Janvier 2006 - n°106

IPG : le métier du diagnostic

Une visite sur le site de l’Aeropole de Gosselies, au nord de Charleroi (Belgique) permet de découvrir un bâtiment en construction dont la stature imposante ne peut qu’étonner. Construit en arc de cercle, il épouse, sur quatre niveaux, la courbure du rond point en bordure duquel il est implanté. Campé tout à côté de l’Institut de Biologie et de Médecine Moléculaire (IBMM - voir La Gazette du Laboratoire n° 104 du 7 novembre 2005), l’Institut de Pathologie et de Génétique (IPG) est spécialisé dans le diagnostic médical en matière d’anatomopathologie, de cytogénétique, de biologie moléculaire et de microbiologie moléculaire…

Cet institut a toutefois une particularité : il s’agit bien d’un laboratoire mais qui n’assure pas les classiques analyses de biologie clinique. Il se concentre plutôt sur une pratique étroitement synergique et sur les examens d’anatomopathologie et de génétique au sens le plus large (cytogénétique, biologie et microbiologie moléculaire) qui lui sont demandés par ses partenaires cliniques. Ces derniers regroupent de nombreuses institutions hospitalières essentiellement réparties dans la moitié sud (et francophone) du pays, mais aussi des médecins spécialistes qui développent une pratique clinique privée. Au total, ce sont 250.000 examens de tous types qui bénéficient d’un rapport d’expertise médicale. Près de mille par jour, par conséquent.

Un tel niveau d’activité ne peut se concevoir, pour un pays de la taille de la Belgique, que sur la base d’une notoriété acquise et d’une évolution à l’allure d’histoire à l’américaine.
Bref retour sur une tranche d’histoire…

Il était une fois…

C’est en 1958 que le docteur Claude Fiévez décide d’abandonner une de ses pratiques médicales (la dermatologie) pour se consacrer à la seconde : l’anatomopathologie. Son expertise se développe et prend rapidement des allures d’apostolat. Les journées de vingt heures se succèdent ainsi que les déplacements pour examens extemporanés aux quatre coins du pays. 1961 voit naître une première implantation modeste tout à côté de la maison familiale du fondateur. Les services de l’épouse ne suffisent plus. Un frère pathologiste, du personnel technique et administratif sont embauchés : le « laboratoire Fievez » est sur les rails. Dix ans plus tard, il prend le statut de type Loi de 1901.

Les golden sixties auraient pu faire de ce laboratoire une structure uniquement orientée vers la recherche du profit. Si les affaires marchent incontestablement bien, une grande partie des ressources est néanmoins réinvestie dans du personnel et dans un équipement de pointe. Dans le courant des années ’70, un service de génétique humaine est modestement ouvert. Il constitue aujourd’hui un des huit centres du genre à être agréés en Belgique, le seul à ne pas être strictement universitaire.

Une première extension du bâtiment est envisagée et mise en œuvre en 1976 : on voit large et on pense être à l’abri du besoin de place pour longtemps. Dix ans plus tard, une seconde extension devient indispensable ; elle permet d’occuper tout l’espace encore disponible. Il est trop exigu aujourd’hui, ce qui a mené l’IPG à envisager la construction d’une toute nouvelle structure à une quinzaine de kilomètres du site d’origine et voisine de l’IBMM.

Et aujourd’hui ?

Ce sont aujourd’hui près de 180 personnes que l’Institut de Pathologie et de Génétique (IPG) emploie : 14 médecins pathologistes, 5 généticiens, un spécialiste en biologie clinique, un pathologiste vétérinaire, 11 biologistes (dont 5 docteurs en sciences), tous les autres étant des techniciens ou du personnel administratif.
Les techniciens –dont le rôle est fondamental dans une structure telle que l’IPG- ont une formation Bac+3 au minimum et ont en général été formés dans des écoles de la région. Nombre d’entre eux ont réalisé leur travail de fin de formation dans l’Institut, puis ont obtenu un ticket d’entrée en bonne et due forme au sein du personnel. La France étant toute proche, quelques membres du personnel viennent aussi de là-bas…

Des activités focalisées

Quelles sont les activités menées par l’IPG ? Elles répondent aux aspirations clairement affichées par la dénomination de l’institut, à savoir :

- l’anatomopathologie
- la cytologie (surtout de dépistage gynécologique)
- l’immunohistochimie
- la microscopie électronique
- la cytogénétique (y compris moléculaire)
- la biologie moléculaire
- la clinique génétique (incluant un service social et diététique)
- la foetopathologie
- la séminologie (mise au point d’infertilité masculine)
- la microbiologie moléculaire.

Une diversification en marche

En marge de ces activités strictement dévolues au diagnostic médical, l’IPG en a développé quelques autres qui relèvent de la même expertise, mais qui ne répondent pas étroitement et en même temps à la double qualification humaine et diagnostique. Une société sœur – appelée BIO.be – a par conséquent été créée à l’aube de 2002, et rassemble aujourd’hui les orientations suivantes :

- criminalistique
- pathologie vétérinaire
- qualité
- recherche scientifique (en relation le plus souvent avec des institutions sœurs).

La liste n’est évidemment pas close: d’autres projets sont à l’étude…Pour l’anecdote, l’IPG s’est également engagé dès 1982 sur la voie des PMA (procréations médicalement assistées) où elle a fait œuvre pionnière dans la région. Rendue à l’activité strictement hospitalière aujourd’hui, cette activité reste indéfectiblement associée à celle de l’Institut pour les milliers de couples, qui grâce à la FIV ou aux inséminations pratiquées sur différents modes, lui doivent aujourd’hui au moins un peu de leur bonheur familial.

Et demain ?

Plus que jamais, l’IPG (et sa filiale BIO.be) va poursuivre son activité de routine qui ne cesse de croître. Par la visibilité qu’elle acquiert de plus en plus sur un plan régional, mais aussi national et international, l’Institut devient un partenaire recherché dans la perspective d’économies de moyens et de mise en place de structures nouvelles. Il est vrai qu’un personnel très spécialisé coûte -ce qui est également le cas des équipements qui ont l’inconvénient supplémentaire d’être rapidement déclassés. Des partenariats sont par conséquent recherchés et si possible scellés par contrat, avec un bénéfice idéalement mutuel. C’est le cas de la société DNAVision, une spin off de l’ULB (université libre de Bruxelles, toute proche) qui sera dès juillet prochain hébergée dans les nouvelles structures de l’IPG.

Dans le même souci d’économie d’échelle, de visibilité et de recherche de partenaires, l’IPG s’inscrit aujourd’hui dans des réseaux spécialisés, tels que ARESA - un cluster orienté vers la recherche clinique - ou Biowin, le pôle wallon pour le domaine de la santé. Cette recherche de partenariat devrait notamment ouvrir l’Institut à des orientations nouvelles. De plus, à l’heure de l’Europe et de la redéfinition des économies régionales ou de bassins, les frontières ne prennent plus qu’une dimension bien secondaire. A deux heures et demies de Paris (par l’autoroute) ou cent minutes par le Thalys, à une heure de Lille et à 20 Km de la frontière du côté de Beaumont et de Maubeuge, le site de l’Aeropole de Gosselies et l’IPG qui s’y implante ont déjà un pied en France. A moins bien entendu que la France n’ait déjà un pied à Gosselies. Allez savoir…

Jean-Michel Debry
Biologiste. Dr Sc.

 

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