Avril 2001 -n°57

Portrait et témoignage du Professeur Max MALACRIA, Directeur du Laboratoire de Synthèse en Chimie Organique et Organométallique (UMR 7611 CNRS) de l'Université Paris 6

C'est pour "ses synthèses stéréosélectives de produits naturels complexes" que l'Académie des Sciences a récemment décerné l'un de ses prix thématiques au Professeur Max MALACRIA, directeur du Laboratoire de Synthèse en Chimie Organique et Organométallique, Université Paris 6. Reconnu comme l'un des pionniers de la chimie dite "en cascade", il est un farouche défenseur de la formation par la recherche et entretient une forte interactivité avec le milieu industriel.

Partir de molécules très simples et construire des molécules très complexes biologiquement actives, à l'aide d'une réaction fondée sur l'utilisation de méthodologies radicalaires ou de catalyse par les métaux de transition : ainsi peut-on résumer globalement les travaux "d'architecture moléculaire" que mène l'équipe de Max Malacria.

"Par des réactions très sophistiquées, nous sommes capables d'accéder rapidement aux squelettes de molécules extrêmement complexes", explique Mr Malacria..., des résultats auxquels collaborent les 8 équipes du Laboratoire, soit 91 personnes dont 35 chercheurs et enseignants-chercheurs permanents.

Spécialiste de la synthèse de molécules polycycliques biologiquement actives

L'équipe de Max Malacria compte à son actif quelques "premières", dont le record du monde de la cascade la plus complexe : une transformation chimique qui implique onze processus radicalaires tous contrôlés !

Le Laboratoire de l'Université Paris 6 développe en effet des stratégies originales de synthèse de molécules polycycliques complexes, biologiquement actives, selon des processus en cascade. Il utilise des méthodologies radicalaires et de catalyse par les métaux de transition. Il met au point des catalyseurs d'oxydation et développe de nouvelles molécules de synthèse asymétrique. Enfin, il effectue des calculs de conformation et d'états de transition.

De fait, sous la coordination de Max Malacria, les chercheurs travaillent simultanément sur plusieurs sujets de pointe, tels que la synthèse asymétrique, la synthèse totale de molécules bio-actives, la chimie organométallique, les mécanismes réactionnels, les réactions radicalaires, la synthèse d'alcaloïdes mono ou polycycliques.

Atouts premiers du Laboratoire de Synthèse en Chimie Organique et Organométallique : un savoir-faire de haut niveau et un parc instrumental particulièrement complet.

Parmi les équipements et les méthodes utilisés : la chromatographie en phase gazeuse et liquide, l'hydrogénation 180 bars, l'électrochimie organique, l'infra-rouge, la polarimétrie, la spectrométrie CPV-Masse (quadrupolaire et trappe ionique), la spectrométrie RMN 200, 250 et 400 MHz, la synthèse en ligne, les ressources informatiques en réseau, les RX - exploités en collaboration avec une autre unité - pour la détermination des structures...

Le Laboratoire entretient des partenariats intensifs avec plusieurs autres équipes françaises ainsi qu' avec de nombreux laboratoires universitaires à l'échelle européenne (Espagne, Italie, Suisse, Grande Bretagne, Allemagne) et mondiale (USA, Maroc, Mexique, Lithuanie).

Soulignons enfin l'importance des collaborations industrielles, notamment avec de très grands groupes pharmaceutiques, cosmétiques et agro-alimentaires, tels que Aventis, Norchim, Pernod Ricard, Pierre Fabre...

La formation par la recherche : un concept phare du Laboratoire, fortement plébiscité par l'Industrie

L'engagement très net de l'Industrie dans l'actualité du Laboratoire repose sur un véritable intérêt mutuel, révélé de longue date.

Il y a une vingtaine d'années, la chimie radicalaire est encore réputée pour être difficilement contrôlable. Situées très en amont, les recherches de l'Unité de Max Malacria sont a priori très éloignées des préoccupations immédiates des industriels. Pourtant, ces derniers n'hésitent pas à franchir la porte du bureau de ce chimiste, considéré comme le chantre de la formation par la recherche.

"Nos partenaires industriels misent sur la qualité de notre formation en finançant les doctorants sous forme de bourses, en coopération avec le CNRS", explique-t-il.

Précisons que sur près d'une trentaine d'étudiants actuellement inscrits en thèse dans le laboratoire, un peu moins de la moitié est financée par l'Etat, le reste l'étant par les industriels.

Si ce sont parfois les industriels qui contactent le laboratoire, c'est le plus souvent ce dernier qui n'hésite pas à investir une partie de son temps dans cette démarche. Invité dans les congrès scientifiques, Max Malacria profite de ces occasions pour nouer des contacts. Pour le professeur, "il s'agit avant tout d'intéresser un partenaire industriel potentiel à ce que nous réalisons dans le domaine de la formation à la recherche par la thèse".

A ceux qui s'étonnent de le voir s'impliquer autant, il répond avec force : "C'est mon rôle de Professeur d'Université et j'ai toujours pratiqué de la sorte depuis que je suis responsable d'une équipe".

Une fois le contact établi, la Direction des Relations Industrielles de l'Université est aussitôt impliquée et se charge alors de négocier les contrats avec les industriels concernés.

Plusieurs façons de concevoir les contacts avec l'Industrie

"Quand j'entends certains de mes collègues ou des personnes qui s'occupent des relations avec l'Industrie, j'ai l'impression qu'il n'existe qu'une seule façon de concevoir ces contacts : avoir un projet en commun intéressant pour un industriel, qui bénéficie alors du savoir-faire de l'équipe universitaire." S'il ne condamne pas cette démarche que son équipe pratique parfois, ce chimiste, qui occupe aussi la direction de l'Ecole Doctorale de Chimie Moléculaire de Paris Centre, tient à souligner que la qualité de formateur des universitaires est un facteur important qui permet d'entretenir des relations tout à fait saines avec plusieurs groupes industriels. Estimant que la formation par la thèse devrait jouer un rôle beaucoup plus important en France, Max Malacria rappelle que le doctorat, grade universitaire le plus élevé, est le seul diplôme reconnu au plan international. En particulier, aux Etats-Unis, où plusieurs doctorants sortis du Laboratoire de Chimie Organique de Synthèse occupent aujourd'hui des postes à responsabilité au sein de groupes industriels comme Merck, Schering et Aventis.

Dans le Laboratoire de Mr Malacria, aucun des doctorants ayant réalisé une thèse n'est actuellement sans emploi et ce, grâce aux compétences acquises. Un résultat dont Max Malacria peut être fier, étant donné l'énergie qu'il y consacre !

Pour en savoir plus, vous pouvez vous reporter au troisième numéro de La Vitrine des Laboratoires de l'Université Pierre et Marie Curie. La Maison Européenne des Technologies, auteur de ce nouveau bimestriel, y a en effet publié un article consacré au Professeur Malacria et son expertise largement reconnue en matière de formation par la recherche.

Contact :

Pr Max MALACRIA

 

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