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Pour la 1ère fois en France Hexagonale : Détection de moustiques-tigres infectés par le virus de la dengue


La dengue – ou grippe tropicale – est la principale maladie virale liée aux moustiques. A ce jour, il n’existe pas de traitement spécifique. La prévention est donc essentielle. Bien qu’historiquement restreintes à la zone intertropicale, des infections humaines par le virus de la dengue sont détectées en France hexagonale depuis 2010.

Des scientifiques INRAE (Institut National de Recherche pour l’Agriculture, l’Alimentation et l’Environnement), en collaboration avec l’université Claude Bernard Lyon 1, l’EPHE-PSL (Ecole Pratique des Hautes Etudes) et le réseau MASCARA (Moustiques et arbovirus : surveillance et action collective en Auvergne-Rhône-Alpes), réunis au sein d’un réseau constitué de Santé Publique France, l’Agence régionale de santé Auvergne Rhône Alpes, l’entente interdépartementale Rhône Alpes pour la démoustication, l’ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) et le Centre national de référence des arbovirus, sont intervenus sur un foyer de cas de dengue détecté dans la Drôme en 2023. Pour la première fois en France hexagonale, les chercheurs ont trouvé des moustiques infectés par le virus.

Une découverte majeure

Cette découverte permet non seulement de confirmer l’espèce vectrice, mais elle propose aussi un moyen innovant pour tracer le virus et suivre l’épidémiologie de la maladie facilement, rapidement et à moindre coût, par l’analyse des contenus des pièges à moustiques chez des citoyens vivant autour des cas détectés de la maladie.

Le virus responsable de la dengue appartient au genre des Orthoflavivirus comme le virus zika ou le virus West-Nile. Alors que des infections humaines par le virus de la dengue sont détectées en France hexagonale depuis 2010, les données permettant d'identifier les espèces de moustiques impliquées et de tracer le virus font défaut.
Soutenus par le réseau local MASCARA regroupant notamment des agences de santé publique et des laboratoires de recherche, les chercheurs INRAE et leurs collègues ont analysé, à la fin de l'été 2023, des moustiques provenant de pièges privés au sein d'un quartier urbain français touché par un foyer de dengue.

Le foyer, dans la Drôme, comprenait 3 cas, dont 2 autochtones confirmés (par sérologie ou détection du virus), c’est-à-dire que les malades n’avaient pas voyagé dans une zone où la maladie est présente au cours des 15 derniers jours et avaient donc été contaminés sur le territoire français. Un 3ème cas, identifié à proximité des deux premiers suite à l’enquête épidémiologique, a été classé comme importé. L’individu était revenu d'un récent séjour dans les îles françaises des Caraïbes avec des symptômes compatibles avec la dengue, mais celle-ci n'avait pas été diagnostiquée.

Des moustiques Aedes albopictus (moustique-tigre) piégés à moins de 100 m de la zone de résidence des personnes infectées contenaient le virus. Les données génétiques du virus provenant des moustiques collectés ont permis de relier cette souche virale aux souches responsables de l'épidémie de dengue de 2023-2024 ayant sévi dans les îles françaises des Caraïbes. Ceci suggère que les moustiques auraient transmis le virus à partir du cas importé vers les cas autochtones, provoquant le foyer d’infection.

Cette étude indique que le virus circule en France métropolitaine via les populations locales de moustique-tigre. Elle montre l'importance de mettre en place des plans de lutte individuelle et collective vis-à-vis de cette espèce (plateforme officielle de ressources sur le moustique-tigre en Auvergne-Rhône-Alpes), mais aussi de sensibiliser les professionnels de la santé aux maladies transmises par les moustiques. Enfin, elle souligne l'intérêt de la surveillance entomo-virologique, en particulier à travers l’utilisation des pièges à moustiques privés.

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Moustique Tigre 

Depuis quand observe-t-on des cas autochtones de dengue en France ?

En France métropolitaine, des infections autochtones de dengue, c’est-à-dire touchant des personnes n’ayant pas voyagé au cours des 15 derniers jours dans une zone où la maladie est présente, ont été initialement détectées à Nice et sont restées limitées au sud du pays jusqu'en 2018. Depuis, le profil épidémiologique de la dengue a évolué.

