2021-04-15
Immunothérapie : des résultats prometteurs dans le cancer du poumon et le mélanome uvéal
Le congrès virtuel de l’AACR 2021 se déroule du 10 au 15 avril avec, cette année encore, une mise en valeur notable des travaux et résultats de recherche des médecins et chercheurs de l’Institut Curie. Une vaste étude internationale, rapportée par le Pr Nicolas Girard, à la tête de l'Institut du Thorax Curie – Montsouris, révèle pour la première fois, l’efficacité d’un traitement associant immunothérapie et chimiothérapie chez des patients atteints de cancer du poumon. Le Dr Sophie Piperno-Neumann, quant à elle, présente une avancée majeure dans le traitement du mélanome uvéal métastatique grâce à une toute nouvelle molécule d’immunothérapie.
L’immunothérapie est une option thérapeutique importante pour de nombreux cancers. Elle vise à exploiter le système immunitaire de l'organisme pour combattre le cancer. En bloquant notamment l’interaction entre la cellule tumorale et la cellule immunitaire, les molécules agissent en restaurant l’activité du système immunitaire contre les cellules tumorales.
Cancer du poumon : une association d’immunothérapie et chimiothérapie efficace pour 24% des patients - contre 2,2 % avec la chimiothérapie seule
Le cancer du poumon est la principale cause de décès par cancer dans le monde. Parmi les deux principaux types de cancer du poumon, le cancer du poumon non à petites cellules (CPNPC) représente jusqu'à 84 % des diagnostics dont la majorité (environ 60%) sont non métastatiques. Si de nombreux patients atteints de CPNPC non métastatique sont guéris par la chirurgie, 30 à 55 % d'entre eux développent une récidive. La recherche d’options thérapeutiques avec des traitements néo-adjuvants ou adjuvants est donc primordiale pour améliorer les résultats à long terme et pour une prise en charge optimale des patients.
Les résultats finaux d’une vaste étude internationale de phase 3 (CheckMate-816) coordonnée depuis 2017 par des équipes de l’Institut du Thorax Curie-Montsouris révèlent l’efficacité de l’administration d’une immunothérapie et d’une chimiothérapie (avant la chirurgie) chez 358 patients atteints de CPNPC non métastatiques. Dans cette étude CheckMate-816, le médicament administré est de type anti-checkpoints anti-PD1 (nivolumab) associé à un anti-CTLA-4 (ipilimumab). Les résultats révèlent que 24 % des patients ayant reçu cette nouvelle association de traitement n'ont présenté aucune trace de cellules cancéreuses dans les tissus prélevés lors de l'intervention chirurgicale - contre 2,2 % des patients ayant reçu une chimiothérapie. De plus, quatre fois plus de patients traités par l’immunothérapie plus chimiothérapie que par la chimiothérapie seule ont obtenu une « réponse pathologique majeure », c'est-à-dire avec moins de 10% de cellules tumorales restantes après le traitement néo-adjuvant (36,9 % contre 8,9 %).
« Le traitement du cancer aux stades précoces vise à empêcher la maladie de revenir alors que nous travaillons à la guérison de ces patients", a déclaré le Pr Nicolas Girard, oncologue pneumologue à la tête de l'Institut du Thorax Curie – Montsouris et coordinateur de l’étude CheckMate-816. « Nos résultats scellent le succès d’un collectif réunissant pneumologues, chirurgiens, oncologues, anatomopathologistes et équipes de recherche clinique pour la prise en charge des patients atteints de cancer du poumon. Ils nous laissent entrevoir des perspectives thérapeutiques très prometteuses pour une prise en charge optimale de nos patients et pour leur guérison ».
Mélanome uvéal : une toute nouvelle stratégie d’immunothérapie améliore la survie globale des patients métastatiques
Avec un taux de survie à un an de 52 %, le mélanome uvéal métastatique a un mauvais pronostic et aucun traitement systémique n’a démontré de bénéfice en survie depuis 40 ans. L’Institut Curie a participé et est le premier centre recruteur d’une étude internationale randomisée de phase 3 menée auprès de 378 patients atteints de mélanome uvéal métastatique (IMCgp100-202). Après des résultats prometteurs en phase 1 (ASCO 2018) puis en phase 2 (ESMO 2020) chez des patients métastatiques prétraités, cette étude de phase 3 démontre pour la première fois dans ce cancer rare qu’une toute nouvelle molécule d’immunothérapie (IMCgp100 ou tebentafusp) augmente significativement la survie globale des patients, par rapport aux traitements existants (immunothérapie, chimiothérapie). En effet, après un suivi médian de 13,7 mois, la survie à 1 an est de 73,2% pour les patients ayant reçu le tebentafusp (contre57,5% pour les autres patients (traités par anti-CTL-A4, anti-checkpoint anti PD1 ou chimiothérapie). De plus, le profil de tolérance est acceptable.
