2ème Volet du Baromètre Recherche Médicale 2022 – Regards croisés post-pandémie des acteurs de la santé
La 2ème édition du Baromètre Recherche Médicale réalisée par la Fondation de l’Avenir permet de mesurer l’évolution des connaissances et des attentes du grand public et des médecins au regard des deux ans d’épidémie de COVID-19. La situation sanitaire mondiale a-t-elle davantage familiarisé les Français à la Recherche Médicale ? A-t-elle fait émerger de nouveaux acteurs ? A-t-elle modifié les attentes de la population ? Au travers de nombreuses questions posées à plus de 1 200 personnes en France entière (grand public et médecins : 1000 Français, 204 médecins et 306 pharmaciens hospitaliers, infirmiers et sages-femmes), ce baromètre, unique en son genre, a montré des attentes plus précises en matière de recherche médicale.
Chez les professionnels de santé, les plus jeunes portent un regard optimiste sur les capacités de la recherche médicale et s’y investissent plus que leurs ainés. Tous, professionnels comme grand public, attendent une transparence et une éthique pleines et entières. Alors que la santé représente depuis longtemps un sujet central dans le débat public, le Baromètre Recherche Médicale aide à « prendre la mesure » de ce paysage complexe. Entre plans de soutien à la recherche, projets européens, création de start-up, recherche clinique, recherche fondamentale, etc. : les éléments qui composent cet environnement sont nombreux et difficiles à appréhender.
- L’expérience patient, un facteur de développement de la recherche médicale :
95% des Français (+5pts au regard de 2020) et 92% des acteurs de santé en moyenne pensent qu’une meilleure prise en compte de l’expérience patient et de leurs proches contribuerait à améliorer la recherche médicale. Français et médecins s’accordent à penser qu’il est nécessaire de développer les études avec des indicateurs de type PROMs et PREMS qui évaluent la satisfaction des patients et les études sur les produits de santé en vie réelle. De même, Français comme médecins, pharmaciens hospitaliers et sages-femmes soulignent l’importance des nouvelles technologies pour faciliter la participation des patients dans les projets de recherche à pus de 80% en moyenne – les infirmiers sont eux quasiment unanimes sur le sujet (97%).
Il existe pour autant des divergences quant au degré d’implication qu’il faut donner aux patients : les Français perçoivent ainsi le patient comme une véritable partie prenante de la recherche médicale, estimant même qu’il doit participer à la construction des projets et être concerté dans les décisions alors que les médecins et pharmaciens hospitaliers sont beaucoup plus partagés sur ces deux points. Seuls les infirmiers et les sages-femmes partagent l’opinion des Français, considérant davantage le patient comme acteur décisionnel à 87%.
Néanmoins, les Français et l’ensemble des acteurs de santé interrogés se rejoignent sur le rôle prioritaire du patient en appui à la recherche médicale : le partage de leurs retours d’expérience lorsqu’ils participent à des projets de recherche ou à des études cliniques. Les jeunes générations vont plus loin, et voient davantage le patient investir de son temps pour participer à des actions ou proposer des idées nouvelles de recherche et plus que la moyenne apporter un soutien financier via des dons.
L’implication des patients devrait aussi être mobilisée au travers de l’action des acteurs de santé. Leur rôle apparaît comme primordial pour impliquer les patients : près de 8 répondants sur 10 citent les acteurs de santé comme premier catalyseur de l’engagement des patients dans la recherche médicale. Il convient de noter que les associations de patients et représentants des usagers, ainsi que les familles, jouent également un rôle prépondérant dans l’implication des patients dans la recherche pour 61% des pharmaciens hospitaliers.
L’importance de cette implication des patients au sens large est soulignée, parmi les nombreux domaines de la recherche cités. Pour les Français et les médecins, c’est premièrement le cas pour la recherche clinique alors que chez les autres acteurs de santé, c’est la recherche pour l’organisation des soins qui ressort de prime abord- une tendance qui peut s’expliquer par la forte dimension terrain et interdisciplinaire des métiers d’infirmiers, de pharmaciens hospitaliers et de sages-femmes. D’autres secteurs de recherche sont également identifiés comme primordiaux dans l’implication patients : la santé publique, les pratiques autour du soin ou encore la biologie.
Au final, tous les acteurs de santé s’accordent sur la nécessité de faire évoluer le rôle du patient autour des projets de recherche.
- Un besoin d’éthique et une orientation vers l’intérêt général de la Recherche Médicale
Comme en 2020, les Français et les acteurs de santé s’accordent sur le fait que la Recherche Médicale doit, avant tout, pouvoir bénéficier à tous et rester indépendante vis-à-vis des intérêts des entreprises ou des lobbies. En pratique, près de 8 médecins sur 10 considèrent d’ailleurs que la recherche est orientée dans le sens de l’intérêt général – une conviction moins largement partagée par les Français et le reste des acteurs de santé.
