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Epilepsie : mieux coordonner les soins et l’accompagnement des personnes


L’épilepsie est une maladie neurologique chronique qui peut altérer fortement la qualité de vie des personnes atteintes en raison de la survenue de crises épileptiques mais aussi des conséquences psychiatriques, cognitives et sociales de la maladie. Aujourd’hui, les données disponibles font apparaître des insuffisances dans la qualité de la prise en charge : errance diagnostique, soins parfois inadaptés, manque d’accompagnement des personnes dans les différentes sphères de la vie quotidienne. Dans le cadre de la stratégie de transformation du système de santé, la Haute Autorité de santé, en collaboration avec l’Assurance Maladie, publie un guide sur le parcours de santé des personnes atteintes d’une épilepsie. Les objectifs : améliorer le diagnostic, favoriser la coordination de l’ensemble des acteurs impliqués dans une prise en charge personnalisée et, in fine, améliorer la qualité de vie des personnes concernées.

Diagnostic de l'epilepsie par un médecin spécialisé
Diagnostic de l'epilepsie par un médecin spécialisé


L’épilepsie est une maladie neurologique chronique qui peut survenir à tout âge. Environ 600 000 personnes (soit 1% de la population française) en sont atteintes en France. Il s’agit de la deuxième maladie neurologique chronique la plus fréquente, derrière la migraine. Ses causes sont multiples, ses manifestations sont très variées et ses conséquences peuvent être graves allant jusqu’au décès : accident, mort subite non expliquée, suicide…

Après avoir publié des recommandations de bonnes pratiques sur la prise en charge des enfants et des adultes ayant une épilepsie en 2020, la HAS poursuit en publiant un parcours de santé pour chacune de ces deux populations, c’est-dire une organisation de l’offre de soin et d’accompagnement adaptée aux différentes situations.
Une étude menée en 2022 par la HAS, à partir des données du système national des données de santé, a confirmé les résultats d’une étude antérieure de l’Assurance Maladie traduisant le besoin d’une amélioration de la prise en charge. Alors que les recommandations affirment la nécessité que le diagnostic de la maladie soit posé par un neurologue, un neuropédiatre ou un médecin formé à l’épileptologie, les données de l’Assurance Maladie montrent que plus d’un patient sur 5, auquel un antiépileptique a été prescrit, a été vu uniquement par un médecin généraliste. Par ailleurs, les médecins hyper spécialistes de cette pathologie font face à une demande aiguë pour des épilepsies non complexes qui pourraient également être suivies par un médecin généraliste en lien avec un neurologue. Enfin, alors qu’un accompagnement personnalisé est nécessaire pour limiter les répercussions de la maladie dans la vie quotidienne, sociale, familiale, scolaire ou professionnelle des personnes, il est encore insuffisamment proposé aujourd’hui.

Ce parcours s'adresse au premier chef aux agences régionales de la santé (ARS) chargées de l’organisation des filières épilepsie dans les territoires, ainsi qu’aux soignants (médecins généralistes, pédiatres, neurologues, neuropédiatres, infirmiers…), et associations de patients.

Des outils pour faciliter l’appropriation du parcours pour chaque acteur de la prise en charge (disponible sur le site de l’HAS) :
• Une fiche décrivant les étapes clés du parcours de santé sous forme d’algorithmes décisionnels ;
• Une synthèse des points critiques du parcours, objets de dysfonctionnements fréquents, qu’il convient de maîtriser tant ils sont déterminants dans la qualité de la prise en charge ;
• Une fiche sur la transition de l’adolescence à l’âge adulte ;
• Un document réunissant les messages-clés pour améliorer les pratiques ;
o Seul un neurologue ou un médecin formé à l’épileptologie peut poser le diagnostic d’épilepsie ;
o Sa confirmation ne nécessite aucun examen biologique si ce n’est une glycémie capillaire, un ionogramme sanguin et une calcémie lors d’une première crise évocatrice ;
 o Un électrocardiogramme (ECG) et un électroencéphalogramme avec vidéo (VEEG) doivent être réalisés, si possible dans les 48 heures, devant une première crise d’allure convulsive généralisée ;
o Le traitement de l’épilepsie n’est pas que médicamenteux et doit être initié après consultation avec un spécialiste ;
o Les conséquences de l’épilepsie sur l’emploi doivent être prises en compte de manière coordonnée afin que le patient bénéficie d’un accompagnement adapté ;
o Il est nécessaire de l’informer sur la réglementation en matière de conduite ;
o Le suivi médical ne nécessite pas forcément d’examens complémentaires mais au moins une visite annuelle auprès d’un médecin.

