Octobre 2004 - n°92
OrphanXchange et ERDITI : Deux actions pionnières pour les maladies rares
Plus de 3 millions de personnes en France et plus de 20 millions
en Europe souffrent d’une maladie rare. Ces pathologies qui, individuellement,
ne touchent pas plus d’une personne sur 2000, se comptent néanmoins
par milliers. A l’heure actuelle, 6000 à 7000 ont déjà
été dénombrées et, chaque semaine, 5 nouvelles
maladies sont décrites dans la littérature médicale mondiale.
Non pas des pathologies d’apparition nouvelle, mais des maladies que
personne n’avait identifiées jusqu’à présent,
qu’elles soient d’origine génétique, auto-immunes,
infectieuses ou cancers… Pour favoriser la recherche thérapeutique
et développer de nouveaux médicaments et outils diagnostiques,
les associations de malades de l’Alliance Maladies Rares, la recherche
académique (l’Inserm et le GIS-Institut des maladies rares),
Orphanet et les Entreprises du Médicament, ont annoncé en juin
dernier la création de deux programmes majeurs en matière de
recherche et traitement des maladies rares : ERDITI et OrphanXchange.
De portée européenne, ces deux initiatives sont totalement originales
dans le paysage international actuel...
OrphanXchange : une base de données de
dimension européenne
OrphanXchange propose leur site internet : www.orphanxchange.org. l'accès
à une base de données qui met en relation projets de recherche
académiques et développeurs privés afin de faciliter
le développement de solutions, diagnostiques et thérapeutiques,
pour les patients atteints de maladies rares.
Cette base de données de dimension européenne, construite à
la demande des associations de malades de l’Alliance Maladies Rares,
recense les médicaments déjà existants dans d’autres
pathologies qui représentent un intérêt pour une maladie
rare et qui pourraient faire l’objet d’un nouveau développement
industriel.
Ces projets de développement peuvent être issus de la recherche
académique ou bien concerner des molécules déjà
commercialisées pour d’autres indications, susceptibles d’être
utilisées pour le traitement d’une maladie rare. Un travail d’analyses
préalable a été réalisé auprès des
associations et des médecins pour définir des premières
pistes grâce à l’identification des médicaments
prescrits par les cliniciens hors autorisation de mise sur le marché
(AMM), pour aider les malades. Aujourd’hui, la base OrphanXchange contient
ainsi des projets de possibles indications orphelines concernant déjà
plus de 35 maladies rares.
Le site OrphanXchange est gratuit et ouvert à tous. L’accès
au descriptif détaillé suit une procédure sélective
rigoureuse. Ce site est relié à la base de donnée européenne
sur les maladies rares, Orphanet (www.orpha.net).
Précisons qu’OrphanXchange, programme développé
au sein du service commun SC11 – Plate-forme Maladies Rares de l’Inserm,
est soutenu par la Commission Européenne et les Entreprises du Médicament…
ERDITI : un partenariat public/privé
européen
Promouvoir la recherche thérapeutique sur les maladies rares et développer
de nouveaux médicaments : tel est l’enjeu du programme européen
ERDITI (European Rare Diseases Therapeutic Initiative). Un programme coordonné
par le GIS – Institut des Maladies Rares, soutenu par le Leem Recherche,
et placé sous le patronage de l’European Science Foundation.
Pour des raisons économiques évidentes, la conception de nouveaux
médicaments est difficile dans le cadre des maladies rares. Mais l’utilisation
de composés pharmacologiques déjà développés
par les Entreprises du médicament pour des pathologies plus fréquentes
mettant en jeu des mécanismes biologiques similaires, représente
une alternative intéressante. Des milliers de molécules reposent
dans des collections industrielles. Il s’agit de composés formulés
antérieurement, commercialisés ou non, puis abandonnés
pour diverses raisons. Il peut s’agir également de candidats
médicaments en cours de développement…
Ces molécules aux modes d’action connus constituent une richesse
insoupçonnée qui mérite d’être exploitée.
Elles pourraient trouver de nouvelles indications dans le champ des maladies
rares et donner naissanceà de nouveaux médicaments orphelins.