Quant au financement de la recherche médicale publique, elle n’est pas assez soutenue en France pour 89% des Français et 92% des acteurs de santé, et elle doit développer aujourd’hui des partenariats avec des entreprises privées. Développer la recherche publique en s’appuyant sur des partenariats public-privé semble par ailleurs une évidence pour les pharmaciens hospitaliers.
Si Français et acteurs de santé considèrent majoritairement que le public doit avoir accès aux résultats des essais cliniques, leurs avis diffèrent quant à l’orientation des projets de recherche médicale.
Finalement, près de 2 acteurs de santé sur 3 considèrent qu’il faut savoir brider la recherche médicale pour des raisons d’éthique. Ainsi, pour l’ensemble des acteurs de santé, l’éthique doit rester au centre des préoccupations et les décisions entre les mains de groupes experts.
- De grandes similarités entre les acteurs de santé sur les priorités en matière de Recherche
Les médecins se positionnent de manière plus marquée sur la prévention qu’en 2020 avec le préventif qui devance le curatif pour la 1ère fois. Un positionnement également partagé par les pharmaciens hospitaliers et les sages-femmes mais non par les infirmiers qui placent toujours le curatif en premier.
La cancérologie demeure la figure de proue de la recherche médicale, comme en 2020. 37% des Français évoquent spontanément la cancérologie comme travaux de recherche médicale les plus prometteurs actuellement, tout comme 37% des médecins. Une perception particulièrement exacerbée chez les pharmaciens hospitaliers. Et près de 3 Français sur 4 et la quasi-totalité des acteurs de santé placent la cancérologie parmi les priorités de la recherche médicale et même comme la toute première pour 32% des Français et 59% des acteurs de santé.
L’attente est également forte sur la sphère des maladies neurologiques, et dans une moindre mesure sur les maladies infectieuses. Les recherches sur les maladies neurologiques ne sont pas spontanément identifiées comme prometteuses, et apparaissent donc comme une attente prioritaire en matière de recherche pour 77% des Français et 82% des acteurs de santé.
Les maladies infectieuses arrivent quant à elles en troisième position en termes d’attentes pour les Français. En revanche, ce n’est pas le cas pour les médecins qui mettent davantage l’accent sur l’importance de la recherche sur les maladies cardiovasculaires. Du côté des maladies psychiatriques, une autre tendance se dégage : plus d’un tiers des médecins, pharmaciens hospitaliers et sage-femmes pensent qu’elles doivent être une priorité contre seulement 18% des infirmiers.
Les priorités en termes de recherche médicale sont donc majoritairement similaires entre acteurs de santé, exception faite des pharmaciens hospitaliers. En effet, ces derniers sont sans doute plus marqués par la crise sanitaire de la COVID, et se démarquent en positionnant en 3e les maladies infectieuses, tandis que les autres professions se concentrent davantage sur les maladies cardiovasculaires.
- Les financeurs privés, l’Etat et les pouvoirs publics davantage cités pour le financement de la recherche médicale
Un fait qui se maintient au regard de 2020, les laboratoires, public et privés, restent les principaux acteurs de la recherche médicale en France. Bien qu’ils restent les premiers acteurs de la recherche médicale, les laboratoires publics sont aujourd’hui moins cités par les Français qui citent davantage les laboratoires des start-up cette année, une résultante pouvant être liée à la médiatisation et à la mise en avant du travail des biotechs et de l’e-santé par la crise sanitaire et le plan santé 2030.
Alors qu’en 2020, les laboratoires pharmaceutiques et les dons des particuliers étaient les deux plus gros financeurs de la recherche médicale identifiés par les Français et les médecins, les deux années écoulées ont eu un impact sur les résultats. En effet, le rôle joué par les entreprises et l’Etat lors de la crise sanitaire pourraient expliquer certains changements : ils citent davantage les financeurs privés, l’Etat et les pouvoirs publics.
La recherche médicale reste la plus populaire au sein de la recherche scientifique en France comme en 2020 : la santé apparaît comme le domaine de recherche prioritaire pour les Français, que ce soit concernant le traitement des maladies, la prévention santé ou de manière moins directe via les sciences de l’environnement ou encore l’alimentation. Le préventif devance le curatif pour la première fois ! Pour autant, l’importance accordée aux domaines de recherche sur les traitements des maladies et sur les sciences de l’environnement est en baisse, au profit d’une hausse des travaux portant sur l’énergie et l’alimentation. Une image de la recherche médicale qui reste positive, bien qu’écornée par la crise sanitaire. La recherche médicale a encore de nombreux défis à relever.
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