Hors Série - Spécial 10 ans

L’UIC d’Ile-de-France fait le bilan sur 10 ans de chimie

Voilà 10 ans que M. Gérald LEHMANN exerce ses fonctions à la tête de l’Union des Industries Chimiques d’Ile-de-France (UIC IdF).

Quelles évolutions a connu la Chimie francilienne ces 10 dernières années ? Quelles nouvelles réglementations ont marqué son quotidien ? Dans les domaines du Social, de l’Emploi-Formation, de la Santé-Sécurité-Environnement, quelles grandes actions a mis en œuvre l’UIC Ile-de-France ?…

M. Gérald LEHMANN, Délégué Général de l’UIC Ile-de-France-, M. Gilles Le MAIRE -Directeur du Département Social et de la communication- et M. Christian LECUSSAN – Directeur du Département Santé, Sécurité, Environnement- répondent à nos questions.

“ Tout d’abord, pouvez-vous nous rappeler quelle est la vocation de l’UIC Ile-de-France ? Ses missions et ses domaines de compétences ? ”

Membre de l’Union des Industries Chimiques, l’UIC Ile-de-France constitue un pôle d’échanges et de rencontres pour l’ensemble de la Chimie francilienne. Elle aide les entreprises dans leur développement, les représente, les conseille et met à leur disposition les outils indispensables à la bonne gestion de leurs ressources humaines ainsi qu’à l’application des réglementationséconomiques et techniques qui les concernent.

Une triple mission incombe donc à l’UIC Ile-de-France :

- représenter les entreprises auprès des instances régionales, afin que ces dernières intègrent leurs besoins et leurs attentes ;
- répondre immédiatement à leurs demandes d’informations et de conseils ;
- réunir ses adhérents pour faciliter les échanges d’expériences et consolider ainsi les intérêts de la Profession.

Rappelons également que la Chimie d’Ile-de-France, avec ses quelque 300 établissements et plus de 25 000 salariés, se distingue par plusieurs particularités. Première région française en terme de R&D, elle se caractérise également par une concentration importante de centres décisionnels : sièges sociaux, services marketing, commercial…

“ L’ensemble des grands groupes chimiques sont présents en région francilienne, qu’ils soient d’origine française, européenne ou extraeuropéenne. Néanmoins, en Ile-de-France, la taille moyenne de nos établissements est inférieure à 100 personnes et les PMEPMI, nombreuses, occupent une place déterminante ”, précise M. LEHMANN.

“ Comment les entreprises du secteur Chimie ont-elles vécu ces 10 dernières années ? ”

“ L’histoire de la Chimie n’a jamaisété un long fleuve tranquille ! ”, nous confie M. LEHMANN. “ Le secteur a de tout temps été marqué par des rapprochements, des externalisations, concentrations, fusions… ”
Ainsi, quand M. LEHMANN est entré chez Rhône-Poulenc Santé en 1984, en tant que Directeur des Ressources Humaines, la majorité de ses collègues de travail se sont présentés à lui comme “ ex-salariés de sociétés aux noms différents, tout en ayant toujours exercé sur le même site.

“ Il y a plus de 10 ans, en effet, les sociétés du secteur chimie changeaient régulièrement de“ propriétaires ”, sans pour autant que les équipes en place soient profondément modifiées , explique M. LEHMANN. Ces mouvements observés sur le marché des entreprises concernaient par ailleurs presque uniquement des sociétés franco-françaises : le“ monde de Total ”, le “ monde de Rhône-Poulenc”... ”

Depuis 10 ans, les fusions, acquisitions, externalisations… ont continué de s’enchaîner, réalisées par des groupes restés français par leurs sites d’implantation, mais dont les capitaux n’étaient plus à 100% nationaux. Ainsi, toutes ces nouvelles opérations ont multiplié les alliances des entreprises françaises avec des sociétés étrangères, des alliances qui, bien souvent, sont passées par la fusion des structures, jusqu’à parfois supprimer totalement les installations françaises.

