Mars 2003 - n°76
Institut des neurosciences physiologiques et cognitives
FRE2109
Les travaux de l’institut des neurosciences physiologiques et
cognitives comprennent principalement deux grands thèmes :
- les fonctions supérieures cérébrales que ce soit au
niveau des sensations et de leur intégration ou de l’action
- la compréhension du mouvement aussi bien son organisation centrale
volontaire que ses mécanismes périphériques.
Une des originalités du Laboratoire consiste à étudier
avec les enseignants-chercheurs de La Timone les nombreuses pathologies attenantes
(autisme, parkinson, sclérose latérale amyotrophique, Alzheimer...).
Actuellement les différents laboratoires marseillais sont en pleine
restructuration, l’Institut se situe donc dans une période transitoire
comme en témoigne sa dénomination FRE2109. Ce laboratoire doit
à terme, vers 2005, s’installer sur La Faculté de Médecine-Timone
avec d’autres unités pour faire un centre d’excellence
européen en Neurosciences Cognitives et Intégratives.
A cet effet, de nombreuses plate-formes technologiques se mettent en place
sur ce campus universitaire et médical. L’Unité FRE2109,
constituée de 50 permanents (20 chercheurs CNRS, 10 médecins
hospitaliers et 20 ITA), fait partie de l’IFR45 Sciences du Cerveau.
Cet Institut fédératif de plus de 250 personnes et regroupé
sur le Campus de St Charles et de La Timone est une macrostructure regroupant
des neurobiologistes, des psychologues et des médecins prêts
à s’associer sur la connaissance du cerveau.
Le Laboratoire FRE2109 comprend huit équipes dont les activités
se déclinent suivant quatre axes :
Physiologie et physiopathologie des réseaux
moteurs
Ce premier axe concerne essentiellement le motoneurone et la moelle
épinière
Mécanismes cellulaires et fonctionnels
de la commande motrice
Les recherches se focalisent sur les motoneurones de la moelle épinière
chez le rat nouveau-né. L’objectif est de comprendre les propriétés
internes et externes de ces motoneurones et de déterminer leur organisation
au cours des premiers jours après la naissance. Cette équipe,
dirigée par J. Durand essaie de comprendre comment le NMDA, récepteur
des acides aminés excitateurs, joue un rôle dans l’excitation
des neurones.
Les travaux utilisent des modèles murins (souris) auxquels sont induits
une maladie similaire à la sclérose latérale amyotrophique
(SLA), le but étant de déterminer s’ il existe sur ces
modèles des changements d’excitabilité dans les propriétés
des neurones. Avec F. Clarac, l’équipe de L. Vinay a localisé,
dés la naissance, le générateur locomoteur dans la moelle,
c’est-à-dire les zones qui, lorsqu’elles sont mises en
jeu, déclenchent l’activité locomotrice. Le rôle
de la sérotonine est mis en évidence : elle est capable, non
seulement de déclencher la locomotion mais semble également
capitale au cours de tout le développement. Elle est partie prenante
dans la maturation des propriétés des neurones. En effet, l’utilisation
de la PCPA, bloquant la sérotonine, entraîne un retard important
dans la maturation.
Unités motrices et réseaux pré-motoneuronaux
Menées par A. Schmied, les recherches concernent les caractéristiques
de la commande motrice volontaire chez l’homme et en particulier les
motoneurones qui commandent les muscles du poignet. Le but consiste à
trouver les mécanismes et les réseaux nerveux qui interviennent.
Une étude, focalisée sur les sujets atteints de SLA, a démontré
que la commande dans un bras préférentiel ne s’organise
pas de la même façon que dans un bras non préférentiel.
Il est aussi possible de stimuler chez l’homme, par un système
de stimulation magnétique transcranienne, les zones corticales qui
commandent le mouvement.
Action et adaptation
Le second axe de recherche porte sur les problèmes de motricité
centrale chez l’homme et le singe.
