareils disponibles.
BioRet, mise sur une future démocratisation de cet appareil qui, par la baisse des prix, sera un jour à la portée du grand public. " Les lecteurs portables permettent de sortir les biopuces des laboratoires de recherche. Des personnels sans formation spécifique pourront utiliser cet outil diagnostic puissant sur le terrain ", confirme Bruno Rebillé.

Une entreprise commune

Les grands marché ciblés par BioRet sont :
- l’agroalimentaire, (avec un focus sur le lait)
- l’environnement (avec un focus sur l'eau),
- le diagnostic humain (test de prévention) dans environ 10 ans. Les médecins auront alors de petits appareils à titre préventif dans leurs cabinets, mais il faudra attendre une réglementation précise pour cette utilisation.
- Le diagnostic animal présente des débouchés importants. La réglementation étant moins contraignante, les vétérinaires pourront les utiliser plus facilement pour les animaux de compagnie.

BioRet souhaite développer de multiples applications en utilisant les BioMatrix. Il s’agit de produire des gammes différentes pour chaque maladie (sang, OGM…) et selon la demande des utilisateurs. Pour se faire connaître, elle a entrepris de se lancer dans une démarche internationale et
notamment au Japon, où un accord de R&D a été passé avec une grande société Japonaise d’agroalimentaire qui fabrique du concentré de soja. Des contacts ont par ailleurs été pris avec la Corée. Ces pays sont très intéressés par la miniaturisation qui est la tendance de l’avenir.

L’équipe de BioRet souhaite aussi démarcher les principaux pays Européens : Suisse, Allemagne, Angleterre, les Pays nordiques (Danemark, Suède)… BioRet a été récemment labellisée " Eurêka " pour son projet de biométrie. Celui-ci pourraitêtre utilisé dans les aéroports par exemple
pour scannériser l’iris des usagers (identification)…

Les prochains objectifs de BioRet sont tout d’abord de réunir le financemen nécessaire au développement de l'appareil avec des partenaires financiers et industriels. " Ces industriels seront à la fois dans le domaine " Bio chips " et dans le domaine de l’électronique ", explique Bruno Rebillé.
La R & D et les relations avec les manufacturers/distributeurs seront conservées en interne tandis que la production et la commercialisation seront externalisés avec des spécialistes. Pour cela des partenariats sont recherchés avec des grandes entreprises, des sociétés de production de " biopuces " et des manufacturers pour la fabrication de l’appareil.

Pour mener à bien cette entreprise de longue haleine, BioRet joue la carte de la multidisciplinarité en faisant travailler ensemble différents corps de métier.
A suivre…

M. HASLÉ