Le programme ERDITI offre aux chercheurs européens engagés dans
la recherche sur les maladies rares l’accès aux molécules
de l’Industrie du médicament, afin d’étudier leur
potentiel thérapeutique dans les pathologies orphelines.
Précisons que ces composés feront l’objet d’une
évaluation pré-clinique, c’est-à-dire in vitro
et chez l’animal, puis d’une évaluation clinique chez l’Homme,
si les résultats se révèlent prometteurs…
Plus qu’un accès facilité aux molécules, le programme
ERDITI garantit donc la continuité, depuis la recherche jusqu’au
développement et la commercialisation du médicament. Si des
études pré-cliniques révèlent le potentiel thérapeutique
d’une molécule pour une maladie rare, l’entreprise partenaire
du programme, qui détient les droits sur cette molécule, s’engage
soit à mettre au point elle-même le médicament pour cette
nouvelle indication, soit à permettre son développement par
une autre structure…
ERDITI est fondé sur une charte de collaboration entre équipes
académiques et industrielles. Les partenaires, en adhérantà
la charte, s’engagent à suivre la procédure de collaboration,
à commencer par la signature d’un contrat définissant
les conditions de transfert et d’utilisation des molécules, les
droits de propriété intellectuelle des résultats et les
droits de propriété industrielle.
A ce jour, quatre grandes entreprises du médicament sont déjà
partenaires du programme ERDITI : Aventis, Glaxosmithkline, Roche et Servier.
Une dizaine d’institutions européennes de recherche académique
soutiennent également ce programme :
- le CNRS et l’INSERM, pour la France,
- l’Agence fédérale pour la recherche médicale,
pour l’Allemagne,
- l’Université médicale de Vienne, pour l’Autriche,
- le Fonds national de la Recherche Scientifique, pour la Belgique,
- l’Académie des Sciences et des Arts, pour la Croatie,
- le Conseil pour la Recherche médicale, pour le Danemark, - l’Institut
de recherche sur les maladies rares (IIER), pour l’Espagne,
- l’Organisation pour la Recherche et le Développement en Santé
et le Comité d’Organisation pour les médicaments Orphelins,
pour les Pays-Bas,
- l’Académie des Sciences, pour la Slovaquie…
En pratique…
Toutes les entreprises sont invitées à participer au programme
ERDITI dans la mesure où elles mènent une activité de
Recherche et Développement, et possèdent des molécules
d’intérêt.
Les équipes de recherche académiques qui souhaitent évaluer
des molécules pour tester leur potentiel thérapeutique dans
une maladie rare doivent, quant à elles, déposer une demande
au GIS – Institut des Maladies Rares. Cette demande constitue un véritable
projet reposant sur l’identification d’un mécanisme physiopathologique
dans une maladie rare ou un groupe de maladies rares bien défini. Un
conseil scientifique, composé d’experts issus de la recherche
académique et des entreprises du médicament, évaluera
le bien fondé du projet et conseillera sur le choix des molécules
dont l’accès sera demandé aux industriels. Cet accès
concernera des molécules interférant spécifiquement avec
le mécanisme biologique…
ERDITI et OrphanXchange : ces 2 programmes originaux renforcent le dispositif
mis en place entre les associations de malades, les entreprises du médicament,
la recherche académique et les professionnels de santé, dans
le cadre du groupe de travail Maladies Rares du Leem.
La lutte contre les maladies rares est désormais possible. De plus
en plus de ces pathologies, y compris d’origine génétique,
peuvent maintenant bénéficier d’un traitement, qu’il
s’agisse de thérapie cellulaire, thérapie génique,
d’enzymes de remplacement ou de thérapie par molécules
classiques. Les progrès importants de la recherche en biotechnologie
permettent d’espérer des traitements de plus en plus ciblés
et efficaces. Des thérapies se développent en Europe depuis
3 ans grâce à l’adoption en 1999 du règlement européen
sur les médicaments orphelins. Plus de 300 dossiers ont été
déposés à l’Agence européenne et 14 médicaments
ont reçu une AMM.
L'Alliance Maladies Rares, acteur à part entière dans la réflexion
à l'origine de ces deux initiatives porteuses d'espoirs, attend beaucoup
de la mobilisation des chercheurs publics et privés. La mobilisation
de tous est impérative !