“ Entre autres conséquences directes, nous avons donc logiquement observé des disparitions importantes d’activités et d’emplois, dans un monde qui jusqu’alors n’avait pas été touché par ce type de problèmes… ”, constate Gérald LEHMANN. A noter qu’il y a plus de 10 ans, seules les exigences de productivité, visant une performance accrue, impliquaient une réduction mesurée du personnel, sur les sites de fabrication. Mais, depuis les années 90, les grandes fusions ont impacté en premier lieu les sièges sociaux et les centres de recherche. La région francilienne, où sont basés de très nombreux pôles de recherche et sites décisionnels, a donc été directement touchée par cette évolution…

Dans ce contexte, l’Union des Industries Chimiques d’Ile-de-France s’est plus que jamais attachée à aider les entreprises. “ Les gros groupes chimiques ne sont plus ; il est donc essentiel de se battre pour que ces disparitions s’accompagnent de naissances ! , déclare M. LEHMANN. La notion de service prend alors toute son importance ; l’un des objectifs phares de l’UIC IdF ces 10 dernières années a visé à apporter aux sociétés le soutien indispensable dont elles ont besoin dans leur quotidien pour se concentrer sur leur business, sans se focaliser sur les problématiques environnementales, sociales ou réglementaires… ”

“ D’un point de vue réglementaire, relatif notamment à l’environnement et la sécurité, quels ont été les éléments marquants de ces 10 dernières années ? ”

“ Dans le domaine de la sécurité, de la santé comme de l’environnement, les entreprises n’ont aucun intérêt à tenir des informations secrètes ; elles gagnent au contraire beaucoup à partager ”, constate Christian LECUSSAN. D’où, le succès des groupes de travail et de réflexion animés au sein de l’UIC Ile-de-France.

Au cœur des discussions engagées depuis 10 ans, et encore aujourd’hui, se retrouvent notamment la gestion des déchets, l’assainissement de l’eau, la santé au travail, la loi sur les risques du 30 juillet 2003, le plan de protection de l’atmosphère, la problématique des transports, et bien sûr le programme REACH…

“ L’Ile-de-France a la particularité de posséder un tissu important de petites et moyennes entreprises qui utilisent des produits chimiques soit pour leur activité propre, soit pour en faire une préparation à action spécifique. Elles sont incluses dans un tissu urbain dense ce qui impose une inter-relation avec les collectivités locales qui doit conduire sur les plans sécurité et environnement à des solutions au niveau régional et l’UIC Île de France se mobilise pour cela, remarque M. LECUSSAN.. Ces dernières années, la limitation des CFC, du T111, par exemple, ont amené les entreprises à repenser leurs process et leurs produits, Sachant que le programme REACH allait entraîner le même type d’effets, nous nous sommes mobilisés rapidement sur cette thématique. Les entreprises franciliennes susceptibles d’être concernées par ce nouveau règlement sont nombreuses et très diversifiées par leur taille et leur production. Pour les informer sur l’impact que pourra avoir REACH sur leur “ business ”, nous avons, avec le CRITT Chimie Environnement, monté un groupe de travail et préparé un document qui permettent aux PME et PMI d’évaluer le risque économique qu’elles encourent… ”

Précisons qu’à l’échelle nationale, pour protéger l’environnement et maîtriser les risques, les industriels de la chimie ont consacré en 2003 28 % de leurs investissements totaux à la protection de l’environnement et à la maîtrise des risques. Cet effort financier place l’industrie chimique au 1er rang des secteurs industriels en France en matière de maîtrise des risques, de sécurité et de protection de l’environnement…

“ Quelle image pour la Chimie ? ”

“ Dans la conception mondiale du business, la rentabilité s’impose aujourd’hui comme un critère de première importance ; la valeur boursière étant devenue un élément essentiel ” souligne M. LEHMANN.“ Aussi, les groupes ont-ils préféré se concentrer sur le coeur de leur métiers et externaliser, voire abandonner, leurs autres activités. La chimie en a souffert, notamment en terme de création d’emplois, et n’a pas toujours été défendue à sa juste valeur… ”, ajoute Gilles Le MAIRE.

