Septembre 2008 - n°135
Inauguration du Centre Européen de RMN de Lyon
Le 7 juillet 2008 a été inauguré le Centre
européen de Résonance Magnétique Nucléaire de
Lyon (CRMN Lyon) en présence de nombreuses personnalités scientifiques
et des collectivités. Déjà opérationnel, il développe
des méthodologies de pointe en RMN, applicables tant dans le domaine
de la médecine et de la biologie que des matériaux. Il accueillera
cet automne le plus puissant spectromètre commercialisé au monde.
Un grand équipement scientifique lyonnais unique sur le plan
international ! Le CRMN est un nouveau laboratoire de recherche commun au
CNRS, à l’École Normale Supérieure de Lyon et à
l’Université Claude Bernard Lyon 1. Son but est de développer
des méthodes innovantes de spectroscopie par RMN, une technique permettant
d’étudier la structure de la matière organique ou inorganique
en utilisant les propriétés magnétiques des atomes. Le
budget pour la construction et l’équipement du CRMN est de 18
millions d’euros dont 9 millions d’euros financés par l’Etat
(Ministère délégué à la Recherche / CNRS)
et 9 millions d’euros financés par la Région Rhône-Alpes.
La pose de la première pierre de l’édifice a eu lieu le
30 mars 2007.
Déjà équipé de plusieurs spectromètres
de pointe, le CRMN accueille cet automne le plus puissant équipement
commercialisé au monde (1GHz), qui permettra à la communauté
scientifique d’obtenir une finesse d’analyse unique. Le CRMN de
Lyon devient ainsi le premier centre européen de développement
des nouveaux spectromètres à très hauts champs.
Une constante évolution des techniques
de RMN
Depuis 30 ans, les améliorations successives des techniques de RMN
ont conduit régulièrement à de nombreuses découvertes.
Tout au long de l'histoire de la RMN, l'introduction de champs magnétiques
de plus en plus intenses a toujours permis de révéler de nouveaux
domaines d'application, parfois inattendus.
Cela a concerné par exemple : la caractérisation des petites
molécules en solution (à partir de 1970), qui a, par la suite,
révolutionné la chimie de synthèse ; la détermination
de la structure et de la dynamique des protéines en solution (à
partir de 1990), qui a révolutionné la biologie structurale
; le développement de l'imagerie par résonance magnétique
(à partir de 1980), qui a fait considérablement progresser le
domaine des diagnostics médicaux et modifie aujourd’hui l'approche
des sciences cognitives.
Aucun de ces développements n'était attendu à l'époque.
Il est donc raisonnable de supposer que des champs magnétiques encore
plus intenses continueront à engendrer de nouvelles innovations.
Ce nouveau bond technologique est donc très attendu par des équipes
de recherche travaillant sur une multitude de problèmes fondamentaux.
Les collaborations déjà amorcées avec le CRMN tant au
niveau local qu’international permettent d’espérer des
percées rapides et importantes, notamment dans les domaines suivants
:
- recherche en diagnostic précoce et nouveaux traitements, notamment
contre le cancer avec le Cancéropôle Lyon Auvergne Rhône-Alpes
(CLARA)
- études de l’architecture et de la dynamique des protéines
avec l’Institut de biologie et de chimie des protéines (IBCP,
CNRS/UCBL)
- études des matériaux, dont les nanomatériaux et les
produits pharmaceutiques
- analyses toxicologiques et domaine de l’environnement, notamment avec
le pôle de compétitivité Axelera (chimie et environnement).
Un centre d’envergure !
Le CRMN de Lyon est constitué d'équipes de recherche à
la pointe de la RMN en phase solide et en phase liquide et d'une plate-forme
d'accueil ouverte à la communauté nationale et internationale
des utilisateurs de RMN.
Au vu du très grand éventail de nouveaux domaines d’application
potentiels de la RMN à très haut champ, le centre RMN de Lyon
accueille une plate-forme articulée autour de spectromètres
configurés de façon à couvrir la plus large gamme de
problèmes et d’échantillons possibles. Parmi eux, le spectromètre
le plus puissant de France (900MHz) a été livré par la
société Bruker en janvier 2008.
