2025-03-03
Vaccination HPV : une étude inédite révèle l’intérêt des interventions en santé sexuelle dans les classes de 3ème afin de faciliter le rattrapage vaccinal
La France accuse un retard significatif en matière de vaccination contre le papillomavirus humain (HPV) par rapport aux autres pays développés, malgré l'instauration en 2023 d'une campagne ciblant les élèves de 5ème directement dans les collèges. Avec un taux de vaccination au collège entre 10 et 15 %[1], bien en deçà des objectifs de 30 %, la question de la pertinence d’un rattrapage vaccinal se pose. C'est dans ce cadre qu'une collaboration inédite entre l'Hôpital Foch et les Communautés Professionnelles Territoriales de Santé (CPTS) de Suresnes et de Rueil-Malmaison, avec le soutien de la CPTS de Neuilly-sur-Seine, a vu le jour. Cette étude repose sur l'idée que des interventions en santé sexuelle ciblées, menées auprès des collégiens de 3ème, plus proches de la puberté et de la santé sexuelle que ceux de 5ème , peuvent renforcer leur sensibilisation aux risques liés au HPV et favoriser leur passage à l'acte vaccinal.
Étude menée dans le cadre de l’appel à projet en Recherche en Soins Primaires interrégional ReSP-Ir 2022, par le réseau de santé sexuelle du Mont Valérien financé par l’Agence Régionale de Santé Île de France (ARS-IDF), la Direction de la Recherche Clinique et de l’Innovation (DRCI) de l’Hôpital Foch de Suresnes et les CPTS de Suresnes et de Rueil Malmaison.
Ce protocole de recherche repose sur deux phases :
• Une phase interventionnelle (octobre 2024) : 9 collèges publics des Hauts-de-Seine (92) ont accueilli des interventions en santé sexuelle d’une heure, faites par le Dr Aichata Fofana Dara (sexologue) intégrant 15 minutes dédiées au HPV. Plus de 1 000 collégiens de 3e ont été sollicités afin de répondre à des questionnaires avant et après ces sessions et ainsi mesurer l’impact de l’intervention.
• Une phase analytique (avril-mai 2025) : une analyse des données de vente des vaccins HPV dans les pharmacies de Suresnes, Rueil-Malmaison et de deux autres communes témoins, Courbevoie et Neuilly-sur-Seine (qui n’ont pas reçues d’interventions dans leurs collèges) permettra d’évaluer concrètement l’impact de ces interventions sur la vaccination
Le Dr Zucman, infectiologue à l’Hôpital Foch et porteur du projet, explique : « Traditionnellement, l’hôpital concentre ses recherches sur les patients. Avec cette étude, nous sortons de ce cadre pour aborder des enjeux de santé publique plus larges, comme la prévention. Nous voulions identifier les freins et les leviers de la vaccination HPV chez les adolescents et mettre en place une action pour favoriser le rattrapage vaccinal. En ciblant les élèves de 3e, plus proches de la puberté, nous les impliquons directement pour qu'ils deviennent acteurs de leur santé. Et à 14 ans, deux injections de vaccins suffisent encore, contrairement à trois après 15 ans. »
Une étude inédite en France : l’impact des interventions en santé sexuelle sur la vaccination HPV
Depuis 2001, la loi prévoit trois séances d’éducation sexuelle et affective par an au trois niveaux de scolarité école, collège et lycée. Cependant, ce dispositif reste peu appliqué dans certains établissements scolaires. À l’automne 2024, le sujet est revenu au cœur des débats avec le projet de refonte du programme, incluant des thématiques plus approfondies pour les élèves du collège et du lycée, telles que la prévention des risques ou les droits humains. Le personnel éducatif devrait être formé à ces questions dès 2025. Cependant, ces interventions suscitent de vives controverses, notamment de la part de certains parents, inquiets que leurs enfants soient confrontés à des sujets qu’ils jugent sensibles ou susceptibles de les choquer.
C’est dans ce contexte de débat sociétal que s’inscrit cette étude menée par l’Hôpital Foch et les CPTS de Suresnes et de Rueil-Malmaison. L’objectif est d’évaluer l’impact des interventions en santé sexuelle sur la sensibilisation, la compréhension des risques et la vaccination HPV des adolescents. Ce projet constitue un exemple de collaboration entre recherche hospitalière et médecine de ville, visant à mieux intégrer la prévention dans les pratiques de soins.