Enfant et habilités motrices
Sous la direction de C. Assaiante, les chercheurs travaillent sur
le développement de la motricité chez l’enfant. Ils se
focalisent essentiellement sur les problèmes de la mise en place de
la posture et du mouvement. Ces recherches sont menées en collaboration
avec des praticiens hospitaliers qui travaillent sur des déficits mécaniques
de motricité et des cas de maladies génétiques liées
à la motricité. Par exemple : des mécanismes de torsion
des membres (comment les enfants s’adaptent-ils à ces déficits
mécaniques ?).
L’enfant, au cours de ses premières années de marche,
possède une marche très rigide qui deviendra plus fluide par
la suite. L’étude concerne le rôle du bassin, des épaules…
dans la stratégie d’équilibre.
Les ajustements posturaux sont aussi observés et en particulier l’anticipation
de tout mouvement. Comment se met-elle en place chez l’enfant , alors
que les tous petits ne savent pas anticiper ? Cette étude de la fonction
d’anticipation est réalisée en particulier chez des enfants
autistes. Dans l’incapacité d’intégrer les informations
sensorielles, ces enfants sont aussi perturbés dans leur motricité.
Ils ne savent pas rendre cohérents et coordonner leurs mouvements,
il n’existe donc pas chez eux de fonction d’anticipation.
Activités posturo-cinétiques
et ganglions de la base
Cette équipe, dirigée par B. Amblard, s’occupe
des postures et des mouvements chez l’adulte. La recherche concerne
l’organisation posturale par rapport à l’environnement
extérieur. Ainsi, le cortex hémisphère droit semble très
important dans la posture. Quant à la vision, elle nous permet de nous
maintenir droit. La proprioception, elle aussi, joue aussi un rôle capital
dans le maintien. Cependant, la coordination des mouvements s’avère
très différente selon la typologie (visuelle et proprioceptive).
Cette étude du contrôle postural se centre en particulier sur
le sujet atteint de la maladie de Parkinson. Les chercheurs ont montré
qu’il existe une très grande dépendance à la vision
chez ces sujets, plus forte que chez des sujets normaux.
Neurophysiologie du mouvement dirigé
Dans la maladie de Parkinson, il existe des déficits cognitifs
des noyaux sous corticaux qui entraînent une agressivité croissante…
Les études, menées par P. Apicella, sont réalisées
chez le singe, principalement sur le striatum. Le but est de déterminer
les fonctions prédictives, c’est-à-dire comment l’animal
prévoit et s’organise dans l’environnement.
Une autre recherche porte sur la commande du mouvement chez l’homme.
L’étude concerne le rôle de chaque hémisphère
dans la commande motrice, les asymétries hémisphériques,
les problèmes d’écriture, de lecture et de motricité
manuelle … Un travail est en cours sur les dyslexiques.
Comportement et pharmacologie
Psychophysiologie du développement moteur
Cette équipe travaille chez le rat et la souris et est dirigée
par M. Jamon,. Elle s’attelle au problème du développement
moteur, c’est-à-dire à l’organisation du comportement
et du développement chez des souris et des rats normaux comparés
à des animaux atteints de maladies génétiques (utilisation
de souris transgéniques)
L’étude concerne en particulier le rôle de l’olfaction,
car ce sens semble jouer un rôle capital dans les relations entre une
mère et ses petits. Ces chercheurs s’intéressent aussi
à des modèles murins de pathologie humaine, en particulier des
maladies agissant sur la moelle épinière. Ils travaillent sur
la maladie Charcot Marie Tooth (neuropathie dégénérative),
maladie dans laquelle la myéline ne se développe pas dans certains
muscles périphériques, les muscles ne peuvent plus se contracter
et la marche s’en trouve altérée. La recherche porte sur
la mise en place de cette maladie, de son développement ou non chez
la souris et de ses conséquences.
Chez l’homme, cette maladie survient vers 20-25 ans, mais l’idée
est de trouver des signes cliniques (recherche de marqueurs) beaucoup plus
tôt pour soigner plus rapidement. Or, il apparaît que ces déficits
sont repérables grâce à tests comportementaux, alors que
la maladie ne s’est pas encore déclarée.
Pharmacologie et psychobiologie des comportements
Ce groupe, composé essentiellement d’enseignants chercheurs
de la faculté de médecine menés par O. Blin, possède
un centre de pharmacologie clinique : le CPCET (dirigé également
par O. Blin). Structure hospitalière qui sera bientôt en convention
avec le CNRS, elle est le lieu des expérimentations menées chez
l’homme au niveau de l’INPC mais aussi avec d’autres laboratoires
du CNRS.