“ Que ce soit au niveau du grand public, des scientifiques ou des utilisateurs, un seul constat : notre secteur se caractérise d’abord par un manque d’image ! , poursuit M. Le MAIRE. C’est ce que nous ont confirmé les Etats Généraux de la Chimie organisés à la Cité des Sciences et de l’Industrie en décembre dernier… ”

Le second objectif de l’UIC depuis 10 ans porte donc sur la perception de la chimie. Deux points, en particulier, ont été travaillés pour raviver cette image de marque aux yeux du grand public :

1/ la coopération avec les politiques et ONG, notamment dans le domaine environnemental grâce à l’outil AFINEGE, association interprofessionnelle créée en 1989 par les entreprises de la chimie, et agréée par le ministère de l’environnement, pour la mutualisation des connaissances et le partage des bonnes pratiques dans les domaines de la santé, de la sécurité et de l’environnement ;
2/ les relations avec le milieu scolaire, afin de faire en sorte que les jeunes aient une image de la chimie plus positive que celle qu’en ont généralement leurs parents.

“ Il y a 10 ans, l’image de l’industrie chimique dans le milieu de l’enseignement était particulièrement négative, et réciproquement, souligne M. LEHMANN. Aujourd’hui, grâce à un travail de longue haleine et de nombreuses actions de rapprochement, le monde de l’Enseignement et celui de la Chimie se connaissent mieux. Ensemble, ils ont pu réßéchir aux moyens de satisfaire les besoins quantitatifs et qualitatifs en opérateurs, techniciens, ingénieurs et cadres… ”

Parmi les opérations mises en œuvre en Ile-de-France depuis 10 ans, nous retiendrons notamment :
- les travaux de l’AFPIC Chimie, organisme de formation fondé par l’UIC Ile-de-France, qui répond depuis plus de 50 ans aux besoins des entreprises de la chimie, de la parachimie et de la pharmacie ; une référence notamment en matière de formation aux risques chimiques
- l’animation du groupe de travail “ Compétences ”, qui a réuni en 1996 plus de 100 entreprises et 100 responsables pédagogiques. Une réflexion de fonds qui, pendant deux ans, a permis de débattre sur la définition des compétences utiles à la filière Chimie et sur leur intégration dans l’enseignement
- la création de l’AFI 24, en 1995 sous l’impulsion de l’UIC IdF : un centre de formation d’apprentis spécialisés dans les domaines de la chimie, parachimie et biologie.

“ En 1995, l’enseignement théorique de la chimie, jugé relativement bon par les industriels du secteur, révélait toutefois une véritable lacune sur le plan opérationnel, explique M. LEHMANN. Aussi, l’AFI 24 s’est-il positionné en tant que complément des formations classiques. Sous son égide, ont été créés des titres homologués, du BEP au diplôme d’ingénieur, axés sur la professionnalisation des jeunes chimistes… ”

N’oublions pas non plus : les Olympiades de la Chimie, les conférences animées dans les lycées par des étudiants et des jeunes retraités de la Chimie, les visites d’établissements chimiques proposées au corps enseignants, le Lavoisier de l’Apprentissage, récompensant un couple Enseignant/ Industriel dans le cadre de la formation d’un jeune, ou encore, Chimie La Classe, programme de sensibilisation destiné aux classes de CM1 et CM2…

“ Aujourd’hui, il est impossible de prévoir à long ou moyen terme les mouvements de fusion, concentration ou externalisation des sociétés. Il faut s’habituer à l’imprévisible, constate M. LEHMANN. L’enseignement doit donc être capable de s’adapter très rapidement et être capable de former,à partir d’un certain niveau, tous types de spécialistes… ”

Dans cette optique, l’UIC Ile-de-France a tissé depuis 10 ans des relations privilégiées avec l’Enseignement tant public que privé. Elle a activement participé ces dernières années à la mise en place des Licences et Masters professionnalisés, en alternance avec l’Université Paris 6…

