Avril 2001 -n°57

Le laboratoire du LETI au sein du CEA Grenoble

Le spécialiste du monitoring de la contamination volatile dans les salles propres de microélectronique

Le Laboratoire d'Electronique de Technologie et d'Instrumentation (LETI), basé à Grenoble, est une entité du CEA où près de 1000 scientifiques collaborent dans les domaines des technologies du silicium, des systèmes et de l'optronique.

Le Dr François TARDIF y dirige le laboratoire "Procédés Ultra-Propres" depuis 1990 ; une équipe de 15 personnes, spécialisée sur le secteur Microélectronique dans la mesure des ultra-traces de contamination, le nettoyage ultime du silicium et le conditionnement des substrats.

"Le transfert de technologie vers le tissu industriel national est aujourd'hui une des missions importantes du CEA", nous confie M. TARDIF. " l'un des objectifs de notre laboratoire est donc de diffuser nos connaissances et notre savoir-faire dans le domaine de l'ultra-propreté en microélectronique vers d'autres secteurs industriels comme le médical, la cosmétologie, l'optique, le spatial, ..."

Directement concernées : les techniques de mesure de la contamination volatile.

De la contamination Particulaire à la contamination Volatile...

Avec l'augmentation croissante de la densité d'intégration des circuits intégrés, l'impact des contaminants sur la performance, sur la fiabilité des dispositifs ainsi que sur les rendements de production revêt de plus en plus un caractère critique pour l'industrie très concurrentielle des semi-conducteurs.

Dès le début de la production industrielle des circuits intégrés, en 1965, est mise en évidence l'aspect néfaste de la contamination Particulaire (poussières ~100 µm). C'est alors l'avènement des salles à empoussièrement contrôlé. Puis, avec l'augmentation de l'intégration des dispositifs et la diminution de l'épaisseur des matériaux, le secteur de la microélectronique doit progressivement prendre en compte les particules de plus en plus fines (jusqu'à 0,1 µm). Au début des années 80, le secteur est confronté à la contamination Ionique (traces métalliques de sodium, calcium, fer, or, cuivre...) et solutionne en partie ce problème par l'utilisation de gaz de procédé et de réactifs chimiques liquides d'extrême pureté.

Aujourd'hui, pour produire les circuits les plus avancés, la microélectronique doit faire face à un autre type de contamination jusque là ignorée : la contamination Volatile. Cette contamination, composée de molécules gazeuses, est véhiculée par l'air des salles propres sans être arrêtée par les systèmes de filtration sophistiqués mis en place contre les particules.

Sont directement incriminées des bases telles que l'ammoniac, les amines, des Acides (HCl, HF, ...), des composés organiques (alcools,...) et des dopants (bore, phosphore...).

D'autres secteurs industriels sont très probablement également victimes de la contamination volatil sans le savoir de façon explicite, du fait de son caractère parfois fugace, provocant des conséquences à première vue erratique.

"La figure ci-dessus résume l'historique de la prise en compte des différents types de contamination", souligne François TARDIF. "Si l'on remarque qu'un type de contaminant apparaît tous les 15 ans environ, on peut situer la prochaine étape aux environs de 2010 où il faudra vraisemblablement confiner les tranches de silicium dans le vide pour éviter les effets de l'oxygène et de l'eau contenus dans l'air."

Plus de contamination Volatile en salle propre que dans un bureau non fumeur !

Il faut savoir qu'en salle blanche classe 1, il y a 10 millions de fois plus de contamination sous forme volatile que de particules. Sans purificateur, les teneurs en composés volatiles y sont même paradoxalement plus élevées que dans un bureau... non fumeur.

Les origines de cette contamination sont multiples : internes et externes.

- internes, avec l'existence de nombreuses sources de contamination volatile liées aux matériaux constitutifs (murs, filtres...) et aux réactifs chimiques de procédé, mais également aux procédés eux-mêmes (fuites...) et a l'activité humaine qui génère de nombreux contaminants comme l'ammoniac.

- externes, avec le renouvellement de l'air de la salle blanche par l'introduction d'air neuf extérieur , d'où les pollutions dues au trafic routier, à l'agriculture, à l'élevage et autres industries.

Nous citerons, à ce titre, un exemple particulièrement éloquent : "Il y a quelques années, ont été notées en Hollande d'importantes difficultés à réaliser des lithographies "deepUV" nous explique M. TARDIF. "La cause en était tout simplement l'élevage intensif de porcs à proximité et toutes les conséquences que cela pouvait engendrer en terme de contamination volatile..."

Soulignons que pour l'industrie des semi-conducteurs, l'ITRS (International Technology Roadmap for Semiconductors) détermine les seuils acceptables de contamination. Les niveaux réellement mesurés dans les usines de production avancée européennes sont aujourd'hui, suivant le type de contamination volatile, environ 10 à 1000 fois supérieurs à ceux proposés par l'IRTS pour l'année 2002. Ceci montre tout le chemin à parcourir dans les années à venir, en terme de purification des salles propres.

D'importants moyens de mesure et de monitoring sont nécessaires à la maîtrise de la contamination volatile.

Le CEA - LETI et son partenaire STMicroelectronics travaillent depuis plus de deux ans sur la mise au point de méthodes analytiques permettant de mettre les usines de semi-conducteur sous contrôle, vis-à-vis de ce nouveau type de contamination.

La stratégie adoptée consiste à mesurer la contamination volatile à la fois dans l'air et sur les substrats de silicium. Les mesures dans l'air peuvent, dans certains cas, permettre de déclencher l'alarme en temps réel alors que les mesures sur substrat donnent une image plus fidèle du risque d'impact sur les rendements de production.

Les méthodes analytiques utilisées sont très variées : chromatographie ionique, chromatographie en phase gazeuse, spectrométrie de masse à ionisation par plasma, spectroscopie de mobilité d'ions, chimie luminescence.... Elles diffèrent selon la nature des contaminants volatiles considérés.

En ce qui concerne le monitoring des bases et des acides dans l'air des salles propres, le procédé d'analyse mis au point par le LETI utilise la technique de bullage (qui, en captant l'air, permet d'atteindre une limite de détection de 50 ppt), couplée à la chromatographie ionique.

"Pour les métaux, la technique de bullage est associée à la spectrométrie de masse torche à plasma (ICP-MS) tandis que pour les composés organiques, les échantillons d'air sont aspirés à travers une éponge moléculaire ("tube Tenax"), puis analysés ultérieurement par chromatographie en phase gazeuse GC/MS ou GC/FID", poursuit François TARDIF. "A noter, également, que sur tranches de silicium, l'analyse passe par l'utilisation de la désorption thermique couplé à la GC/MS."

Autant de techniques sophistiquées, adaptées par le LETI pour assurer le monitoring de la contamination volatile sur substrat et dans l'air des salles blanches.... Ces méthodes peuvent également être utilisées dans d'autres secteurs industriels.

Pour en savoir plus, n'hésitez pas à contacter M. François TARDIF :

 

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