2022-09-14
La HAS publie ses recommandations sur la gestion du capital sanguin des patients en péri-opératoire et en obstétrique
La HAS publie ses recommandations sur la gestion du capital sanguin des patients en péri-opératoire et en obstétrique
A la suite d’une saisine réalisée par 7 sociétés savantes et associations de patients et d’un travail de plus de 18 mois d’une cinquantaine d’experts, la Haute Autorité de Santé publie des recommandations dont l’impact de sa mise en oeuvre sur le terrain pourra être majeur pour pallier la pénurie de sang et les risques transfusionnels.
En 2021, la Haute Autorité de Santé (HAS) avait décidé d’inscrire à son programme de travail l'élaboration de recommandations sur la mise en place de la gestion personnalisée du capital sanguin dans les établissements de santé. Ces recommandations pour la pratique clinique viennent d’être publiées pour la prise en charge des patients en pré, per et post opératoire ainsi qu’en obstétrique. Ce travail fait suite aux saisines déposées conjointement par la Société Française d’Anesthésie et de Réanimation (SFAR), la Société Française de Chirurgie Orthopédique et Traumatologique (SOFCOT), le Groupe francophone de Réhabilitation Améliorée après Chirurgie (GRACE), le Collectif National des Associations d’Obèses (CNAO), l'Association afa Crohn RCH France (AFA), l’Association Patients en réseau et CERHOM (Cancers masculins), qui oeuvrent depuis plusieurs années à l'intégration du « Patient Blood Management » (PBM) dans les pratiques médicales.
En effet, l’anémie périopératoire et/ou la transfusion de culots de globules rouges sont deux facteurs indépendants d’augmentation de la morbi-mortalité.
Ces recommandations sont destinées à l’ensemble des professionnels de santé des établissements ainsi qu’aux responsables administratifs et à tout patient bénéficiant d'une chirurgie présentant un risque hémorragique.
LE « PBM » : UNE RÉPONSE A LA PENURIE DE SANG ET AUX RISQUES TRANSFUSIONNELS
La Gestion du Capital Sanguin est plus connue sous l’appellation Patient Blood Management (PBM). Cette pratique de prise en charge des patients devant subir une chirurgie programmée potentiellement hémorragique, a notamment comme objectifs :
- D’éviter le recours à la transfusion de culots globulaires en dépistant et en traitant l’anémie et/ou la carence martiale en pré opératoire d’une chirurgie à risque hémorragique ;
- De ne transfuser qu’en cas d’abolue nécessité : en cas de mauvaise tolérance du patient et généralement en respectant un seuil transfusionnel dit « restrictif » et en pratiquant une transfusion unitaire (un seul culot à la fois avant réévaluation clinique et biologique)
- De maîtriser les besoins en sang, celui-ci étant ainsi réservé prioritairement aux situations où la transfusion sanguine est inévitable (mauvaise tolérance du patient d’anémie profonde, pertes sanguines très importantes, chirurgies non programmées, traumatologie, etc.) ; Elle contribue à une utilisation « raisonnée » des produits sanguins dont on sait la rareté ;
UNE AMÉLIORATION DE LA PRISE EN CHARGE ASSORTIE D’ÉCONOMIES IMPORTANTES POUR LA COLLECTIVITÉ
L’une des conséquences attendues de cette prise en charge améliorée est la réalisation d’économies importantes pour la collectivité́ du fait notamment d’une baisse de la consommation de culots de globules rouges, d’une durée moyenne de séjour optimisée et d’un risque de ré-hospitalisation réduit.
Sur la base de l’étude Objectif Zéro Transfusion (CHU d’Angers, 2012-2018), extrapolée nationalement, pour la seule chirurgie orthopédique, l’application des protocoles de PBM permettrait d’atteindre une économie (globale incluant les postes de dépenses) estimée à 805 € par patient.
DES PROTOCOLES RECOMMANDÉS ET DÉJÀ RECONNUS AU NIVEAU MONDIAL
La démarche PBM est recommandée par l’Organisation Mondiale de la Santé (depuis 2010), la Commission Européenne (depuis 2017), les agences de régulation sanitaire de nombreux pays et les sociétés savantes internationales concernées. La Commission Européenne travaille quant à elle actuellement à un nouveau règlement européen sur le sang.
Les études menées en France ont confirmé des résultats constatés dans plusieurs pays ayant déjà mis en place des protocoles PBM. La démarche PBM est en effet déjà largement déployée dans certains pays comme l’Australie ou l’Allemagne, avec des résultats positifs. L’Italie est quant à elle, le premier pays européen à avoir intégré le PBM dans sa loi.
L’APPROPRIATION DU PBM PAR LES ACTEURS DU SOIN : L’ENJEU DE DEMAIN
Les recommandations de la HAS répondent aux attentes à la fois de sociétés savantes et des associations de patients qui se sont fortement impliquées tout au long du processus de rédaction de ces travaux. L’implémentation efficace des programmes PBM supposant une bonne coopération des différents intervenants autour du patient (anesthésistes-réanimateurs, chirurgiens, hémovigilants, infirmiers, pharmaciens hospitaliers, EFS, biologistes, ...).
L’enjeu sera désormais leur appropriation et application par les établissements et par les différents acteurs de la prise en charge. Chaque société savante et association de patients participera à leur diffusion au plus grand nombre à travers des prises de parole lors de Congrès, colloques ou articles scientifiques.
LE PBM : COMMENT ÇA MARCHE ?
Le PBM repose sur 3 piliers : l’optimisation de la masse sanguine du patient, la minimisation des pertes sanguines et l’optimisation de la tolérance du patient à l’anémie.
- Avant la chirurgie : recherche d’une éventuelle anémie et/ou carence en fer ; le cas échéant, traitement de celle-ci en amont de l’intervention. Le patient est donc opéré avec une formule sanguine optimale ;
- Pendant la chirurgie : l’équipe soignante limite autant que possible les saignements ;
Après la chirurgie : le patient quitte l’hôpital après que l’équipe s’est assurée d’un bilan sanguin satisfaisant, limitant ainsi les risques de ré hospitalisations et assurant une réadaptation après chirurgie facilitée.