« Ces résultats sont très enthousiasmants : le tebentafusp se révèle être le premier traitement expérimental avec un réel bénéfice en survie chez des patients atteints de mélanome uvéal métastatique; cela va changer les pratiques en situation avancée de la maladie, mais aussi possiblement en situation adjuvante après traitement local de la tumeur oculaire, dans le but de diminuer le risque de développer des métastases », déclare le Dr Sophie Piperno-Neumann, oncologue médicale à l’Institut Curie et coordinatrice de l’étude pour la France. « Ces travaux sont d’autant plus prometteurs que Tebentafusp est le premier médicament de cette nouvelle classe thérapeutique en développement dans le traitement d’autres types de cancers ».
Le tebentafusp est une protéine bispécifique capable de rediriger les lymphocytes T CD3+ du patient contre l’antigène mélanocytaire gp100 des cellules tumorales.
Références :
> Nivolumab (NIVO) + platinum-doublet chemotherapy (chemo) vs chemo as neoadjuvant treatment (tx) for resectable (IB-IIIA) non-small cell lung cancer (NSCLC) in the phase 3 CheckMate 816 trial - Pr Nicolas Girard
> Phase 3 randomized trial comparing tebentafusp with investigator’s choice in first line metastatic uveal melanoma - Dr Sophie Piperno-Neumann
> Characterization of ESR1 mutations at metastatic relapse and outcome under first line aromatase inhibitor and palbociclib in the PADA-1 trial. Pr François-Clément Bidard
L'essai PADA-1, coordonnée par le Pr François-Clément Bidard, médecin-chercheur en oncologie médicale à l'Institut Curie, explore l'utilité de l'ADN tumoral circulant dans le cancer du sein, pour détecter l'apparition en cours de traitement des mutations du gène ESR1, responsables d'une résistance à l'hormonothérapie. Cet essai majeur est mené depuis 2017 dans plus de 80 centres français avec la participation de 1017 patientes. Les travaux présentés à l'AACR 2021 portent notamment sur la comparaison de la technique de détection de mutations utilisée dans l’étude avec les techniques de séquençage de nouvelle génération. Ils rapportent une excellente concordance des tests.
A propos de l’Institut Curie
L’Institut Curie, 1er centre français de lutte contre le cancer, associe un centre de recherche de renommée internationale et un ensemble hospitalier de pointe qui prend en charge tous les cancers y compris les plus rares. Fondé en 1909 par Marie Curie, l’Institut Curie rassemble sur 3 sites (Paris, Saint-Cloud et Orsay) 3 600 chercheurs, médecins et soignants autour de ses 3 missions : soins, recherche et enseignement. Fondation reconnue d’utilité publique habilitée à recevoir des dons et des legs, l’Institut Curie peut, grâce au soutien de ses donateurs, accélérer les découvertes et ainsi améliorer les traitements et la qualité de vie des malades.
Pour en savoir plus : curie.fr
A propos de l’Institut du Thorax Curie-Montsouris et de l’Institut Mutualiste Montsouris (IMM)
L’Institut Curie et l’Institut Mutualiste Montsouris (IMM) ont créé en 2017 l’Institut du thorax Curie-Montsouris afin d’offrir aux patients une prise en charge globale. Cet institut regroupe, sur deux sites hospitaliers, le département de pneumologie et de chirurgie thoracique de l'Institut Mutualiste Montsouris et les départements d'oncologie médicale et d’oncologie radiothérapique de l'Institut Curie.
Pour en savoir plus : https://imm.fr/nos-specialites/institut-du-thorax-curie-montsouris
L'IMM est un établissement de 470 lits. Il est ouvert à tous et ses professionnels ne pratiquent pas de dépassement d'honoraires. L’IMM développe principalement des activités lourdes ou complexes à dominante chirurgicale dans la plupart des domaines pathologiques, en dehors de la neurochirurgie et de l’ORL. L'IMM est à la pointe des innovations technologiques et figure parmi les meilleurs établissements de France.