“ Et le Village de la Chimie ? ”

“ Le Village de la Chimie se tiendra pour sa 3ème édition les 3 et 4 mars prochains, au Parc Floral de Paris. Il constitue le point d’orgue de 10 années de rapprochement entre le corps enseignant et l’Industrie , explique M. Le MAIRE. Le Village a rassemblé, l’année passée, quelque 5100 jeunes visiteurs, 150 enseignants – responsables pédagogiques et 250 professionnels de l’Industrie, autour de stands, d’exposés et conférences. Tous se sont donnés rendez-vous autour d’un même centre d’intérêt : la Chimie ! Jamais dans son histoire, l’industrie chimique n’avait réuni autant de visiteurs pour une manifestation entièrement dédiée à la Chimie, ses entreprises, ses métiers et ses formations. ”

“ Quels sont désormais vos objectifs ? ”

“ Les préoccupations qui étaient les nôtres, ces 10 dernières années,à l’échelle de l’Ile-de-France sont aujourd’hui pour beaucoup devenues nationales, constate M. LEHMANN. Aussi, souhaitons-nous partager nos idées et nos actions, plus largement, avec les autres chambres régionales ; faire en sorte que les projets initiés en Ile-de-France soient développés dans d’autres régions… ”

Quant au Village de la Chimie, dont la prochaine édition se prépare activement, il reste nourri par la même ambition : offrir une meilleure connaissance des perspectives de carrières proposées aux chimistes, du BEP au Doctorat, tout en optimisant toujours plus les relations Enseignants/Industriels.

Remarquons, enfin, qu’étant donné la grande diversité de produits et d’entreprises du secteur Chimie, aucune organisation professionnelle ne peut se prévaloir de s’exprimer au nom de tous les métiers de la Chimie.
“ Les 10 dernières années n’ont fait que renforcer cette tendance , assure M. Le MAIRE. Comment développer aujourd’hui une structure qui permette de ne pas exclure ? L’UIC Ile-de-France a fait le choix de mettre l’accent sur l’organisation de groupes de réflexion et d’événements qui permettent aux entreprises de toutes
spécialités de se réunir et dialoguer autour de projets communs… ”


Un concept qui guidera les actions futures de l’UIC Ile-de France.

Etat des lieux de l’Industrie chimique française

L’Industrie chimique française (y compris la pharmacie) se situe au cinquième rang dans le monde, après celle des Etats-Unis, du Japon, de l’Allemagne et, récemment, de la Chine. La France s’impose également comme le troisième exportateur mondial de produits chimiques et pharmaceutiques.

A l’échelle de l’Hexagone, l’année passée, la Chimie s’est positionnée comme le premier secteur exportateur de l’Industrie. Elle occupe par ailleurs la seconde position en terme de chiffre d’affaires et d’investissements, et la quatrième place en matière d’effectifs.

Par la taille de ses entreprises, comme par la variété de ses produits, l’industrie chimique se révèle sous de multiples visages. La vaste gamme des productions de l’industrie chimique (on dénombre à l’heure actuelle quelque 30 000 molécules produites et commercialisées par les entreprises chimiques françaises) s’étend en effet des grands produits de base minéraux et organiques, aux médicaments en passant par les engrais, les matières plastiques, les arômes, les colles, les produits de beauté…

Aux côtés de groupes de dimension internationale, elle compte un grand nombre de petites et moyennes entreprises. Cette industrie se caractérise par un niveau important de dépenses de recherchedéveloppement, en vue notamment d’assurer un rythme soutenu de renouvellement de ses produits.

Notez qu’en 2002 (derniers chiffres disponibles), l’industrie chimique française (hors pharmacie) a présenté des dépenses de Recherche et Développement, restées stables à hauteur de 1,6 milliards d’euros. Elle a employé au total près de 12 000 personnes en R&D, soit un effectif en hausse de 3,5 % par rapport à 1998. La part des chercheurs (niveau bac+5 et plus) a également augmenté, passant de 34 % en 1998, à 37 % en 2002...

 

 

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