Les études de pharmacologie clinique sont menées sur des volontaires
sains et des patients atteints de pathologies intéressantes pour l’étude
des mécanismes de la maladie, mais aussi pour les mécanismes
de fonctionnement du cerveau. “ Le but est d’obtenir une idée
des liens entre les réseaux et les fonctions ” déclare
O. Blin.
Le travail concerne également la thérapeutique, la finalité
étant de trouver des médicaments plus efficaces et mieux tolérés
par les patients.
Ces travaux sont conduits en collaboration avec l’Agence Française
de Sécurité Sanitaire de Produits de Santé, le Ministère
de la Santé… et de nombreux industriels comme GSK, Sanofi, Synthélabo,
Lundbeck, Roche, Novatis.
Ces chercheurs utilisent des approches biochimiques in vivo (mesure de concentration
de neuromédiateurs dans le sang) et des techniques d’imagerie
(imagerie fonctionnelle).
Ils ont mis en évidence les effets d’un agoniste dopaminergique
D1 chez le parkinsonien : la motricité est améliorée.
Ils travaillent aussi sur la pharmacologie des émotions : des benzodiazépines
à faible dose augmentent les réponses émotionnelles.
Une étude concerne actuellement les effets des neuroleptiques chez
les patients schizophrènes.
Perception et cognition
Dirigée par D. Mestre, l’équipe travaille sur l’enfant,
l’homme et le singe. Le premier sujet de recherche porte sur la cognition
visuelle. Comment le singe organise-t-il son activité motrice ? dans
le cadre de la vision, sait-il interpréter des images ou reconnaître
des individus sur une photo, possède–t-il la notion de profondeur
?
Chez l’enfant, l’étude concerne l’acquisition des
repères cognitifs (reconnaissance des visages et interprétation),
en particulier chez les enfants autistes.
Chez l’homme, le but est de comprendre les mécanismes d’analyse
d’un mouvement (problèmes d’illusions optiques).
Les chercheurs tentent de mettre au point de nouvelles techniques utilisant
des colorants afin d’avoir une idée plus globale du fonctionnement
des réseaux nerveux. “ L’idée est d’étudier
les populations (plusieurs neurones) dans le cortex du singe afin d’établir
les mécanismes de fonctionnement des réseaux qui permettent
l’analyse des mécanismes sensoriels…(la réalité
virtuelle, par exemple) ” commente François Clarac, le Directeur
de l’unité.
Le deuxième sujet de recherche concerne le langage et la musique chez
l’homme. Où s’intègre le langage parlé ?
existe-t-il des différences de localisation entre le chanté
et le parlé, la compréhension est-elle différente ou
non ? Est-ce que le traitement du langage (tel que l’orthographe, la
chronologie, la prosodie et leurs interactions) est distinct de celui de la
mélodie musicale ?
Cette étude est réalisée depuis deux ans grâce
à un système d’imagerie fonctionnelle cérébrale
IRMF (Image à Résonance Magnétique Fonctionnelle).
Partenariats
Chaque équipe poursuit des collaborations actives avec des
équipes étrangères (américaines, anglaises italiennes,
suisses, suédoises…). L’institut des neurosciences physiologiques
et cognitives développe également des relations avec l’industrie,
notamment Glaxo, Pharmacia&Upjohn, Pfizer, Servier, ISIS, Oktal, DTS…
Un système d’imagerie fonctionnelle
cérébrale
Les recherches menées par l’unité nécessitent
essentiellement du matériel d’électrophysiologie pour
étudier l’activité musculaire, neuronale et globale. Les
équipes utilisent également un IRMF (appareil Bruker, 3T). Financé
par le Conseil Général, le Conseil Régional, la communauté
des communes, le ministère et le CNRS, cet équipement, en fonction
depuis juillet 2000, a été acheté dans le cadre de l’IFR.
Il est installé à la Timone et est destiné uniquement
à la recherche.
J.Silvy
Contact : François Clarac