2022-09-09
ILC3s : des cellules gardiennes de l’immunité intestinale
La muqueuse intestinale est un haut lieu d’interaction et d’échange avec l’environnement extérieur. De ce fait, elle est sous la vigilance constante du système immunitaire. Des chercheurs de l’Institut Pasteur et de l’Inserm ont découvert, grâce à un modèle animal, comment certaines cellules de l’immunité innée, les cellules lymphoïdes innées de type 3, participaient à la surveillance et au maintien de cette barrière.
Notre tube digestif contient des milliards de bactéries, qui aident aux processus tels que la digestion et l’absorption des nutriments. La stabilité de cette population bactérienne est essentielle à ces processus, il faut donc à la fois empêcher les cellules immunitaires de les attaquer, tout en gardant une défense, au niveau de la barrière intestinale, face à d’éventuels pathogènes. Pour cela, le système immunitaire mène une surveillance stricte.
Dans ce contexte, une absence ou un excès d’activation du système immunitaire peut entraîner de lourdes pathologies infectieuses ou inflammatoires chez l’hôte. Si le rôle du système immunitaire adaptatif dans l’immunosurveillance est clairement établi, celui de l’immunité innée intestinale demeure peu compris.
Le rôle des ILC3s dans l’homéostasie intestinale
Des chercheurs de l’équipe de James Di Santo (unité Immunité innée à l’Institut Pasteur – partie de l’unité Inserm 1223) se sont penchés sur la question. Depuis 2008, ils ont identifié les cellules lymphoïdes innées de type 3 (ILC3s) comme des actrices essentielles de l’immunité intestinale en phase précoce de l’infection et lors d’épisode de réinfection. Ils ont ensuite cherché à mieux comprendre le comportement de ces cellules, leurs régulations spatio-temporelles ainsi que leur migration dans le tissu. En collaboration avec l’équipe de Philippe Bousso (unité Dynamiques des réponses immunes à l’Institut Pasteur – partie de l’unité Inserm 1223), « nous avons établi une nouvelle approche expérimentale utilisant l’imagerie intravitale en temps réel afin d’étudier le comportement des ILC3s intestinales dans des conditions basales ou inflammatoires chez la souris » explique Nicolas Serafini, chercheur Inserm dans le laboratoire Immunité innée à l’Institut Pasteur. Les chercheurs ont ainsi pu montrer que les ILC3s, contrairement aux autres cellules de l’immunité, sont immobiles à l’état basal mais que, en cas d’inflammation, elles se mettent à migrer dans les villosités intestinales et scanner le tissu tout en augmentant leur production de cytokines pro-inflammatoires. « Nous avons également montré que ce comportement pouvait être modulé par des signaux environnementaux endogènes et exogènes tels que la présence de lymphocytes T ou de composants bactériens. Un blocage des ILC3s « patrouilleurs » induit une altération de la barrière intestinale, via une augmentation de la mort cellulaire des cellules épithéliales intestinales. Nos résultats suggèrent alors que la migration des ILC3s dans le tissu induirait une meilleure diffusion de cytokines, permettant ainsi le maintien de l’intégrité de la barrière intestinale. »
Ces résultats mettent en évidence des différences biologiques majeures entre les ILC3s et les autres lymphocytes. « Alors que la plupart des cellules immunitaires agissent comme des cellules sentinelles qui explorent le tissu à l’état basal et réduisent la motilité après activation, les ILC3s se comportent telles des gardiennes, promouvant l'immunosurveillance et s’adaptant aux perturbations environnementales », conclut Nicolas Serafini. Cette découverte ouvre la voie pour une meilleure compréhension de la régulation biologique des ILC3, qui permettrait de développer de futures approches thérapeutiques contre les maladies intestinales.
Pour en savoir plus : ILC3s : des cellules gardiennes de l’immunité intestinale | Institut Pasteur