Novembre 2007 - n°126
Lancement de la construction de l’Ecotron de Montpellier
La première pierre de l’Ecotron européen de
Montpellier a été posée le 2 octobre 2007. Ce grand équipement
scientifique permettra d’étudier in vitro les réponses
des écosystèmes, des organismes et de la biodiversité
aux modifications de l’environnement, comme celui du changement climatique.
Prévoir les changements climatiques et leurs conséquences
? Etudier des portions d’écosystèmes dans des enceintes
et les soumettre à des variations de climat et de stress très
variées ? Utopique ?
Non, réalisable dès 2008 grâce à l’Ecotron
de Montpellier !
L’intérêt de cette plate-forme de recherche de rang international
va résider dans sa capacité à mesurer les variations
de fonctionnement induites par des changements d’environnement. Avec
ses 3 plateaux expérimentaux, des consortiums internationaux d’équipes
de recherche pourront ainsi mesurer les cycles du carbone, de l’eau,
des minéraux, les émissions de gaz à effet de serre ou
encore les changements et le rôle de la biodiversité.
Un chantier d’envergure
La première pierre de l’Ecotron européen de Montpellier
a été posée le 2 octobre 2007 en présence notamment
de Cyril Schott, préfet, de Georges Frêche, président
du Conseil Régional du Languedoc-Roussillon, de Louis Calmels, vice-président
du Conseil général de l’Hérault, de Michel Fraysse,
maire de Montpellier et de Catherine Bréchignac, présidente
du CNRS. Sa construction est financée conjointement par le CNRS (1,8
millions d’euros), le Conseil régional (1,8 millions d’euros)
et le Conseil général (0,7 millions d’euros). Son instrumentation
est financée par le CNRS (1,3 millions d’euros) et le Conseil
régional (1,3 millions d’euros).
Trois idées directrices ont amené à la conception de
l’Ecotron :
- Pouvoir simuler une large gamme de conditions environnementales tout en
restant proche des conditions in natura,
- Offrir les techniques de mesure du fonctionnement des écosystèmes
les plus complètes et les plus performantes possibles,
- Donner accès à plusieurs plateaux environnementaux, chacun
à une échelle différente, pour aborder des thématiques
complémentaires et servir une large communauté scientifique.
L’Ecotron s’implante sur le campus de Baillarguet, à 6
km au nord de Montpellier où sont déjà regroupés
plusieurs centres de recherche français (le Centre International de
Recherche en Agronomie et Développement et l’Institut National
de la Recherche Agronomique) et internationaux (Commonwealth, Scientific and
Industrial Research Organisation, United States Department of Agriculture).
Par ailleurs, de nombreux laboratoires montpelliérains sont engagés
dans la recherche environnementale, en particulier le Centre d’Ecologie
Fonctionnelle et Evolutive qui est le porteur du projet Ecotron. Ce laboratoire
CNRS développe des recherches sur le fonctionnement des écosystèmes,
en relation avec les changements globaux et la biodiversité, et a acquis
une expérience dans le contrôle environnemental des écosystèmes
et la mesure de leur fonctionnement.
Etudier les changements climatiques et leurs
conséquences
Les êtres vivants et leurs milieux interagissent continuellement. Avec
les changements climatiques en cours et à venir, il devient nécessaire
de prévoir les variations de la biodiversité, des organismes
vivants. Gaz impliqués dans la régulation du climat, les cycles
des plantes et de l’eau, animaux et humains font partie des paramètres
à étudier afin d’anticiper ces changements.
L’Ecotron se doit de faire des études sur les écosystèmes
comme sur les organismes. Le plateau à grande échelle analysera
de façon pertinente la physiologie d’écosystèmes
terrestres herbacés ou ligneux bas et la biologie des populations animales
et microbiennes associées. Le plateau à plus petite échelle
analysera la physiologie d’organismes ou de microécosystèmes
terrestres ou aquatiques. Outre l’écologie fonctionnelle, l’écologie
évolutive et la microbiologie, l’Ecotron pourrait être
ponctuellement utilisé en paléontologie, en astrobiologie, en
toxicologie…
Les 3 plateaux expérimentaux de l’Ecotron vont permettre la conduite
de recherches innovantes sur différents types d’écosystèmes
et d’organismes. Ils ont été conçus pour recevoir
des blocs-échantillons d’écosystèmes prélevés
in situ. Ceux-ci seront insérés dans des enceintes permettant
de contrôler les populations d’organismes, de manipuler facilement
et rigoureusement les paramètres du milieu et de mesurer avec précision
les flux. Pour chacun des 3 plateaux, un minimum de 12 enceintes, conditionnées
indépendamment les unes des autres, est prévu afin de permettre
différentes combinaisons de traitements, croisés ou non, avec
des répétitions.
