Janvier 2001 - n°54
Gros plan sur l'IBAIM, l'Institut Fédératif de Recherche de Biotechnologie Agro-Industrielle de Marseille
Un pôle de recherche, de valorisation et d'enseignement en microbiologie et biotechnologie
Dans le cadre d'une contractualisation avec les Universités de Provence et de la Méditerranée, dans les locaux de l'Ecole Supérieure d'Ingénieurs de Luminy (ESIL), sur le campus de Luminy à Marseille, l'IFR de Biotechnologie Agro-Industrielle de Marseille (IBAIM) a été officiellement créé par le MENRT le 1er janvier 2000.
Cet IFR, dirigé par Marcel Asther, regroupe l'unité de Biotechnologie des champignons filamenteux de l'INRA (Directeur : Marcel Asther) et l'ex-laboratoire de Microbiologie de l'IRD nouvellement scindé en trois Unités de Recherche distinctes : "Microbiologie des environnements extrêmes" (Directeur : Bernard Ollivier), "Biotechnologie microbienne post-récolte" (Directeur : Marc Labat) et "Biodépollution et valorisation microbienne d'effluents gazeux" (Directeur : Richard Auria).
"Le thème de recherche majeur de l'IFR est la valorisation alimentaire et non alimentaire de la matière première végétale mettant en uvre des procédés de biotransformation et de bioconversion par des microorganismes. Les problèmes liés aux impacts des procédés agro-industriels sur l'environnement sont également abordés " explique Marcel Asther.
Les objectifs prioritaires de l'IBAIM sont l'acquisition de connaissances nouvelles en microbiologie, l'élaboration de bioprocédés et leur valorisation industrielle. Dans cette optique, l'IBAIM entend renforcer les synergies entre les quatre unités de recherche impliquées et mise sur le partenariat avec des laboratoires publics aux compétences complémentaires et avec des industriels français et étrangers susceptibles d'exploiter les nouvelles technologies mises au point par les chercheurs.
Développer des recherches et des structures communes
Trois grands domaines de recherche fédérateurs entrent dans le cadre de l'IBAIM :
1) La compréhension des mécanismes cellulaires et moléculaires microbiens mis en jeu lors de la biotransformation de co-produits agro-industriels d'origine végétale. La bioproduction de molécules naturelles à haute valeur ajoutée (arômes, alicaments...) à partir de matières premières végétales riches en composés à structure aromatique est un axe particulièrement développé au sein de l'IBAIM.
2) La valorisation des ressources génétiques microbiennes avec la création d'une collection de microorganismes d'intérêt industriel pour la recherche de nouvelles molécules porteuses de propriétés fonctionnelles originales (enzymes, arômes...). La sélection de lignées microbiennes génétiquement stables et hyperproductrices représente une priorité dans ce domaine.
3) Le développement et la maîtrise de nouveaux procédés de biodépollution en agro-industrie pour la réhabilitation de la qualité de l'air, des milieux et terrestres contaminés par des polluants majeurs.
Avec le soutien financier des Collectivités Territoriales, du Conseil Régional PACA, du Conseil Général 13, de la Communauté des Communes de Marseille Provence Métropole, de l'INRA et de l'IRD et des Universités Marseillaises, des nouvelles structures sont ou seront créées pour renforcer de façon prioritaire les axes de recherche de l'IBAIM. Un équipement de spectrométrie de masse pour le dosage des composés aromatiques est déjà en place. Une halle de fermentation sera opérationnelle dès 2002 sur le site de l'ESIL. Cette plate-forme technique unique sur la région, répondra à la fois aux besoins des chercheurs, des enseignants et des industriels. Elle sera structurée en trois modules : 1/ Biofiltration ; 2/ Fermentation en milieu solide ; 3/ Bioprocédés fongiques et bactériens. Enfin, la Banque de Ressources Génétiques Microbiennes, ouverte aux chercheurs et aux industriels, compte actuellement un millier de souches (70 % de champignons dont une majorité de filamenteux et 30 % de bactéries essentiellement anaérobies).
Valoriser les recherches
Les bioprocédés développés au sein de l'IBAIM intéressent de nombreux secteurs industriels et l'IFR bénéficie de plusieurs contrats avec des entreprises françaises ou étrangères et avec de grands groupes internationaux.
L'industrie papetière est intéressée par la mise en place de nouveaux traitements enzymatiques pour dégrader la lignine. Ce composé aromatique polymérique très toxique présent dans le bois provoque le jaunissement du papier qui doit être traité par des produits chimiques blanchissants particulièrement polluants. Des champignons filamenteux lignolytiques sont capables de s'attaquer à la lignine et permettent ainsi d'envisager un traitement enzymatique non polluant de la pâte à papier.
La production de vanilline naturelle par biotransformation de l'acide férulique -présent en grande quantité dans les parois des cellules végétales- concerne l'industrie des arômes tandis que de nombreuses souches spécialisées dans la dégradation des hydrocarbures trouvent des applications dans le secteur pétrolier avec, par exemple, des systèmes de biofiltration de l'air pour décontaminer des vapeurs d'essence. La biofiltration des effluents oléicoles et des sons céréaliers représentent deux exemples de filières biotechnologiques étudiées danscet IFR et qui intéresse fortement le secteur agro-industriel. La production d'acide L(+) lactique en thermophile intéresse les sucriers et les laitiers pour la fabrication de plastique biodégradable.
L'IBAIM participe également à plusieurs programmes de recherche appliquée, un programme européen vise notamment la valorisation des pulpes de café en alimentation animale après avoir dégradé la caféine résiduelle par des champignons filamenteux. La valorisation des margines d'huile d'olive est également en cours avec l'aide du Conseil Régional PACA.
Une mission d'enseignement
"La localisation de l'IFR sur le site universitaire de Marseille-Luminy permet une interface importante avec les enseignements dispensés conjointement par les Universités de Provence et de la Méditerranée dans les domaines de la microbiologe et de la biochimie. Cette mission de formation représente un axe fort de l'IFR " précise Marcel Asther.
Les enseignements sont dispensés par des enseignants-chercheurs de l'Université de Provence et des chercheurs affectés dans les unités INRA et IRD de l'IBAIM. Plusieurs formations sont concernées : le Département de Génie Biologique et de Microbiologie Appliquée de l'ESIL, l'Ecole Doctorale des Sciences de la Vie et de la Santé et les Maîtrises de Biochimie et Biologie Cellulaire. Une nouvelle licence professionnelle de Microbiologie dans les Industries Agro-Alimentaires est également créée et sera pleinement opérationnelle à la prochaine rentrée universitaire. "Ouverte aux Bac +2 dans le cadre de la formation initiale et aux techniciens des industries agro-alimentaires, la formation portera sur la gestion des risques microbiologiques dans les IAA " explique J.-C. Sigoillot, responsable de cette licence.
Les compétences des équipes fondatrices de l'IBAIM sont reconnues au niveau international, leur association au sein de l'IFR permet une meilleure lisibilité dans ces nouveaux domaines porteurs liés à la biotechnologie agro-industrielle. "Notre objectif est à terme de développer de plus en plus de recherches communes réalisées conjointement avec du personnel et des équipements communs " précise Marcel Asther. Avec une équipe d'une soixantaine de personnes, l'IBAIM confortera ainsi sa renommée internationale.
V. CROCHET
Contact :
Marcel Asther