Un parcours de santé complet et structuré selon la gravité de la maladie
Le parcours de santé proposé par la HAS et l’Assurance Maladie décrit précisément :
• les étapes d’une prise en charge adaptée de l'enfant et de l’adulte atteintes d’une épilepsie (évaluation globale de la situation des personnes, soins, accompagnement, suivi) ;
• le rôle, la place et les modalités de coordination des professionnels de santé impliqués selon le degré de complexité de la situation (simple, complexe ou très complexe) ;
• la participation des patients à leur parcours et aux décisions les concernant, en s'appuyant sur leurs savoirs expérientiels.

Cette proposition du parcours de santé mobilise de nouveaux métiers tels que les infirmiers de pratique avancée (IPA) et les assistants médicaux, et fait appel à de nouvelles organisations et au numérique (équipe ressource d’accompagnement, recours à la télésanté et aux outils du e-parcours).
Ce parcours vise à optimiser le recours aux examens complémentaires pour le diagnostic, à améliorer la qualité de vie de la personne et le pronostic de la maladie, et à faire en sorte que la situation de chaque patient soit évaluée de manière globale et multidimensionnelle pour une prise en charge personnalisée des conséquences de l’épilepsie. Ce faisant, professionnels de santé et personnes avec épilepsie pourront construire, ensemble, un projet de soins et d’accompagnement, gradué selon la complexité de la situation et tenant compte des besoins des personnes (conduite automobile, emploi, scolarité, loisirs...), de leur mode de vie, de leurs projets personnels et professionnels, Ce projet pourra évoluer dans le temps avec la situation de la personne (majoration des crises ou stabilisation, modification de l’impact sur la qualité de vie, évolution des facteurs personnels...).

Le parcours a aussi pour objectifs de réduire le recours aux soins lorsque ceux-ci sont inutiles et, à l’inverse, de l’augmenter lorsque les soins sont indispensables afin d’éviter toute perte de chance.
Chez les personnes âgées, les spécificités de l'épilepsie ont motivé la description d'un parcours dédié. Enfin, une fiche a été consacrée à la transition de l’adolescence vers l’âge adulte.

Des messages clés pour améliorer les pratiques à chaque étape du Parcours pour les adultes :

Diagnostic
1. Le diagnostic d’épilepsie est posé par un neurologue ou par un médecin formé à l’épileptologie.
2. Le diagnostic positif de crise d’épilepsie ne nécessite aucun examen biologique. Dans le cas d’une première crise évocatrice d’épilepsie, prescrire systématiquement à titre étiologique une glycémie (capillaire), un ionogramme sanguin et une calcémie.
3. Devant une première crise d’allure convulsive généralisée, réaliser un ECG.
4. Après la survenue de tout malaise évocateur d’une première crise d’épilepsie, réaliser un EEG standard (avec vidéo (i.e. vidéo EEG (VEEG)) si possible dans les 48 heures, et dans le respect des recommandations de la Société française de neurophysiologie clinique.
5. Réaliser une IRM encéphalique en cas de première crise dans un contexte non aigu.
6. Rechercher des comorbidités cognitives et psychopathologiques à chaque consultation médicale, et ce, dès le début de la maladie. Un bilan neuropsychologique doit être systématiquement effectué en cas de plainte de la PAE ou de son entourage, de diminution des performances au travail, de situation à risque, si l’examen clinique met en évidence des troubles neurocognitifs.

Soins
7. La décision d’initiation d’un traitement médicamenteux antiépileptique doit se faire après une consultation avec un spécialiste (neurologue, neuropédiatre ou médecin formé à l’épileptologie).
8. Le traitement de l’épilepsie n’est pas que médicamenteux : il comporte une information et une éducation thérapeutique du patient. Au-delà de la gestion des crises, la prise en charge concerne les comorbidités, notamment cognitives ou psychiatriques, et un accompagnement personnalisé au long cours.
9. Si besoin, un accompagnement multidisciplinaire d’une personne avec épilepsie doit être mis en œuvre, en lien avec le neurologue référent, un(e) infirmier(ère) d’appui et le médecin traitant.
10. Discuter sans attendre avec le niveau 3 en réunion de concertation pluriprofessionnelle de la situation globale de tout adulte avec une épilepsie pharmacorésistante.
11. Dès l’instauration d’un traitement antiépileptique chez une fille ou chez une femme en âge de procréer, il est indispensable de l’informer (ainsi que son représentant légal s’il y a lieu) sur les possibles risques de troubles neurodéveloppementaux et sur les risques de malformations chez les enfants exposés à certains antiépileptiques in utero.

Accompagnements
12. Accompagner et prendre en compte de manière coordonnée les conséquences de l’épilepsie sur l’emploi.
13. Informer la personne épileptique de la règlementation concernant le permis de conduire.