Le plateau « Macrocosmes » est une succession
linéaire de 12 enceintes de conditionnement de 35 m2 dans lesquelles
on pourra insérer des échantillons d’écosystèmes
intacts (5 m2 de surface en végétation, jusqu’à
1,5 m de profondeur, 8 à 10 tonnes de sol). Les macrocosmes sont dédiés
à des études à court terme ou bien des études
à moyen terme (3 à 5 ans).
Le plateau « Mésocosmes » peut accueillir
jusqu’à 24 enceintes également sous lumière naturelle.
Les unités de base (1 m2 de surface de végétation) pourront
être associées par 2 ou par 4. Ce plateau peut aussi recevoir
et analyser les nombreux lysimètres cylindriques standards actuellement
en service en Europe (1 m2 de surface, 2 m de profondeur). Pour des études
à court terme (3 mois à 2 ans).
Le plateau « Microcosmes » sera constitué
de plans de travail équipés pour le conditionnement environnemental
de microécosystèmes (1 à 200 dm3) et pour la mesure de
processus de base (photosynthèse, respiration, transpiration…).
Cette zone de sécurité P2 sera divisée en 2 parties,
l’une réservée aux expérimentations nécessitant
un marquage radioactif, l’autre réservée aux expérimentations
utilisant l’analyse des isotopes naturels. Des écosystèmes
et organismes très variés pourront être étudiés.
Organisation et comité scientifique
Le personnel engagé sur le projet Ecotron se compose en 2007 de 3 personnes
: Jacques Roy, Directeur de Recherche, Olivier Ravel, Ingénieur de
recherche et Christophe Escape, Assistant ingénieur. Dans l’avenir,
la constitution d’une équipe plus importante est nécessaire
pour assurer le fonctionnement des 3 plateaux techniques, d’autant plus
que les expérimentations conduites par des consortiums internationaux
seront suivies par l’équipe de l’Ecotron, tout au long
de l’année pour certaines.
Par ailleurs, un comité scientifique international, composé
de 27 scientifiques dont 17 français appartenant aux principaux instituts
de recherche impliqués dans l’environnement, sélectionnera
les meilleurs projets utilisant pleinement les capacités de l’Ecotron
en réunissant des équipes complémentaires et de haut
niveau. Le premier appel d’offre est prévu fin 2008 pour une
expérimentation internationale début 2010. Une première
expérimentation test sera réalisée dès l’automne
2008. En collaboration avec l’INRA de Clermont-Ferrand, elle analysera
la vulnérabilité des prairies de moyenne altitude aux vagues
de chaleur en interaction avec l’augmentation du CO2 atmosphérique.
Une réflexion est en cours sur les modalités de financement
des expérimentations de l’Ecotron et des autres plates-formes
en écologie. La création éventuelle d’un Groupement
d’Intérêt Scientifique (GIS) assurerait la coordination
nationale de ces plates-formes. La recherche de financements extérieurs
(consortiums étrangers, programmes européens…) n’est
pas exclue.
Un autre projet d’équipement écotronique est en cours
à Foljuif en région parisienne. Avec l’Ecotron de Montpellier,
il fera partie d’un projet commun de plate-forme expérimentale
en écologie. Alors que l’équipement de Montpellier sera
dédié à l’analyse des écosystèmes
terrestres, le plateau expérimental de Foljuif consacrera une grande
partie de ses études aux milieux aquatiques. Ces deux structures, combinées
à la plate-forme côtière Medimeer de Sète, formeront
à terme un réseau destiné à positionner la France
sur le devant de la scène dans le domaine des recherches en environnement…
M. HASLÉ