Septembre 2008 - n°135
L’INRA inaugure à Tours une animalerie protégée pour l’étude des maladies à prions et des maladies émergentes chez les gros animaux
Le 8 juillet dernier, Michel BARNIER, ministre de l’Agriculture
et de la Pêche, Valérie PECRESSE, ministre de l’Enseignement
supérieur et de la Recherche, et Marion GUILLOU, présidente
de l’INRA, ont inauguré une animalerie unique en France : l'INPREST,
Installation Nationale Protégée pour la Recherche sur les Encéphalopathies
Spongiformes Transmissibles. Implantée sur le site INRA de Tours, cette
animalerie est dédiée à l’étude des maladies
à prions et des maladies émergentes.
La cérémonie d'inauguration s'est tenue en présence
de nombreuses personnalités et représentants des collectivités
locales, dont François BONNEAU, président du Conseil régional
du Centre, et Dominique LACHAUD, Conseiller général d’Indre-et-Loire.
Une animalerie unique en France - Des fonctionnalités
multiples
L’INPREST occupe un bâtiment de 4000m2 aux normes de confinement
de niveau 3. Elle vise à mettre en œuvre des recherches sur les
infections sur tous types d'animaux, petits et gros, en conditions de production
avec un suivi sur le long terme.
Conçues pour entretenir dans des conditions de sécurité
élevées 24 vaches en lactation et 128 ovins (moutons, chèvres
ou porcs), les dix cellules confinées d’hébergement pourront
aussi être aménagées pour des oiseaux (poulets, canards...).
Chercheurs et animaliers disposent également de 10 salles d’autopsie
et de chirurgie, d’un laboratoire et d’un enregistrement vidéo
de l’activité des animaux depuis l’extérieur.
Le bâtiment est polyvalent et permettra, au-delà des travaux
sur les encéphalopathies, de mener des recherches sur les infections
des animaux d’élevage, dont des maladies émergentes, telles
que la grippe aviaire et la fièvre catarrhale ovine. Il offrira notamment
l'opportunité d'étudier la physiopathologie des processus infectieux
et la réponse immune aux infections, de mettre en place des essais
vaccinaux et thérapeutiques, et d'évaluer des méthodes
de diagnostic. La communauté scientifique disposera ainsi d’un
dispositif complet permettant d’expérimenter du niveau de confinement
A2 au niveau A3.
Une technicité au service de la sécurité
Le confinement de chaque cellule d’élevage est assuré
par un système de contrôle qui permet de faire varier la pression
de +20 à -120 Pascals pour assurer une pression décroissante
entre des cellules contiguës. Le confinement, le renouvellement d’air,
le chauffage et le rafraîchissement sont assurés par 18 centrales
de traitement d’air.
Un système prototype et sécurisé de transfert des aliments
entre l’étage de stockage des aliments et chaque cellule permet
de distribuer l’aliment dans la cellule d’élevage depuis
le plafond sans qu’il y ait de possibilité de transfert de pathogènes
vers l’étage technique. L'alimentation des animaux est ensuite
assurée manuellement par les personnels animaliers.
Toutes les traversées des structures en béton (réseaux,
transfert de déchets, de matériels, circulation du personnel)
sont réalisées au moyen de systèmes étanches et
coupe-feu : passe-fils, passe-déchets, passe-échantillons, portes
étanches...
Une gestion sécurisée des déchets
La décontamination par stérilisation des déchets à
haut risque (classe 3) est assurée par deux autoclaves de 2,5 m3 et
un autoclave de 0,5 m3. Après traitement, les déchets sont éliminés
selon leur nature via une filière DASRI (Déchets d'activité
de soins à risques infectieux) ou une filière d’équarrissage
afin d’être incinérés.
Le traitement des effluents s’effectue par stérilisation à
la vapeur à 134°C à l’aide de deux stérilisateurs
de 1 800 litres. Les effluents les plus contaminés issus par exemple
d’autopsie, sont en outre traités chimiquement avant leur traitement
thermique. Ils sont contrôlés par le personnel de maintenance
avant épandage sur sols avec une traçabilité totale des
paramètres du traitement. L’utilisation d’isolateurs haute
sécurité est également envisageable dans les cellules
d’hébergement. Ceux-ci fonctionnent en dépression constante
avec une surveillance par alarme.
