Avril 2003 - n°77
Bientôt sur le site de Trappes du Laboratoire
National d’Essais :
Un nouveau pôle de recherche en métrologie électrique
et en nanométrologie
La cérémonie de pose de la première pierre du
bâtiment, présidée par Claude PICOT et Marc MORTUREUX,
respectivement Président et Directeur général du LNE,
a eu lieu le 28 janvier 2003 en présence de tous les partenaires impliqués
: Ministère de l’Industrie, Conseil Régional d’Ile-de-France,
Conseil Général des Yvelines, Bureau National de Métrologie.
Deux ans à peine après l’inauguration de nouveaux laboratoires
d’essais sur le site des Yvelines du LNE, c’est en effet une nouvelle
extension de la plate-forme technologique de Trappes qui s’engage. La
nature du projet est néanmoins différente : après une
quinzaine d’années consacrées au regroupement progressif
de l’ensemble de ses moyens d’essais sur un même site, le
LNE affiche aujourd’hui une ambition nouvelle, à forte portée
scientifique : la constitution d’un pôle de recherche en métrologie
électrique et nanométrologie.
Contexte et objectifs de la création des nouveaux laboratoires de métrologie…
Une nouvelle ambition pour le site du LNE à
Trappes
C’est dans le cadre des missions qu’il s’est vu confiées
par le Bureau National de Métrologie (BNM) que le LNE lance, sur son
site de Trappes, la construction du futur pôle de recherche en métrologie
électrique et en nanométrologie.
Un nouveau centre de recherche qui répond à la volonté
du Laboratoire de compléter ses moyens, largement orientés vers
les entreprises, sur un plan scientifique de très haut niveau. L’objectif
est double : contribuer au progrès scientifique au niveau international,
en développant de nouveaux étalons ou en améliorant ceux
existants, et anticiper les besoins de mesure des industriels à l’échelle
de l’infiniment petit.
Ainsi le LNE sera-t-il à même d’accompagner les progrès
futurs des entreprises technologiquement avancées grâce à
des moyens de mesures d’une exactitude toujours plus grande permettant
de mieux maîtriser les processus industriels les plus exigeants.
Le projet s’inscrit dans le cadre du développement des partenariats
scientifiques du LNE avec de nombreux organismes de recherche au niveau régional,
national et européen, au service d’entreprises variées,
notamment dans les secteurs de l’électronique, de l’optique,
de l’aéronautique et des biotechnologies.
Des laboratoires de haute technologie, à
vocation internationale
Le nouveau bâtiment, baptisé MAXWELL en référence
au célèbre physicien du XIXème siècle père
de l’électromagnétisme moderne, devrait voir sa construction
achevée dès le 1er trimestre 2004.
Composé de 10 salles d’expérimentation de très
haute technicité, il répondra sur 3400 m2 aux exigences les
plus élevées en termes de conception et de construction. Des
moyens exceptionnels pour garantir des niveaux très élevés
de propreté de l’air ambiant (salles blanches), de protection
contre les perturbations électromagnétiques ainsi qu’une
très grande stabilité des températures et des fondations
(protection contre les vibrations).
Pour optimiser les transferts et synergies entre les différentes expérimentations,
les salles ont été réparties en quatre sous-ensembles
:
- un premier ensemble, dédié à la métrologie
fondamentale, destiné à accueillir les étalons
de tension (effet Josephson), de résistance (effet hall quantique),
d’intensité (effet tunnel à un électron), ainsi
que l’étalon calculable de capacité Thompson-Lambard ;
- un deuxième ensemble, consacré à la métrologie
appliquée, où seront mesurées les basses fréquences
: transfert AC/DC de courant et de tension, étalon de résistance
calculable, banc-étalon de puissances à fréquence industrielle
;
- les salles d’expérimentation de la balance du watt,
à proximité des étalons quantiques ;
- le laboratoire de nanométrologie.
Dans un an, le bâtiment MAXWELL accueillera une trentaine de docteurs-ingénieurs
et de techniciens spécialisés, dont, pour une large majorité,
les équipes travaillant déjà sur ces grandeurs au sein
du LCIE (Laboratoire Central des Industries Electriques), ainsi que l’unité
Nanométrologie située aujourd’hui au siège du LNE,
à Paris 15ème.
Des activités au carrefour entre la science
et l’industrie
Trois types d’activités seront développées en étroite
synergie, au sein du bâtiment MAXWELL :
- la maintenance et le développement des étalons de
référence dans le domaine électrique
" L’objectif est d’améliorer encore
les performances actuelles de nos étalons, pourtant déjà
réputés parmi les plus précis au monde ", nous
confie M. Marc MORTUREUX. " Nous travaillerons notamment sur la maîtrise
des phénomènes quantiques macroscopiques dont l’une des
applications est la mesure du courant «" électron par électron
"… "
La plupart des instruments de mesure utilisés pour contrôler
les processus industriels les plus sensibles (aréospatial, NTIC ou
militaire, par exemple) s’appuient généralement sur des
mesures de phénomènes électriques ; les progrès
attendus devraient donc avoir à terme des retombées très
concrètes au travers de sauts technologiques, aujourd’hui impossibles
par absence de maîtrise des mesures à une échelle suffisamment
précise.