Trois axes de recherches prioritaires sont dès à présent
identifiés :
- la cancérologie au niveau des diagnostics précoces
sur biopsies. Pour cet axe de recherche, l’apport des très hauts
champs est essentiel. Les biopsies ou les prélèvements biologiques
en général (sang, urine) sont faits de milliers de composants,
dont certains présents en très faibles concentrations. Il est
envisageable, dans un futur proche, que des spectres RMN de ces prélèvements
puissent fournir un nouvel outil de diagnostic pour des maladies telles que
le cancer, les déficiences rénales ou hépatiques, ou
certaines maladies génétiques. Actuellement, le diagnostic par
RMN en champ classique est limité parce que les métabolites
les plus intéressants présentent souvent des signaux trop petits
pour être observés (manque de sensibilité), ou parce qu’il
y a tout simplement trop de signaux dans le spectre pour les identifier (défaut
de résolution). Les très hauts champs, et c'est là leur
importance, permettront à la fois une meilleure résolution et
une meilleure sensibilité des spectres. Ceci permettra une analyse
spectrale plus fine ce qui constitue une étape importante vers de nouveaux
outils de diagnostic. L'interaction forte avec le Cancéropôle
Lyon Auvergne Rhône-Alpes (CLARA) est un élément clé
de la réussite de ce projet.
- la chimie analytique, en forte interaction avec l’Institut
des Sciences Analytiques actuellement en création à Lyon : l’apport
des hauts champs va permettre de repousser les limites de détection
pour des échantillons de très faible concentration (par exemple
des prélèvements biologiques ou environnementaux). Cela permettra
d’accéder à l’analyse et à la compréhension
de systèmes naturels de plus en plus complexes. Ces progrès
nécessiteront des avancées techniques importantes, ainsi que
le développement de nouveaux protocoles d’analyse.
- Les développements méthodologiques et instrumentaux,
incluant la chimie moléculaire et, notamment, l’approche structurale
des matériaux bio-organiques solides et liquides : les très
hauts champs vont ici permettre l’étude structurale des protéines
insolubles ou membranaires, jusqu'à maintenant pratiquement impossible
par manque de sensibilité et de résolution des spectromètres
existants. Les enjeux sont très importants : ils impliquent l’étude,
dans le futur, d’objets moléculaires centraux à la compréhension
de la biologie fonctionnelle.
Toutes les autres installations européennes sont dédiées
spécifiquement à des domaines d’application ciblés.
La polyvalence de la plate-forme proposée à Lyon garantit l’adaptabilité
à de nouveaux domaines non connus aujourd'hui. L'ensemble des instruments
à hauts champs présents sur le site est partagé entre
les équipes de recherche «intra-muros», et la plate-forme
d'accueil. Cette dernière a pour but de mettre à la disposition
de la communauté scientifique nationale et internationale des spectromètres
RMN de pointe ainsi qu'un savoir faire technique et méthodologique.
Cette plate-forme d'accueil est donc ouverte à l'ensemble des domaines
d'application de la RMN, comprenant entre autres le médical, la physique,
la chimie, la biologie et les matériaux. Les membres de la communauté
scientifique européenne des chimistes, des physiciens, et des biologistes
constituent les utilisateurs potentiels de ce centre.
Le premier élément du CLEA
Sur un terrain de 1,5 ha cédé par le Grand Lyon, le CRMN est
le premier des trois bâtiments de la Cité lyonnaise de l’environnement
et de l’analyse (CLEA). Aux côtés du CRMN, les autres bâtiments
de CLEA seront ceux de :
- l’Institut des sciences analytiques (ISA) dont le chantier débutera
cette fin d’année. Il rassemblera dans un même bâtiment
le Service central d’analyse du CNRS, actuellement à Solaize,
le Laboratoire des sciences analytiques, unité mixte de recherche du
CNRS et de l’Université Claude Bernard Lyon 1, le Laboratoire
d’analyse des eaux du Cemagref de Lyon, le Centre lyonnais de microscopie
(Clym) et une plate-forme de valorisation et de diffusion technologique.
- les nouveaux locaux du Cemagref Lyon, organisme de recherche sur l’ingénierie
agricole et l’environnement, actuellement quai Chauveau (Lyon 5°).
Ces trois bâtiments formeront à terme un pôle de recherche
de taille européenne, regroupant plus de 400 personnes. Un projet soutenu
fortement par le Grand Lyon, la Région Rhône-Alpes et le Ministère
chargé de la Recherche. La situation géographique du site de
Villeurbanne, au voisinage des autres laboratoires de la Doua, du CNRS, de
CPE, de l’INSA et de l’UCBL, va favoriser une synergie importante
entre les projets de recherche.
M. HASLÉ