Dans ces isolateurs, l’'air est filtré en sortie par un double
filtre capable de retenir des particules aériennes d'un diamètre
de 0,3 micromètre avec un taux d'efficacité de 99,97%. Le transfert
des animaux et du matériel biologique est assuré par un système
de double porte de transfert étanche. Les manipulations se font sans
rupture de confinement au moyen de manchettes et gants interchangeables.
Au coeur d'un large dispositif de recherche
en infectiologie
Avec l'inauguration de ces nouveaux dispositifs expérimentaux, l'INPREST
double la surface actuelle des installations confinées A3 de la plate-forme
d’infectiologie de Tours. A noter que le pôle Santé Animale
de Tours (PSAT) – composé de la plate-forme d'infectiologie expérimentale
(PFIE) et de l'unité de recherche Infectiologie Animale et Santé
Publique (IASP) – constitue le plus grand collectif pluridisciplinaire
français consacré à la recherche en infectiologie animale.
Ses laboratoires de recherche regroupent une soixantaine de chercheurs et
d'ingénieurs dans les principales disciplines que recouvre l’infectiologie,
à savoir la bactériologie, la virologie, la parasitologie et
l’immunologie.
Au sein de ce dispositif, l'INPREST vient plus particulièrement compléter
la plate-forme d'infectiologie expérimentale (PFIE), dont la mission
vise à fournir aux structures de recherche les installations et les
effectifs pour mener leurs programmes de recherche, en toute sécurité,
dans le respect des règles d’éthique et de bien-être
animal.
Certifiée ISO 9001-2000, cette plate-forme s'impose comme le plus grand
dispositif français d’expérimentation animale en infectiologie,
en milieu confiné (A2-A3, isolateur) sur animaux de production et animaux
modèles. Ses effectifs réunissent 53 personnes, dont 34 au sein
des équipes d’animaliers, 4 affectées à l'ingénierie
de l’expérimentation et 9 à la maintenance pour l’ensemble
du pôle de santé animale.
La PFIE compte ainsi 22 bâtiments, 118 cellules, 40 isolateurs dont
certains modèles à haut niveau de confinement, 18 200 m2 de
bâtiments dédiés aux animaux, dont 8000 m2 en A3 avec
l’INPREST.
Une envergure d'ores et déjà européenne
L'INPREST sera mise à la disposition de l’ensemble des équipes
de recherche et d’enseignement supérieur nationales, partenaires
de l’INRA (AFSSA, CEA, CNRS, Inserm, Institut Pasteur, Ecoles vétérinaires…)
et laboratoires européens tels que VLA, IAH, MRI (Royaume Uni) ; INIA,
CRESA (Espagne) , FLI Riems (Allemagne), Nat Vet Inst (Danemark), Wageningen
University (Pays-Bas)…
La PFIE est d'ailleurs d'ores et déjà insérée
dans le dispositif national RIO/IBiSA (Infrastructures en Biologie Santé
et Agronomie) et membre du réseau européen des plates-formes
d’infectiologie travaillant sur les maladies infectieuses animales (NADIR,
coordonné par l’INRA).
Le dispositif est ouvert aux partenaires privés (CEVA, Merial, Grimaud,
Novartis, Biové, Sebifa...), en coordination avec différentes
initiatives développées en France et en Europe : Lyon Biopole,
Réseau Français de la santé animale, Plate-forme technologique
européenne Global Animal Health …
L’inauguration de l'INPREST concrétise un investissement de 11,2
millions d’euros, financés à hauteur de 4,6 millions d’euros
par l’Etat (Groupement d’Intérêt Scientifique “Infections
à prions”), de 2,3 millions par le Conseil régional du
Centre, de 2,3 millions par le Conseil général d’Indre-et-Loire
et de 2 millions d’euros par l’INRA. Le coût des équipements
- manutention, autoclaves, matériels d’élevage, équipements
vétérinaires, matériels de laboratoire, congélateurs...
- s'élève à 1 M€.
S. DENIS