Des premiers résultats prometteurs : une sensibilisation et une intention vaccinale renforcées chez les collégiens de 3ème après les interventions en santé sexuelle
Interrogés via un questionnaire anonyme pré-intervention (n=1000), 94 % des collégiens de 3e déclarent n’avoir pas encore eu de relations sexuelles ce qui renforce la pertinence de la vaccination sur cette tranche d’âge. Leur méconnaissance du vaccin HPV reste problématique : plus de 35 % ignorent totalement leur statut vaccinal. Par ailleurs, alors que ces cours sont obligatoires dans le cursus, 25 % des sondés déclarent n’avoir jamais bénéficié de cours d’éducation à la vie sexuelle et affective. De plus, seulement 18% des élèves non vaccinés déclarent vouloir recevoir le vaccin contre le HPV. L’étude met également en lumière un enjeu lié au genre : les filles possèdent une meilleure connaissance du HPV que les garçons. Cette disparité reflète en partie le fait que la vaccination des garçons n'est recommandée que depuis trois ans.
Les interventions en santé sexuelle semblent porter leurs fruits. Interrogés cette fois post-intervention :
• 70 % des collégiens déclarent avoir appris de nouvelles choses sur les risques liés aux maladies sexuellement transmissibles dont le HPV.
• ¾ des élèves perçoivent désormais mieux les dangers liés à ce virus.
• Près de 50 % envisagent de se faire vacciner et souhaitent en parler à leur entourage (parents/médecin), soit un taux d’adhésion 2,6 fois plus élevé qu’avant intervention.
Le Dr Zucman se réjouit de ces résultats : « Ces interventions ont montré qu'il est possible d'améliorer rapidement la compréhension des risques chez les adolescents. Par ailleurs, ils ne sont pas gênés par ces discussions et en ressortent souvent plus confiants. »
Des perspectives encourageantes pour rattraper le retard vaccinal en France
Au-delà de la sensibilisation, cette étude vise à démontrer qu’une communication ciblée en milieu scolaire, suivie d’une communication auprès des familles, pourrait significativement améliorer la couverture vaccinale. La seconde phase d’analyse, prévue pour 2025, permettra de vérifier si les intentions exprimées par les collégiens se traduisent par une augmentation des vaccinations sur le terrain (Suresnes, Rueil-Malmaison avec Courbevoie et Neuilly-sur-Seine comme villes témoins).
Le Dr Pinot, médecin généraliste, maitre de conférences universitaire en médecine générale à l’université Paris Cité et présidente de la CPTS de Suresnes, et le Dr Leymarie, médecin généraliste et président de la CPTS du Rueil, soulignent l’importance des prochaines étapes : « Si l’analyse des ventes de vaccins dans les officines de Suresnes et Rueil confirme une hausse par rapport aux communes témoins, cela prouvera l’efficacité des interventions en santé sexuelle. Il ne faut pas sous-estimer le rôle de ces actions complémentaires, en particulier pour les élèves de 3e. L’ARS IDF a d’ailleurs manifesté son intérêt pour les résultats préliminaires de l’étude »
A propos de l’Hôpital Foch
Avec un effectif de 2 300 collaborateurs dont près de 300 médecins, 611 lits installés, 260 000 consultations hors maternité et urgences, et plus de 60 000 hospitalisations par an, l’hôpital Foch fait partie des plus importants établissements hospitaliers d’Ile-de-France. Ses prises en charge pluridisciplinaires de haut niveau dans la quasi-totalité du champ médical et chirurgical de l’adulte, sa forte implication dans l’enseignement, la formation et la recherche, son plateau médicotechnique de pointe, sa tradition d’accueil en font l’un des hôpitaux privés à but non lucratif les plus performants de France.La Fondation franco-américaine Foch, qui a créé et construit l’Hôpital Foch, en demeure aujourd’hui un acteur essentiel dans sa gestion et les choix stratégiques de ses activités. La plupart de ses services bénéficient d’une fréquentation élevée en croissance exceptionnelle rapide.
Pour en savoir plus : https://www.hopital-foch.com/
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[1] Santé Publique France, Bilan de la campagne de vaccination contre les infections à papillomavirus humain (HPV) menée au collège dans les classes de 5e au cours de l’année scolaire 2023-2024 en France