Pour la seule année 2022, 65 cas autochtones ont été identifiés et ce total dépasse le nombre cumulé de cas signalés au cours des 10 années précédentes. Par ailleurs, la limite latitudinale des clusters de dengue observés sur le territoire national métropolitain s'est déplacée vers le nord, d'abord vers la région Auvergne-Rhône-Alpes en 2019 puis vers l'Île-de-France en 2023.

Une prévention nécessaire

La lutte prévention est une lutte qui doit se faire dans la durée. Elle implique la collaboration de nombreux acteurs où chacun a un rôle à jouer. Tous les acteurs (particuliers, professionnels et collectivités) d’un même territoire doivent lutter ensemble. Cette lutte, collective, doit permettre de réduire la nuisance subie par les populations et de minimiser les risques sanitaires. L’implication de tous est primordiale : quelques gestes simples mis en œuvre par chacun peuvent empêcher sa prolifération.

La prévention individuelle repose donc essentiellement sur les moyens de protection contre les piqûres de moustiques (répulsifs en sprays ou crèmes, serpentins, diffuseurs électriques, vêtements longs, moustiquaires).

La prévention et la lutte collectives contre les moustiques reposent également sur la lutte antivectorielle et la lutte communautaire. La lutte contre les vecteurs d’agents pathogènes, comme par exemple les moustiques, est qualifiée de lutte antivectorielle. Dans son acception la plus large, cette lutte antivectorielle comprend la lutte et la protection contre ces insectes. La lutte antivectorielle s’appuie sur des méthodes qui diffèrent selon les vecteurs et selon les contextes épidémiologiques et socio-économiques. Elle inclut la lutte chimique, la lutte biologique, la lutte génétique, l’action sur l’environnement, l’éducation sanitaire, la mobilisation sociale et l’évaluation permanente de toutes ces méthodes.

L’objectif est de contribuer, au côté d’autres actions de santé publique, à diminuer les risques d’endémisation (installation durable d’une maladie dans une région) ou d’épidémisation, à diminuer la transmission d’agents pathogènes par des vecteurs, à gérer les épidémies de maladies à vecteur, le tout dans un cadre stratégique formalisé.
En fonction de l’échelle à laquelle cette lutte contre les moustiques est réalisée, on distingue la lutte réalisée à l’échelle de territoires (département, communes) de celle réalisée au niveau individuel, qui vise plus particulièrement les lieux de développement des moustiques qui se situent à proximité directe des habitations. La lutte antivectorielle à l’échelle de territoires est réalisée par des opérateurs publics de démoustication.

La lutte chimique a 2 composantes :
-    Larvicide, dont l’action est dirigée spécifiquement contre les larves de moustiques
-    Adulticide, dont l’action est dirigée spécifiquement contre les moustiques adultes

La lutte communautaire, de la responsabilité de tous, repose sur :
-    La destruction des gîtes larvaires potentiels autour des habitations (eau stagnante dans les soucoupes, gouttières, vases, seaux, détritus...)
-    La protection individuelle contre les piqûres de moustique

Des enjeux de santé publique

Santé Publique France a dans ce contexte plusieurs enjeux essentiels :
-    Définir, piloter et coordonner la surveillance épidémiologique de la dengue en France
-    Adapter la surveillance aux spécificités et risques régionaux : dispositifs de surveillance renforcée dans les départements métropolitains colonisés par le moustique vecteur et dispositifs spécifiques aux différents départements d'outremer avec les Cellules d'intervention en région en lien avec les agences régionales de santé
-    Contribuer à l’information et la sensibilisation des professionnels de santé, des collectivités locales et du grand public sur la maladie et les mesures de prévention.

Référence : Viginier B., Klitting R., Galon C. et al. (2024). Peri-domestic entomological surveillance using private traps allows detection of dengue virus in Aedes albopictus during an autochthonous transmission event in mainland France, late summer 2023. Euro Surveill. 29(36):pii=2400195

E.Bouillard
©La Gazette Diag & Santé

 

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