- la conception d’une référence pour les mesures à
l’échelle nanométrique, au service des nanotechnologies
Le projet consiste à maîtriser la mesure de déplacements
de quelques millièmes de microns, afin d’ouvrir la voie au raccordement
des instruments de mesure les plus performants utilisés par les industriels
de la micro-électronique ou des biotechnologies. Il s’agit de
répondre à des besoins aujourd’hui latents, qui deviendront
critiques au fur et à mesure de l’hyper-miniaturisation des composants
électroniques et de l’industrialisation des biotechnologies.
- l’expérimentation scientifique de la convergence fondamentale
entre domaines électrique et mécanique
L’objectif du projet, mis en œuvre en partenariat avec
les différents laboratoires du BNM, vise à donner une nouvelle
définition du kilogramme, plus exacte et surtout plus reproductible.
Si, grâce à la détermination de la valeur exacte de la
vitesse de la lumière, la référence de longueur est passée
depuis de nombreuses années du mètre-étalon en platine
à l’unité de temps (la seconde), le kilogramme reste en
effet toujours défini par une masse matérialisée en platine
iridié.
L’expérimentation, dénommée " la balance du
watt ", consiste à équilibrer une force gravimétrique,
liée à la masse par une force électromagnétique
et caractérisée par des étalons électriques connus
avec une très grande exactitude. Cet équilibre permet de relier
ainsi le kilogramme aux étalons du domaine électrique, au travers
de constantes fondamentales de la physique et, en particulier, la constante
de Planck.
Le défi repose sur la maîtrise de l’ensemble des paramètres
intervenant dans cette expérimentation (y compris les variations de
la gravité, g), avec une incertitude ne dépassant pas, au global,
le centième de millionième ! Au-delà de l’intérêt
scientifique du projet (dont, en particulier, une estimation plus exacte de
la constante de Planck), sa réussite peut conduire à de nouvelles
avancées pour la maîtrise des mesures physiques pour l’industrie.
Un projet fédérateur, porteur de nouveaux partenariats scientifiques
et industriels
Le bâtiment MAXWELL, d’un coût de 10 millions d’euros,
est co-financé par le Ministère chargé de l’Industrie
pour 59,1 %, le Conseil Régional d’Ile-de-France pour 15,7 %,
le Conseil Général des Yvelines pour 11 % et le Bureau National
de Métrologie pour 14,2 %.
Ce projet fédérateur est porteur de nouveaux partenariats scientifiques
et industriels, gage de sa réussite dans la durée et de son
rayonnement au plan international.
- Sur le plan industriel, bien que la plupart des travaux menés soient
largement en amont des besoins immédiats des entreprises, il est intéressant
de noter l’implication de grands industriels de la région Ile-de-France
sur le thème de la nanométrologie ainsi que le rappochement
opéré avec le réseau d’Optics Valley rassemblant
industriels et partenaires scientifiques de la vallée de l’Essonne
pour le développement d’un secteur d’activités de
haute technologie.
- Sur le plan scientifique, les projets qui seront menés avec le soutien
du Bureau National de Métrologie font l’objet d’ores et
déjà de nombreux partenariats. Ces travaux vont en particulier
bénéficier de la richesse de la recherche scientifique en Ile-de-France
au travers de collaborations avec le CNAM (Institut National de Métrologie,
BNM-INM), l’Observatoire de Paris (Laboratoire BNM-SYRTE), le CEA à
Saclay, le Laboratoire de photonique et de nanostructure (LPN) à Marcoussis.
Plusieurs de ces projets s’intègrent, par ailleurs, dans des
réseaux d’excellence au plan européen (projets Count et
Jaws). Des coopérations internationales sont également intensifiées,
en particulier avec les laboratoires britanniques, allemands, suisses et suédois
ainsi qu’avec les américains du National Institute of Standards
and Technology (NIST) où des échanges de personnels scientifiques
se multiplient.
La construction du bâtiment marque une nouvelle étape dans le
développement du LNE en Ile-de-France, dans le cadre de sa mission
au carrefour de la science et de l’industrie. Elle ouvre la voie à
des développements nouveaux et à la multiplication de partenariats,
visant à renforcer le rayonnement scientifique et industriel de la
France en Europe et dans le monde.
SD
Contacts :
Métrologie électrique :
François PIQUEMAL
Nanométrologie :
Franck LARSONNIER