Juin 1996 - n°9

Laboratoire de Biophysique Cellulaire et RMN - Université Paris VII -Quand DELIRE et MELI-MELO font le succès de la RMN

Créé en 1992 au sein de l'Université Paris 7, le Laboratoire de Biophysique Cellulaire et RMN a pour vocation d'étudier les membranes biologiques par Résonance Magnétique Nucléaire. Son responsable, le Dr Michel SEIGNEURET, directeur de recherche au CNRS, anime une équipe de trois scientifiques: Gilles MOROT (chercheur), Christine LE GUERNEVÉ (post-doctorante) et Xavier BUTON (étudiant en thèse).

Financé par l'Université Paris 7 ainsi que par des contrats de recherche et des prestations de service, le laboratoire dispose de matériels particulièrement performants: un spectromètre de 400 MHz équipé pour la RMN des solutions et des solides ainsi qu'un système informatique de pointe pour le traitement graphique des données structurales permettent de développer, dans des conditions optimales, de nouvelles méthodes de RMN du 1 H.

" L'analyse de molécules de plus en plus grosses par RMN 1 H, 1 D a rapidement posé deux problèmes majeurs: une résolution peu satisfaisante du spectre due au recouvrement des nombreux pics et l'absence totale d'information structurale", nous explique Mr SEIGNEURET.
Pour remédier à ces faiblesses, des expériences bidimensionnelles furent tout d'abord mises au point: NOESY (Nuclear Overhauser Effect SpectroscopY), délivrant de précieuses informations structurales, et TOCSY (Total COrrelation SpectroscopY), qui permet de déterminer plus précisément à quels groupes chimiques appartiennent les protons visualisés sont encore très efficacement utilisées aujourd'hui.

Plus récemment, des techniques 3D, TOCSY-NOESY et NOESY-TOCSY, ont permis par combinaison des expériences 2D précédentes, d'éclater les protons dans un cube; d'où une meilleure résolution offrant simultanément données structurales et attribution précise des protons.

L'objectif de notre laboratoire, précise Mr SEIGNEURET, était d'appliquer ces méthodes aux peptides et protéines membranaires qui, étant donné leur envirronnement complexe, ne peuvent tourner rapidement en solution et se solubilisent très difficilement ".
Deux approches structurales de ces molécules ont été alors développées: la RMN des solutions, utilisable après solubilisation en détergent, et la RMN des solides, applicable en membrane réelle.

• RMN des solutions •
DELIRE
(Detergent ELlmination by Regioselective Excitation)

Jusqu'à peu, I'application de la RMN du 1H aux peptides et protéines membranaires nécessitait l'utilisation de détergents non-deutérés souvent peu appropriés.
"En effet, commente Mr SEIGNEURET, ces détergents, s'organisant en micelles autour des protéines membranaires pour faciliter leur solubilisation, doivent être utilisés en grand excès. Leur spectre RMN, très souvent limité à la région aliphatique, masque alors inévitablement par son amplitude celui des protons amides et aromatiques visibles de 5 à 12 ppm"
" Nous avons donc introduit une méthode permettant de limiter la contribution de n'importe quel détergent non-deutéré par l'application d'excitations régio-sélectives".

Cette technique, éliminant tout problème de distorsion de la ligne de base , présente ainsi une parfaite résolution des signaux protéiniques et peptidiques.
Appliquée à la RMN 2D, puis 3D, la méthode DELIRE, permet la restitution intégrale des informations présentes dans un cycle RMN classique, tout en offrant les propriétés propres aux expériences multidimensionnelles: données structurales et attribution des protons à un amino-acide précis.

" La recherche de détergents, mieux appropriés à la solubilisation des protéines et peptides membranaires, a également beaucoup apporté au DELIRE de la RMN " nous explique Mr SEIGNEURET.

Un nouveau type de détergent " membranomimétique", les phospholipides à chaînes courtes, a ainsi récemment permis l'application de cette méthode à certains peptides membranaires (mélittine, peptide de fusion du HIV 1).

• RMN des solides •
MELI-MELO
(MEmbrane Lipid Intensity reduction in Mas by Excitation at LOw field)

Les applications de la RMN des solides aux peptIdes et protéines membranaires avaient jusqu'à maintenant utilisé les isotopes stables (2H, 13C, 15N).

Le Laboratoire de Biophysique Cellulaire et RMN a été le premier à étudier ces molécules par la RMN du 1 H associée à Ia rotation à l'angle magique (MAS) à haute vitesse.
" La transposition de certains concepts provenant de la RMN des solutions tels que la suppression des signaux H20 et les excitations sélectives a par ailleurs permis d'observer les résonances amides et aromatiques de peptides membranaires incorporés dans des membranes constituées de lipides non-deutérés et en H20", commente Mr SEIGNEURET.
Les proximités spatiales intrapeptidiques et peptides-lipides ont pu également être détectées par interprétation des expériences 2D NOESY et 3D NOESY-NOESY.
Une fois les données structurales déterminées, deux techniques permettent d'accéder à leur représentation graphique:

Analyses et visualisations des structures s'effectuent alors par l'utilisation de logiciels performants tels que: RASMOL, QUANTA, X-PLOR...

Bénéficiant au sein de l'Université Paris 7, d'une structure d'accueil particulièrement favorable, le Laboratoire de Biophysique Cellulaire et RMN entend poursuivre ses recherches selon trois grands axes:
- I'analyse RMN de protéines membranaires de plus en plus grosses, à l'exemple de la Bactériorodopsine contenant 256 acides aminés,
- I'application à des thèmes blologiques particuliers. Citons à titre d'exemple l'étude du HIV et de son mécanisme de fusion développée par Christine LE GUERNEVÉ dans le cadre d'un contrat SIDACTION,
- et sur un plan physico-chimique, I'étude du repliement des protéines membranaires.

Des travaux aux résultats très attendus qui feront l'objet de publications régulières dans les joumaux spécialisés...

 

S.DENIS

Retour aux archives de la gazette du LABORATOIRE