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La gazette DIAG & SANTÉ / PATHOLOGIES / Infectiologie

 

Un défi pour la santé mondiale : la bonne utilisation des antibiotiques


En France, comme dans le monde, certaines infections deviennent de plus en plus difficiles à traiter ! Depuis 20 ans, l’antibiorésistance augmente de façon inquiétante ! Pour lutter contre cette menace pour la santé de tous et préserver l’efficacité des antibiotiques, il est crucial d’utiliser ces traitements correctement. Santé Publique France, l’Université de Lorraine, AntibioEst, l’Agence régionale de santé Grand Est, la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de Meurthe et Moselle et la Direction Régionale du Service médical Nord-Est ont constitué un dossier : « Les antibiotiques – Bien se soigner, c’est d’abord bien les utiliser ! »

L’antibiorésistance, qu’est-ce que c’est ?

La résistance aux antibiotiques, également appelée antibiorésistance, désigne la capacité d’une bactérie à résister à l’action d’un antibiotique.
Certaines bactéries sont naturellement résistantes à certains antibiotiques disponibles. D’autres étaient autrefois sensibles à un antibiotique mais ne le sont plus : certaines d’entre elles sont d’ailleurs devenues multirésistantes, autrement dit résistantes à plusieurs antibiotiques. Enfin, quelques rares bactéries résistent désormais à tous les antibiotiques connus.

Comme tout organisme vivant, les bactéries cherchent à s’adapter pour survivre et se multiplier malgré les agressions de leur environnement. Et parmi ces agressions, il y a les antibiotiques. Mais l’utilisation massive, répétée et/ou inadaptée des antibiotiques en santé humaine et animale depuis les années 70 a poussé les bactéries à fortement évoluer pour se protéger. C’est donc bien elle qui est la principale cause de l’accélération de l’antibiorésistance constatée depuis ces 20 dernières années.

Lorsqu’elles sont exposées à un antibiotique, certaines bactéries sont capables de modifier elles-mêmes leurs gènes : elles apprennent à se défendre pour devenir insensibles à l’action de cet antibiotique. Elles survivent donc au traitement et tendent à remplacer les bactéries sensibles à l’antibiotique qui, elles, ont été éliminées. Elles conservent leurs capacités de résistance en se multipliant et peuvent même les transmettre à d’autres bactéries. De plus, les mécanismes de défense qu’elles ont acquis contre un antibiotique peuvent leur permettre de résister à plusieurs antibiotiques.

Tout le monde peut, un jour ou l’autre, être infecté par une bactérie résistante aux antibiotiques, quel que soit l’âge ou l’état de santé. De plus, chacun d’entre nous peut aussi transmettre des bactéries résistantes à son entourage. Ainsi, n’importe qui, même quelqu’un qui n’a jamais pris d’antibiotiques, peut être contaminé par des bactéries résistantes. Cette transmission de bactéries résistantes se fait souvent par les mains. D’où l’importance de bien se laver les mains régulièrement.



 

Quelles sont les conséquences de l’antibiorésistance sur notre santé ?

L’antibiorésistance rend difficile le traitement de certaines infections, même initialement bénignes : le colibacille, responsable des infections urinaires, devient ainsi de plus en plus résistant aux antibiotiques. Le phénomène concerne aussi des maladies infectieuses plus graves comme les pneumonies ou les méningites.

Lorsqu’une personne est atteinte d’une infection à bactérie résistante, le médecin a du mal à trouver le bon antibiotique : l’infection dure plus longtemps et peut entraîner davantage de complications, parfois même le décès. Les antibiotiques utilisés contre une infection résistante sont également plus à risque d’effets indésirables, y compris d’antibiorésistance !

L’augmentation de la résistance aux antibiotiques est particulièrement inquiétante pour les personnes les plus fragiles (âgées, malades, femmes enceintes, nourrissons…). Elle peut compromettre les avancées que la médecine a réalisées depuis plus de 70 ans. Par exemple, les patients bénéficiant d’interventions chirurgicales complexes, de greffes ou de chimiothérapies innovantes ont besoin de traitements antibiotiques efficaces pour pouvoir être bien soignés.

En 2019, plus de 120 000 personnes ont eu une infection due à une bactérie résistante aux antibiotiques et on a évalué à 5 500 le nombre de décès liés à l’antibiorésistance en France. Près d’1,3 million de décès dans le monde peuvent être attribués aux infections résistantes aux antibiotiques (en particulier par le colibacille Escherichia coli et le staphylocoque doré), selon une étude récente.(1). L’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) qualifie le phénomène de pandémie silencieuse – l’antibiorésistance case aujourd’hui deux fois plus de morts que le paludisme. D’ici 2050, l’antibiorésistance pourrait tuer plus de 10 millions de personnes par an, devenant ainsi la première cause de mortalité dans le monde.  (2)

Comment lutter contre l’antibiorésistance ?

Chacun d’entre nous peut lutter contre l’antibiorésistance de deux manières :  

- En évitant les infections afin de limiter le besoin d’antibiotique et la transmission de bactéries résistantes : via des mesures d’hygiène corporelle, et surtout une hygiène rigoureuses des mains, via des mesures d’hygiène diététiques (préparation des repas et aliments dans des conditions adaptés, respect de la chaîne du froid), en cas de symptômes infectieux adoption des mesures nécessaires (isolement, port du masques etc.) etc.
La surveillance de la situation vaccinale des patients est également un point majeur, il faut donc être vigilant sur la mise à jour des vaccins.

- En utilisant mieux les antibiotiques ! Plus on prend d’antibiotiques, plus le risque d’apparition de bactéries résistantes augmente. Les antibiotiques ne doivent donc être utilisés qu’en cas de nécessité. De nombreuses infections courantes (rhume, grippe, bronchite…) sont par exemple d’origine virale et les antibiotiques ne sont d’aucune utilité pour les traiter.
Des tests permettent de confirmer facilement l’origine de l’infection (comme pour les angines qui sont dans 80% des cas d’origine virale) et de rechercher la bactérie en cause et sa sensibilité aux antibiotiques (comme dans les infections urinaires).

Lors de la prescription d’un traitement antibiotique, l’observance du traitement est l’un des points clés : respect des doses, de la fréquence de la prise et de la durée du traitement.

En parallèle des actions à l’échelle des prescripteurs et des usagers, les instances et les gouvernements se mobilisent pour sensibiliser et faire adopter les bons réflexes aux populations. A l’échelle de la France, le ministère du travail, de la santé et des solidarités a lancé un site dédié www.antibiotiques.gouv.fr accessible à tous ! A l’échelle mondiale, l’OMS et l’OMSA (Organisation Mondiale de la santé animale) accompagnent et informent régulièrement sur la menace croissante pour la santé animale et humaine ainsi que sur les moyens de subsistance et la sécurité alimentaire à l’échelle mondiale. Suite à la semaine mondiale de la sensibilité à la résistance aux antimicrobiens qui a eu lieu en novembre 2023, l’approche « une seule santé » avec une démarche globale et transversale est plus importante que jamais ! Cette mobilisation autour de la santé de l’homme, de la santé animale et de la santé des écosystèmes pour une meilleure prévention des maladies, a fait l’objet d’une nouvelle feuille de route interministérielle à l’horizon 2033.

(1)    Lancet, https://doi.org/10.1016/S0140-6736(21)02724-0
(2)    https://www.who.int/fr/news
Source : https://www.sante.fr/antibiomalin-pour-savoir-comment-bien-utiliser-les-antibiotiques


E.Bouillard

 

 

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