Suivi
14. Il n’y a pas lieu de systématiquement réaliser des examens complémentaires de suivi, et cela doit être expliqué à la personne avec épilepsie.
15. Le suivi médical de l’épilepsie doit faire l’objet d’au moins une visite annuelle auprès d’un médecin.


parcours de santé déployé au sein des territoires de manière progressive et variable, en fonction des besoins identifiés et des ressources disponibles

 

Des messages clés pour améliorer les pratiques à chaque étape du Parcours pour les Enfants :

Diagnostic
1. Le diagnostic d’épilepsie et la caractérisation du type d’épilepsie sont faits par un neuropédiatre, un neurologue ou un médecin formé à l’épileptologie.
2. Après l’âge de 1 an, devant une première crise d’épilepsie sans critère de gravité (durée inférieure à 20 minutes, récupération rapide de la conscience, examen neurologique normal au décours), aucun examen complémentaire n’est indispensable en urgence. Une réévaluation par un spécialiste est nécessaire en cas de crises épileptiques répétées (passages multiples aux urgences).
3. Devant une perte de connaissance de l’enfant (hors crise convulsive hyperthermique simple), réaliser un ECG.
4. Devant toute première crise non fébrile, seul un EEG doit être réalisé le plus rapidement possible, si possible dans les 24 heures, dans des conditions d’enregistrement correctes. Avant l’âge de 6 ans, l’EEG vidéo est recommandé.
5. Si une imagerie est nécessaire, l’IRM est l’examen de choix.
6. Étant donné la fréquence des troubles d’apprentissage, un bilan neuropsychologique doit être systématiquement effectué en cas de plainte de la PAE ou de son entourage, de diminution des résultats scolaires ou des performances au travail, si l’examen clinique met en évidence des troubles du développement intellectuel, des troubles cognitifs et/ou des troubles anxieux ou dépressifs. Les troubles de l’attention avec forme inattentive pure doivent être dépistés systématiquement chez les enfants avec épilepsie dès le début de la maladie.

Soins
7. Il n’y a pas de raison de débuter un traitement antiépileptique de fond en urgence en dehors d’un avis spécialisé.
8. La décision d’initiation d’un traitement médicamenteux antiépileptique doit se faire après une consultation avec un spécialiste (neurologue, neuropédiatre ou médecin formé à l’épileptologie) et une consultation d’annonce du diagnostic d’épilepsie.
9. Le traitement de l’épilepsie n’est pas que médicamenteux : il comporte une information de l’enfant et de ses parents, et une éducation thérapeutique du patient. Au-delà de la gestion des crises, il doit concerner les comorbidités cognitives et/ou psychiatriques.
10. L’implication d’une équipe pluriprofessionnelle, dont un(e) infirmier(ère) ou puéricultrice d’appui et le médecin traitant, facilite la coordination et la communication entre les PAE et les soignants.
11. Les enfants avec une épilepsie rare complexe ou pharmacorésistante doivent être évalués par une équipe multidisciplinaire pédiatrique d’un centre de niveau 3.
12. Dès l’instauration d’un traitement antiépileptique chez une fille en âge de procréer, il est indispensable de l’informer (ainsi que son représentant légal s’il y a lieu) sur les risques de troubles neurodéveloppementaux et sur les risques de malformations chez les enfants exposés in utero aux antiépileptiques.
13. La vaccination peut être pratiquée sans restriction chez les enfants ayant une épilepsie idiopathique ou symptomatique.

Accompagnements
14. Les conséquences de l’épilepsie sur la parentalité, sur l’accueil collectif ou individuel « petite enfance » et sur la scolarité doivent être accompagnées et prises en compte de manière coordonnée.
15. Pour le bon développement de l’enfant, les restrictions d’activités, par excès ou par défaut, doivent être discutées avec le spécialiste.
16. L’adolescent souhaitant mettre en œuvre de la conduite ou la conduite automobile accompagnée (possible à partir de l’âge de 15 ans), ou celle d’un deux-roues doit être informé de la règlementation concernant le permis de conduire chez les personnes épileptiques.
17. L’adolescent en cours de construction d’un projet professionnel doit être informé que l’accès à certaines activités professionnelles chez les personnes porteuses d’une épilepsie est règlementé.

Suivi
18. Il n’y a pas lieu de réaliser d’examens complémentaires systématiques de suivi.
19. Le suivi médical de l’épilepsie doit faire l’objet d’au moins une visite annuelle quand l’épilepsie est parfaitement contrôlée et un accès rapide à un avis médical adapté en cas de survenue de crise.

D'un point de vue organisationnel, le parcours de santé proposé par la HAS et l’Assurance Maladie a pour vocation à être repris par les Agences régionales de santé pour une mise en œuvre au sein de leurs territoires, de manière progressive et variable, en fonction des besoins identifiés et des ressources disponibles. Enfin, la définition d’indicateurs de mesure de la qualité du parcours de soins fait actuellement l’objet de travaux de la HAS, qui seront diffusés au second semestre 2023.

Pour en savoir plus : Haute Autorité de Santé - Guides du parcours de santé de l’adulte et de l’enfant avec épilepsie (has-sante.fr)

E.Bouillard

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